La Libye attendait mardi une aide étrangère pour pouvoir venir à bout d'un incendie ravageant un important site de stockage de carburant à Tripoli et provoqué par des combats incessants entre milices rivales, faisant peser une menace sur la capitale. Des combats avaient également lieu à Benghazi, dans l'est du pays, où un avion militaire engagé dans des affrontements au côté d'un général dissident contre des groupes islamistes s'est écrasé. Face à l'anarchie en Libye, la France a annoncé son intention d'évacuer ses ressortissants de ce pays par voie maritime, après la décision de plusieurs Etats occidentaux dont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, le Portugal et les Pays-Bas d'évacuer leur personnel diplomatique. Depuis la chute en octobre 2011 du régime de Mouammar Kadhafi après huit mois de rébellion soutenue par les Occidentaux, les autorités libyennes ne parviennent pas à contrôler les dizaines de milices formées d'ex-insurgés qui font la loi en Libye, en l'absence d'une armée et d'une police régulières bien entraînées. Des combats entre milices rivales, ou entre groupes islamistes et soldats ou encore entre forces d'un général dissident et groupes radicaux ont coûté la vie à des centaines de personnes à travers le pays depuis des mois. Après une matinée calme, les combats entre milices rivales ont repris en milieu de journée sur la route de l'aéroport de Tripoli, après avoir fait au moins une centaine de morts et 400 blessés depuis le 13 juillet. Ce sont des roquettes tirées durant ces combats qui ont touché dimanche un important dépôt de stockage d'hydrocarbures, situé à proximité, y provoquant un énorme incendie. Face à l'impuissance des pompiers libyens à maîtriser le feu, en partie en raison des combats, le gouvernement libyen a fait appel à l'aide de pays étrangers. L'Italie doit, selon Tripoli, envoyer sept avions de lutte contre les incendies et des équipes techniques, à une date non précisée, à condition que les violences cessent.
Crainte d'une 'catastrophe Deux immenses réservoirs de carburant étaient toujours en feu mardi. Ce dépôt de stockage contient au total plus de 90 millions de litres de carburant, ainsi qu'une cuve de gaz ménager. Les autorités ont annoncé que l'incendie était hors de contrôle et dit craindre une catastrophe humaine et environnementale aux conséquences difficiles à prévoir. La France a confirmé avoir reçu, elle aussi, une demande d'aide mais souligné que les violences dans la capitale rendent très difficile l'accès à la zone concernée. Le gouvernement a de nouveau appelé à un cessez-le feu pour permettre aux équipes techniques et aux avions d'éteindre l'incendie le plus rapidement possible. Les affrontements autour de l'aéroport ont éclaté après une attaque menée par des combattants islamistes et d'ex-rebelles de la ville de Misrata (200 km à l'est de Tripoli) qui tentent de chasser de l'aéroport leurs anciens compagnons d'armes venus de la ville de Zenten. Considérés comme le bras armé de la mouvance libérale, les ex-rebelles de Zenten (170 km au sud-ouest de Tripoli) contrôlent l'aéroport de Tripoli et plusieurs autres sites militaires et civils du sud de la capitale. Toutes les tentatives de médiation du gouvernement libyen pour mettre fin aux combats, ont échoué jusqu'ici. Les espoirs se tournent désormais vers le nouveau Parlement, issu des élections du 25 juin, qui pourrait imposer un arrêt des combats.
Crash d'un avion militaire Mais des incertitudes planent déjà sur la capacité des élus à se réunir alors que Benghazi est le théâtre d'affrontements quasi-quotidiens. Une quarantaine de personnes ont été tuées durant le week-end dans de nouveaux combats entre l'armée et des milices islamistes. Mardi, un avion militaire engagé dans des combats s'est écrasé. Le pilote a sauté avec son parachute et il est sain et sauf, a précisé le général Sagr Al-Jerouchi, chef des opérations des forces aériennes loyales au général dissident Khalifa Haftar. M. Al-Jerouchi n'était pas toutefois en mesure de préciser si l'avion avait été abattu par les islamistes.
Réunion d'urgence du nouveau Parlement aujourd'hui à Tobrouk Le nouveau Parlement libyen, issu des élections du 25 juin, a décidé de se réunir d'urgence aujourd'hui, avançant de 48 heures la séance inaugurale prévue le 4 août, a indiqué le député Abou Bakr Biira. Mais, signe de la confusion qui règne dans le pays, Nouri Abou Sahamein, le président du Congrès général national (CGN), le Parlement sortant, a maintenu l'invitation de la nouvelle Chambre des représentants à une première réunion le 4 août à Tripoli, et non plus à Benghazi en raison des violences. M. Biira a réagi en indiquant que les élus tenaient à se réunir samedi, sans prendre compte de l'invitation du président du CGN dont le mandat a expiré. Seul élément sur lequel les deux hommes sont d'accord: Benghazi, où devait se tenir initialement la réunion, est trop dangereuse. M. Biira a indiqué qu'au vu la situation dangereuse dans le pays nous avons décidé de tenir une réunion d'urgence à Tobrouk, à quelque 200 km à l'est de Benghazi, tandis que M. Abou Sahmein a convoqué les élus dans la capitale. Cette confusion illustre l'anarchie qui règne au sein des institutions, en proie à d'intenses luttes de pouvoir. La communauté internationale a appelé à plusieurs reprises le nouveau Parlement à se réunir rapidement, dans l'espoir de remettre de l'ordre dans les institutions de l'Etat et former un nouveau gouvernement. Mais les combats qui font rage depuis plus de deux semaines à Tripoli et Benghazi ont semé le doute quant à la capacité de la nouvelle Chambre des représentants à se réunir. La mouvance libérale accuse en effet les islamistes de semer le chaos dans le pays en vue d'empêcher la prise de fonction du Parlement.
Reprise des combats à l'aéroport de Tripoli, les évacuations s'accélèrent D'intenses affrontements faisaient rage avant-hier entre milices rivales autour de l'aéroport de Tripoli en Libye, où l'évacuation des ressortissants étrangers s'accélérait face à l'escalade des violences. Les Philippines ont annoncé qu'elles affréteraient des ferries pour évacuer leurs 13 000 ressortissants, après l'enlèvement et le viol d'une infirmière cette semaine par un groupe armé, et la découverte il y a dix jours du cadavre décapité d'un ouvrier philippin. L'Espagne a de son côté évacué temporairement le personnel de son ambassade face à l'aggravation de la situation dans la capitale libyenne. L'Union européenne, la Grèce, la Suisse et la République tchèque ont aussi fermé leurs représentations et évacué leurs diplomates. En revanche, l'ambassade d'Italie, tout comme celle du Royaume-Uni, restait ouverte. Rester en Libye signifie tenter d'avoir un rôle sur quelques-unes des questions géopolitiques les plus importantes de ces prochaines années : la paix, la sécurité et l'immigration, a justifié le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi. Cette accélération dans les évacuations est survenue alors que de violents combats ont repris autour de l'aéroport de Tripoli, après deux jours de relative accalmie. Des assaillants ont mené une nouvelle offensive sur l'aéroport, faisant usage d'armes lourdes et légères, a déclaré le chef de la force chargée de la sécurité de l'aéroport, al-Jilani al-Dahech, qui se trouvait sur place. Le bruit de tirs et d'explosions pouvait être entendu durant la conversation téléphonique. M. Dahech a fait état de quelques blessés parmi ses hommes. Ces derniers combattent au côté des miliciens de Zenten (ouest de Tripoli), que des combattants islamistes et de Misrata (est de Tripoli) tentent de chasser de l'aéroport depuis le 13 juillet. Selon des témoins, d'autres combats ont été signalés sur la route de l'aéroport et dans la banlieue ouest de la capitale. Des explosions étaient entendues depuis le centre-ville. Les combats autour de l'aéroport, les plus violents en près de trois ans à Tripoli, ont fait 102 morts et 452 blessés depuis le 13 juillet, selon un dernier bilan officiel arrêté mercredi soir. L'aéroport est fermé depuis cette date et plusieurs avions ont été endommagés par les combats entre ces anciens rebelles qui avaient combattu ensemble pendant huit mois le régime du dictateur Mouammar Kadhafi en 2011.
Manifestations contre les violences Jeudi soir, des centaines d'habitants de la capitale ont manifesté dans leurs quartiers et dans le centre-ville, pour dénoncer les violences et réclamer l'arrêt des combats. Selon des experts, ces combats entrent dans le cadre d'une lutte d'influence entre régions mais aussi entre courants politiques, dans un pays plongé dans le chaos, les autorités ne parvenant pas à contrôler les dizaines de milices qui font la loi en l'absence d'une armée et d'une police bien structurées et entraînées. Parallèlement, sur la route de l'aéroport, les pompiers s'activaient à éteindre le feu faisant rage depuis dimanche dans un dépôt de stockage d'hydrocarbures qui contient plus de 90 millions de litres de carburant, ainsi qu'une cuve de gaz ménager. Leur travail a été interrompu maintes fois à cause des tirs. Les autorités, affirmant craindre une catastrophe humaine et environnementale, ont appelé des pays étrangers à l'aide mais les violences ont dissuadé ces Etats d'envoyer des équipes techniques. Les combats ont quasiment paralysé la capitale, où banques et administrations sont fermées depuis plusieurs jours. Des pénuries de carburant et d'électricité ainsi que des coupures d'eau empoisonnent la vie des habitants.
Calme relatif à Benghazi La capitale était quasi-vide jeudi et la plupart des commerces avaient baissé le rideau, même si le centre-ville a été jusqu'à présent épargné par les affrontements. A Benghazi, dans l'est du pays, la situation était relativement calme, après plusieurs jours de combats qui ont fait près de 100 morts et à l'issue desquels des milices islamistes sont parvenues à s'emparer de la principale base militaire de la ville. Les groupes islamistes ont en outre repris le contrôle de l'hôpital al-Jala, dans le centre-ville, après en avoir été chassés par des dizaines de manifestants, selon des témoins. Face au chaos, le nouveau Parlement issu des élections du 25 juin a décidé de se réunir d'urgence samedi à Tobrouk (est), avançant de 48 heures la séance inaugurale prévue le 4 août à Benghazi, devenue trop dangereuse. Mais il n'est pas sûr que cette réunion ait lieu, le président du Parlement sortant ayant affirmé que la réunion serait maintenue au 4 août, mais à Tripoli.