Branle-bas de combat depuis plus d'une semaine à Londres, devenue une véritable fourmilière de services secrets britanniques et surtout américains. Mardi soir, enfin, Barack Hussein Obama est arrivé dans la capitale britannique. Pour un marathon européen de huit jours. Pour la première grande sortie sur le vieux continent du président américain, les services de la Maison-Blanche n'ont pas lésiné sur les moyens et les dépenses. Quelque 800 personnes accompagnent Obama dans son voyage.Avec armes et bagages, journalistes, médecins, cuisiniers, tailleurs, conseillers, limousines, hélicoptère…La puissance de l'Amérique dans toute sa splendeur. Malgré la crise. Londres, investie depuis plusieurs semaines par des «men in black», se barricade, quelque peu apeurée par cet événement.Les bobbies de Sa Gracieuse Majesté ont suggéré aux commerçants de «fermer boutique», par mesure de précaution. C'est qu'Obama est à Londres pour le sommet du G20 qui s'y tiendra les 2 et 3 avril, au centre des congrès l'Excel, le long des docks londoniens. Les altermondialistes mobilisés Un sommet «menacé» par des milliers d'«altermondialistes» qui veulent en découdre avec ceux qu'ils considèrent comme la source de tous les maux et déséquilibres de la Planète.Des altermondialistes qui ont déjà manifesté la semaine passée leur mécontentement dans la plupart des capitales européennes et qui, à l'occasion de ce sommet, vont converger vers Londres pour poursuivre leur combat. Obama aura sans doute l'occasion de vivre ainsi un véritable baptême du feu, au propre et au figuré. En tant que président de la première puissance mondiale mais aussi en tant que premier président noir et populaire et sur lequel reposent d'énormes espoirs, car il faudra trouver une réponse «concertée» à cette crise. Son charisme suffira-t-il à dissiper les doutes des manifestants ? Pourra-t-il convaincre ses pairs européens à poursuivre leurs efforts afin de trouver la solution la meilleure pour régler la crise économique qui affecte le monde ? Une crise, faut-il le rappeler, qui a pris sa source à Wall Street et sur le sol américain et qui a mis à terre des millions de citoyens. Les 27 se plieront-ils aux exigences américaines ? Les Européens l'ont déjà affirmé : ils ne feront plus d'autres dépenses qui risqueraient de creuser leur déficit et les pousseraient au fond d'un gouffre dont on aperçoit déjà les contours pour certains secteurs.Les 20 pays les plus économiquement puissants de la planète vont s'asseoir autour d'une table pour négocier. Mais déjà des voix divergentes s'élèvent à travers le monde pour afficher un pessimisme à la hauteur des dégâts collatéraux occasionnés par la crise financière, rapidement devenue économique. Des voix fusent des quatre coins de la planète pour dire que ce G20 est une mascarade et que les 20 pays qui détiennent à eux seuls 80% de la richesse mondiale ne chercheront qu'à protéger leurs acquis et leurs économies. Certes le FMI a pu décrocher le doublement de ses dotations, mais le FMI a ses règles et tout le monde n'est pas d'accord avec celles-ci. Et le tiers-monde dans tout ça ? Les pays les moins avancés, les pays du tiers-monde, ne sont pas invités à Londres. Or ce sont ces pays qui amortissent le plus l'onde de choc sismique de cette récession. Comment leurs économies réagiront-elles lorsque les 20 auront satisfait leurs argentiers et réconforté leurs contribuables ? Lorsqu'ils auront relancé leur capitalisme obsolète ? La famine guettera davantage le Sahel, une grande partie de l'Afrique, de l'Inde et du continent asiatique. Les économies du tiers-monde, si elles ne paraissent pas encore trop affectées, vont sombrer lentement mais sûrement devant les mesures protectionnistes que l'Europe et les Etats-Unis vont immanquablement mener. Les altermondialistes ne s'y trompent pas. Cela fait une décennie qu'ils ont touché du doigt le fond du problème et averti des conséquences néfastes et dangereuses du système capitaliste qui est dépassé. La crise actuelle leur donne raison. Que feront les 20 pour réformer, révolutionner le système financier actuel ? Prendront-ils les mesures adéquates, sachant que c'est un remède de cheval qu'il faudra utiliser aujourd'hui ? En attendant le sommet, Obama sera reçu à Buckingham Palace en compagnie de son épouse Michèle pour prendre un thé en compagnie de Sa Gracieuse Majesté.Une rencontre avec le Premier ministre Gordon Brown – son meilleur allié – est programmée pour le petit-déjeuner de mercredi au 10 Downing Street. Les Russes et les Chinois d'égal à égal ? Ensuite, cette première vraie rencontre avec le camarade Medvedev mais aussi le Chinois Hu Jin Tao est très attendue. Les relations russo-américaines et l'éventuel renouvellement du Traité de réduction des armes stratégiques Start-1, un pacte de désarmement conclu pendant la Guerre froide et qui expire en décembre, sont à l'ordre du jour. Cela pourrait être une réponse positive à la fameuse «remise à zéro des compteurs» si chère à Hillary. Les Etats-Unis et la Russie veulent aboutir «à de premiers accords concrets afin que le travail puisse être terminé d'ici la fin de l'année», d'autant que «les pourparlers sur un renouvellement de Start, qui a abouti à une très forte réduction des arsenaux nucléaires russe et américain après sa signature en 1991, se sont trouvés dans une impasse sous l'administration de George W. Bush». Voilà qui est dit. Mais la Russie entend aussi donner de la voix lors de ce G20 pour apporter de l'eau à son moulin et défendre ses intérêts. C'est ce que fera également le président chinois dont ce sera la première rencontre officielle avec Obama. Comme de nombreux analystes le confirment, la Chine veut être considérée comme l'égale des Etats-Unis et donc discuter la tête haute, notamment des retombées du dollar. La Chine ne veut plus du billet vert En effet, la Chine est le plus gros investisseur en bons du Trésor américain, et la détérioration du billet vert risque de porter un sale coup à l'économie de l'Empire céleste. Pékin a d'ailleurs évoqué le fait de devoir remplacer cette monnaie en tant que monnaie de réserve de change internationale, au grand dam des Américains. Il faudra donc s'attendre à des négociations serrées, et Obama devra faire preuve de beaucoup de patience et de prudence face à une mentalité orientale dont il ne soupçonne sûrement pas toutes les finesses…Jeudi et vendredi, le G20 répondra-t-il aux attentes des consommateurs lambda de la planète ? Nous le saurons assez vite. Mais jeudi et vendredi, déjà de nouveaux défis attendent Obama. Ce sera lors du sommet de l'Otan. L'Alliance fêtera ses soixante ans d'existence à cheval sur l'Allemagne et la France, à Strasbourg et Kehl-Baden Baden. Deux villes frontalières qui sont aussi sur les dents et où l'on a réinstauré pour l'occasion les contrôles d'identité…Enfin, Angela Merkel et surtout Nicloas Sarkozy pourront recevoir le grand Obama sur leurs territoires respectifs ! Nous reviendrons sur ce sommet de l'Otan qui promet, en temps voulu. La Turquie pour jeter un pont avec le monde arabo-musulman Le 5 avril, la délégation américaine devra se rendre en République tchèque où, malgré la crise politique qui affecte le gouvernement praguois, Obama rencontrera les Européens pour y discuter d'autres problèmes qui préoccupent le monde. Il s'agira ici particulièrement d'évoquer les problèmes climatiques auxquels Pékin semble vouloir s'intéresser de plus en plus d'ailleurs. Malgré les réticences américaines face au protocole de Kyoto. Il sera aussi question des boucliers antimissiles qui altèrent les relations occidentales et américaines avec leurs voisins asiatiques et russe. Enfin, le périple américain sur le vieux continent s'achèvera pour Obama en Turquie, à Ankara et Istanbul. Une visite très attendue mais surtout recherchée par l'Administration américaine qui compte beaucoup sur son allié turc au sein de l'Alliance et aussi sur le rôle important d'Ankara dans les affaires du Moyen-Orient. Obama a choisi, en outre, d'assister en Turquie au «deuxième forum de l'Alliance des civilisations», ce qui n'est pas peu dire. Le message est clair : le président américain veut définitivement rompre avec les tares de son prédécesseur à la Maison-Blanche. Contrairement à Bush qui privilégie le «choc des civilisations», l'actuel locataire de la Maison-Blanche préfère aller de l'avant. C'est pourquoi sans doute a-t-il choisi la Turquie pour s'adresser directement au monde arabe et musulman afin de lancer un véritable dialogue. Ce pont prendra-t-il exemple sur celui du détroit du Bosphore qui relie deux continents ? Washington le souhaite. C'est une question d'intérêts pour l'Amérique.