Dans la gastronomie algérienne, le poisson a toujours eu sa place. Sa consommation diffère d'une région à une autre. Ainsi, dans certaines villes côtières, en plus de le consommer grillé ou en friture, il accompagne même le couscous. Le couscous au poisson de Jijel et de Cherchell est dit-on un délice. La chorba aux crevettes est une spécialité algéroise des plus raffinées. Toutefois, ces denrées de la mer, très prisées pour leurs qualités nutritives et leur goût fin, sont devenues si rares, et par conséquent si chères, que les retrouver dans le menu de l'Algérien moyen est devenu un leurre. Mais le poisson n'est pas un produit de la mer seulement. Il peut également provenir de la rivière, des barrages ou autres plans d'eau. Avant que la sécheresse et la pollution ne gagnent nos rivières, ces dernières étaient identiques à celles qui coulent en Europe. En contenant et en contenu. Les Français ont été les premiers à y avoir introduit des poissons pour leur propre consommation. Grâce aux fontes de glace des montagnes qui les surplombent, les poissons y ont foisonné des années durant. A titre d'exemple, dans certaines régions de Kabylie, à proximité de ces cours d'eau, le premier poisson que les populations locales ont goûté est celui péché du fleuve qui coule en contrebas de leur village. Celui qui s'y est le mieux adapté est l'anguille. Appelée «assannour», «isselman» ou encore «thassalvahth» selon les régions, elle fut très appréciée comme complément à une nourriture traditionnelle basée sur le couscous. Elle était consommée grillée sur les braises ou frite. Mais sa reproduction intensive a fait que l'anguille, après avoir été considérée comme le poisson du pauvre en raison de son caractère commun, a été victime de sa popularité au fur et à mesure qu'elle se raréfiait. Dans le monde, les populations de la plupart des espèces du genre Anguilla sont en forte régression, probablement pour plusieurs raisons, comme la surpêche, la pollution, la perturbation endocrinienne. Menacée, elle est aujourd'hui protégée dans plusieurs pays. En Europe, cette espèce fait l'objet de tentatives de reproduction artificielle et pourra faire l'objet de plans de restauration et de réintroduction, dans le cadre d'un règlement européen qui vise à empêcher la disparition de cette espèce. En Algérie, et pour parer au manque de poissons de mer et assurer un équilibre alimentaire, l'Algérie s'est lancée dans un programme de développement d'activités productrices de poissons d'eau douce, comme l'aquaculture et la pisciculture. De nombreuses variétés de poissons ont été expérimentées dans les barrages et les fermes d'élevage et commencent à porter leurs fruits. Enfin, dans notre recherche de trouver d'autres poissons que la population algérienne aurait compté dans son palmarès culinaire, un seul nous a semblé digne d'être présenté, même s'il ne fait pas partie des poissons qui ont évolué dans nos cours d'eau, mais pour son nom. Il s'agit du blageon, un poisson d'eau douce originaire du bassin du Danube et qui fréquente les eaux fraîches des rivières et des lacs. Fréquentant les eaux courantes à fond de gravier, ce poisson est également appelé le «soufie». Alors si des fois au restaurant on vient à vous proposer du soufie, vous saurez de quoi il s'agit !