Les appels à une intervention militaire internationale en Libye, principalement égyptiens ont été reçus avec prudence par les grandes puissances occidentales qui plaident pour une solution politique et la formation d'un gouvernement d'union nationale à quelques heures d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU. L'Egypte, qui s'est placée en première ligne de la communauté internationale pour demander à l'ONU de mandater une intervention internationale en Libye, devait officiellement demander cet après-midi au Conseil de sécurité, lors d'une réunion extraordinaire sur la situation en Libye, d'adopter une résolution pour l'intervention militaire d'une coalition internationale, après avoir bombardé seule lundi des positions de groupes affiliés à l'organisation autoproclamée "Etat islamique" (IE/Daech) dans ce pays après le massacre de 21 ressortissants égyptiens. L'Egypte a été soutenue par la France dans cette démarche, après l'appel des présidents des deux pays, François Hollande et Abdelfattah al-Sissi, à une réunion du Conseil de sécurité pour décider de "nouvelles mesures" contre les groupes armés libyens affiliés à l'IE/Daech, autrement dit, une intervention militaire. Le ministre des Affaires étrangère égyptien Sameh Choukri a appelé également mercredi à New York, où il a rencontré les ambassadeurs des cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Chine, France, Russie, Etats-Unis et Grande-Bretagne), à lever l'embargo sur les armes imposé aux autorités libyennes reconnues par la communauté internationale qui participent aux frappes égyptiennes. Cependant, les grandes puissances occidentales, dont l'Italie, ont rendu publique mardi une déclaration commune dans laquelle elles affirment la nécessité d'une solution politique en Libye et appellent à la formation d'un gouvernement d'unité nationale qu'elles sont prêts à soutenir. La formation d'un gouvernement d'unité nationale, que ces grandes puissances occidentales (Etats-Unis, Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie et Espagne) se disent prêtes à soutenir, "constitue le meilleur espoir pour les Libyens", souligne la déclaration. Le texte annonce par ailleurs que le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour la Libye, Bernardino Leon, convoquera dans les prochains jours une série de réunions dans le but d'aboutir à la formation de ce gouvernement d'unité nationale. Ceux qui ne participeront pas à ce processus de réconciliation s'excluront de "la solution politique en Libye", ajoute le document. En outre, selon des diplomates, pour qu'il y'ait une intervention militaire internationale en Libye il faudra une demande formelle du gouvernement libyen. Or, la Libye a pour l'instant deux gouvernements et parlements rivaux, l'un proche de la coalition Fajr Libya et l'autre reconnu par la communauté internationale et siégeant à Tobrouk, à la frontière avec l'Egypte. La Russie et la Chine sont de leur côté notoirement réticentes à l'idée d'intervenir sous bannière onusienne. Moscou a toujours reproché à l'ONU d'avoir outrepassé son rôle en adoptant des résolutions qui ont mené à l'opération internationale en Libye pour renverser l'ancien régime de Maâmmar El-Gueddafi. Beaucoup de pays voisins de la Libye, dont l'Algérie, prônent le dialogue dans le cadre du respect de la souveraineté de la Libye et du renforcement des ses institutions à travers la réconciliation nationale et refusent catégoriquement l'idée d'une intervention militaire en Libye. Le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra a affirmé cette semaine que l'agression terroriste ayant ciblé des ressortissants égyptiens innocents en Libye, en appelle à l'intensification des efforts pour encourager les Libyens à s'engager dans le dialogue. Dans ces conditions, des diplomates à l'ONU ont estimé qu'ils ne s'attendent à aucune décision mercredi, ni même à une déclaration du Conseil de sécurité à l'issue de la réunion. Il s'agira d'un premier échange de vues sur l'état de la situation, a-t-on précisé. Une solution militaire est la pire de toutes Une intervention militaire en Libye risque d'accentuer les violences dans ce pays en crise depuis 2011, ont mis en garde des spécialistes, soulignant que le dialogue entre les parties antagonistes reste la seule solution pour instaurer la paix dans ce pays. "Une intervention militaire ne peut guère mettre fin au conflit. Au contraire elle risque de le faire perdurer pour plusieurs années, à l'instar de l'Afghanistan et de l'Irak", attestent-ils. L'intervention militaire est la pire des solutions, la communauté internationale et les Libyens eux même en sont conscients. Il faut admettre que la situation qui prévaut actuellement en Libye est en partie la conséquence de cette option choisie par la France au début du conflit en 2011 dans ce pays qui célèbre ce 17 février son 4ème anniversaire de l'appel au soulèvement qui a conduit à la chute du régime de Maâmmar El Gueddafi, et poussé la Libye dans une situation chaotique en raison d'une crise politique et sécuritaire aigue. "La solution est politique, pas militaire", a affirmé Luis Martinez, du Centre d'études et de recherches internationales (CERI). "Cela va être sans doute long mais c'est le seul chemin pour que ce pays devienne finalement un Etat avec un gouvernement représentatif", a-t-il ajouté. La "première étape" est de chercher à rapprocher "les factions rivales et à construire une armée libyenne nationale", a expliqué Mazen Cherif, expert des questions de terrorisme. "L'Occident pourrait ensuite aider cette armée à pouvoir faire face au groupes terroristes", a-t-il ajouté.