Le mouvement Ennahda a fortement critiqué, hier, le projet de loi de finances (PLF 2016) estimant qu'il constitue une menace pour la stabilité sociale et la sécurité alimentaire du pays. «Ce projet de loi est le pire de tous les projets que le gouvernement ait fait jusqu'à présent. C'est un danger pour l'avenir du pays», a martelé le secrétaire général d'Ennahda, Mohamed Douibi, lors d'une journée d'étude sur le PLF 2016 regroupant députés du parti et experts économiques. Le mouvement a exprimé sa vive inquiétude quant à la pression sociale et ses conséquences sur la paix et la sécurité nationale en raison du recours du pouvoir à de nouveaux impôts et taxes. Ce qui équivaut, a-t-il estimé, à sacrifier les couches moyennes en Algérie dont le pouvoir d'achat a subi les effets de la dévaluation de la monnaie nationale. «Nous nous opposons catégoriquement à l'adoption de cette loi extrêmement nuisible pour l'économie nationale», a souligné Douibi. Parmi les articles qui posent problème, le parti cite l'article 71 qui permet au gouvernement de «toucher», au gré des conjonctures, aux budgets votés par département ministériel. Cet article est complètement en contradiction avec l'article 84 de la loi organique relative aux lois de finances qui interdit de disposer des budgets autrement que dans la forme votée par le Parlement, explique-t-il. «Cette mesure encourage la spéculation et le chantage des détenteurs de capitaux qui interviennent dans la décision politique en Algérie en mettant les capacités du pays et ses richesses aux mains d'un seul groupe aux dépens de la majorité du peuple, qui vit réellement un drame au quotidien», a critiqué le parti. Les taxes décriées Les articles relatifs aux diverses augmentations, notamment la hausse du taux de la TVA de 7% à 17% sur la vente de gasoil, sur le gaz naturel lorsque la consommation dépasse 2500 thermies/trimestre et sur l'électricité lorsque la consommation dépasse les 250 kilowatts-heure/trimestre sont également incriminés. Le PLF 2016 propose en effet de revoir à la hausse, entre autres les tarifs de la vignette automobile. Avec ces augmentations, les prix des carburants vont passer à 19 DA/litre pour le gasoil et à 25 DA/litre pour l'essence super. «Le gouvernement a pensé à des mesures pour libérer les prix, mais il a complètement ignoré le pouvoir d'achat des couches défavorisées», a déploré Ennahda, appelant à la mise en place d'un programme pour cibler cette catégorie sociale et lui accorder des subventions». Le parti critique aussi les articles relatifs aux exonérations d'impôts au profit du secteur privé, à l'image de la proposition de supprimer l'obligation de réinvestissement de la part des bénéfices dans le cadre des dispositifs de soutien à l'investissement. Selon quelques membres de la commission des finances, le PLF comporte au moins deux articles remettant en cause la règle des 51/49% régissant les investissements étrangers. De son côté, le député El Hani Bouchache a exprimé son inquiétude quant à l'application de l'article 53 qui autorise la cession des terrains appartenant à l'Etat. «Cette loi pose un réel problème. Il aurait été préférable que les pouvoirs publics se restreignent à la concession», a-t-il dit. Il en est de même pour l'article 54 qui permet la cession des biens des collectivités locales. À ce niveau, à en croire des députés, il y a carrément risque de bradage d'infrastructures et d'espaces publics desquels les communes tiraient des revenus substantiels.