La prochaine réunion de la tripartite prévue le 5 juin s'annonce déterminante. Le gouvernement devra obtenir le consentement des organisations patronales et de l'UGTA pour entériner des réformes repoussées jusque-là pour des considérations socio-politiques. C'est l'avis de nombreux experts et présidents d'associations patronales contactés hier au lendemain des déclarations faites par le Premier ministre. Abdelmalek Sellal a dévoilé, lors de l'inauguration de la 17e édition du Salon international du tourisme et des voyages (Sitev), l'ordre du jour de la prochaine réunion de la tripartite qui sera consacrée à l'examen du nouveau modèle économique (2016-2019). Très attendu notamment par les organisations patronales, ce nouveau plan devra accorder plus de marge de manœuvre aux opérateurs et focaliser sur le rôle des entreprises privées pouvant contribuer à la diversification économique souhaitée et défendue par les pouvoirs publics. Pour l'expert Abderrahmane Mebtoul, il n'y a pas de doute sur les intentions du gouvernement qui cherche désormais à dépasser cette crise pétrolière en envisageant toutes les solutions, même celles qui ne vont pas plaire aux organisations syndicales et aux défenseurs acharnés du secteur marchand public. En manque de ressources financières depuis la chute des revenus pétroliers il y a deux ans, l'Exécutif va devoir convaincre, selon cet économiste, les partenaires sociaux, notamment les membres de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA) sur la nécessité de passer à une autre étape dans la réforme du monde du travail et du système de la protection sociale. A l'heure où des grandes mutations sont intervenues à l'échelle mondiale, en matière de systèmes de retraite et de protection sociale, l'Algérie ne peut pas rester en marge d'autant plus que l'Etat continue à ce jour à supporter les charges sociales du monde économique (allocations familiales, déficit des Caisses de la sécurité sociale et celui de la Caisse de retraite). Le projet du code du travail sera certainement évoqué lors de cette tripartite au même titre que la politique de subvention et de transfert sociaux qui devra être désormais revue et ciblée, estime Mebtoul. Contrairement aux précédentes réunions, caractérisées par des décisions en faveur du monde du travail, à travers notamment le relèvement du SNMG et la signature des conventions de branche, cette fois-ci, il sera plutôt question des moyens à mettre en œuvre pour sauvegarder des emplois, des entreprises publiques moribondes et maintenir un système de protection sociale. «Des ajustements douloureux» «On devra s'attendre à des décisions. Je pense particulièrement aux avantages qui seront accordés aux investisseurs algériens et étrangers. Les questions de privatisation des entreprises publiques et d'ouverture de leurs capitaux seront certainement abordées dans le cadre de cette tripartite. La loi de finances 2016 a autorisé déjà l'ouverture des capitaux des entreprises publiques», soutient, de son côté, l'expert Abdelmalek Serraï, persuadé que la prochaine réunion de la tripartite devra lever toutes les contraintes se dressant devant les investisseurs. «Les axes du nouveau modèle économique seront dévoilés et avalisés par les partenaires sociaux. Le gouvernement devra opter pour des ajustements peut-être douloureux, mais nécessaires», a estimé Serraï, tout en soulignant que «la situation financière et économique du pays n'est pas tout à fait grave, mais plutôt préoccupante». Au niveau des organisations patronales, la réunion de la tripartite revêt un caractère «particulier». «Par patriotisme économique, nous devrions répondre aux attentes du gouvernement. L'Algérie a beaucoup donné aux hommes d'affaires. Il est de notre devoir de répondre présent aujourd'hui et d'écouter les préoccupations du gouvernement. Nous sommes solidaires. Je pense qu'il n'y a pas pire crise que celle que nous avions vécue durant les années 1990», a tenu à dire Abdelaziz M'henni, président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa), se considérant comme une partie prenante de la tripartite. Il est clair, pour M'henni, que l'heure est à «la mobilisation et au travail, car on ne peut pas toujours compter sur les revenus du pétrole. A quelque chose malheur est bon», a confié le président de la Cipa. La vice-présidente du FCE, Nacéra Haddad, s'exprimant sur les ondes de la Chaîne III, y voit la tribune de la tripartite comme «une opportunité de discuter des options économiques du gouvernement». D'ores et déjà, le gouvernement est attendu sur plusieurs dossiers aussi complexes que déterminants.