Quand le mot transhume, erre et batifole, quand les sublimes odes font une farandole, quand le verre luit de mille feux, alors la jonction des deux plaide pour notre identité. C'est ce qui ressort de la magnifique exposition du tandem Farah Laddi et Omar Khiter qui se tient jusqu'au 22 juin à la galerie Ezzouar'art à Alger. C'est dans une ambiance chaleureuse et conviviale sous les déclamations des bouqalate et des sons de la guitare et du saxophone qu'a eu lieu avant-hier, en soirée, le vernissage sous les applaudissements des convives. Leurs toiles plaident pour un travail tout en douceur et en subtilité des deux plasticiens. Leurs superbes compositions révèlent l'aquarelle dans tous ses états sous la férule de Omar et la peinture sous et sur verre qui brille intensément de Farah Laddi. Cette talentueuse artiste modèle le verre à souhait et à sa guise. Ses tableaux renvoient au patrimoine architectural qu'elle embellit, sublime pour transcender sa dégradation et déliquescence. Ses monuments qui rappellent notre mémoire collective, Farah les magnifie pour leur conservation et leur pérennité. Lors de cette manifestation, elle a mis en valeur la grande poste, Maqam echahid, Sidi Fredj, Fort de l'eau et bien d'autres monuments et lieux. Soucieuse de leur préservation et sauvegarde, elle les sublime à l'envi avec sa palette chaude et colorée. Par ses couleurs tantôt vives tantôt éthérées d'où émanent vigueur et intensité, elle fait vivre l'œuvre architecturale. Sa passion pour le patrimoine se reflète dans ses compositions chatoyantes. C'est son cheval de bataille. Elle en a fait son credo. Pour Omar khiter, ses toiles illustrent une soutenue et profonde recherche. «Pour faire un tableau, je lis beaucoup de poésies arabes dont celles de Nezzar el Qebbani, Mahmoud Darwich, Moufdi Zakaria, Abou Madhi et Ahmed Matar dont je m'inspire ainsi que de mes poèmes», dit-il. Dans chaque tableau, on remarque de superbes odes auxquelles il accole des symboles berbères . «J'écris ces vers avec de l'encre en écriture koufie à la laquelle j'associe les signes berbères pour montrer l'union», précise-t-il. Chacune de ses compositions recèle ces deux éléments, ce qui semble une particularité de Omar Khiter. Aquarelles à l'encre sur papier, huiles sur toiles, ses 21 tableaux sont d'une grande recherche. Chacun a une signification qui rappelle ces thématiques de prédilection notamment, l'identité, la revendication berbère, la liberté, l'éveil du monde arabe, la situation déplorable de nos sociétés arabe et l'histoire de nos origines. Un monde de paix Ce qui préoccupe Omar, c'est cette scission entre les communautés berbère et arabe perceptible et souvent d'une grande visibilité. A travers ses toiles, il a comme un souci d'éveiller les consciences et d'interpeller. De ses aquarelles minutieusement bien travaillées, se dégage une certaine nostalgie et désir pour l'union et l'embellie et l'éveil de nos sociétés qui ont sombré depuis le printemps arabe. Sa palette capte beaucoup plus les tons pastel avec une prédominance pour le beige conjugué au marron, ce qui donne au tableau une grande intensité. La juxtaposition de la calligraphie aux signes ‘'aouchem'' s'intègre parfaitement dans cet ensemble et crée une certaine harmonie. Le choix des chromatiques est idoine et le tableau semble raconter une histoire tantôt haute en faits et en gloire tantôt désolante. Les titres évocateurs comme Mouvement, Le symbole, Fusion et Les belles paroles évoquent le souhait de l'artiste de grandeur et d'éveil pour nos sociétés. Il déplore la situation actuelle et semble tourmenté par cet état de fait. Aussi dans ses compositions, il donne libre cours à son imaginaire. A l'évidence, ce duo d'artistes semble soucieux de dénoncer à travers leur art pictural ce qui les tourmente. Forts de leur imagination et de leur créativité féconde, ils réinventent un monde selon leurs envies et désirs, un monde harmonieux empreint d'amour et de paix.