C'est la grande interrogation de la semaine. Deux jours après l'Aïd El Adha, plusieurs centaines de familles ont été surprises de découvrir l'état infect dans lequel se trouvait la viande du mouton sacrifié la veille. Une couleur verte vive couvrait plusieurs parties de la carcasse. Les cas ont été recensés dans plusieurs wilayas du pays où des citoyens ont informé les services vétérinaires de ce phénomène. Des photos illustrant ces morceaux de viande ont vite fait le tour des réseaux sociaux, attirant l'attention des autorités concernées. Dimanche, les services vétérinaires du ministère de l'Agriculture ont ouvert une enquête, en collaboration avec la Gendarmerie nationale, pour connaître les causes de la putréfaction de cette viande. «Après avoir appelé les inspections vétérinaires de toutes les wilayas du pays pour avoir le feedback de la situation, nous avons ouvert une enquête en collaboration avec la police et la Gendarmerie nationale», précise Karim Boughalem, directeur des services vétérinaires du ministère de l'Agriculture. Ces derniers ont, dès lors, effectué des prélèvements au niveau du laboratoire central vétérinaire. D'autres échantillons ont été envoyés aux laboratoires de la Gendarmerie nationale pour leurs «performance». Contrairement aux wilayas d'Alger, Boumerdès, Chlef, Constantine et Blida, la dégradation précoce de la viande n'a pas été relevée dans d'autres wilayas, à l'instar de Jijel, Sétif ou encore Tébessa, selon le responsable du ministère de l'Agriculture. Ceci pour dire qu'il ne s'agit pas là «d'un phénomène national», constate Boughalem. En outre, ce même responsable rappelle, dans ce sillage, que 2000 vétérinaires avaient été mobilisés, durant l'Aïd El Adha, au niveau des abattoirs et dans des quartiers de certaines communes. A ce moment-là, «rien n'a été signalé. Ce qui nous fait dire qu'on peut écarter l'existence d'une maladie animale», affirme-t-il, et d'ajouter qu'il est probable que les conditions climatiques ayant caractérisé les deux jours de l'Aïd, à savoir la chaleur et un taux d'humidité assez élevé, ainsi que des conditions d'hygiène inappropriées dans certains endroits, pourraient être une cause de la putréfaction de la viande. Cependant, il n'écarte pas d'autres éventualités. «Un grand point d'interrogation» Du côté des spécialistes, c'est l'incompréhension. L'inspecteur des laboratoires, Dr Saïda Akali, reconnaît un fait «inédit» dans l'histoire de la viande ovine en Algérie. «J'ai eu personnellement pendant de longues années à contrôler la viande ovine et je n'ai jamais eu à faire à ce type d'anomalie», affirme-t-elle. Selon notre interlocutrice, plusieurs causes peuvent être liées à la putréfaction de la viande. Il s'agit, entre autres, de la température de conservation de la viande, de la manipulation du produit… Ce qui est sûr par contre, pour Dr Akali, c'est que la digestion bactérienne présente sur la viande – ce qui lui donne la couleur verte – a été observée une fois la viande coupée, congelée. Puis décongelée. Ce qui explique que les vétérinaires n'ont rien pu constater avant et après l'abattage. Cependant, selon notre interlocutrice, aucune piste n'est à écarter ou à négliger, «il fallait réellement tirer la sonnette d'alarme pour éviter toute mauvaise éventualité». Pour la spécialiste, que le fait soit lié à une cause grave ou insignifiante «avec cette enquête nous serons plus sûrs». Pour l'heure, «c'est le point d'interrogation», affirme le Dr Akali. Le ministère promet qu'une fois les résultats des analyses des laboratoires de la Gendarmerie nationale connus, ils seront rendus publics. Nous saurons, à ce moment, ce que nous avons mangé à l'Aïd !