A pratiquement un mois de l'Aïd, s'achemine-t-on vers une fête sans mouton ? Pour nombre de vétérinaires, dans la wilaya de Tiaret, le risque de devoir sacrifier le rite d'Abraham est plus que jamais présent, au vu de l'épidémie de la fièvre aphteuse qui touche plusieurs régions du pays. En cause, d'abord la fermeture des marchés à bestiaux et le renchérissement rédhibitoire des prix des viandes rouges, depuis des semaines déjà. La fièvre aphteuse qui a causé d'importants dégâts au cheptel bovin, dans plus d'une vingtaine de wilayas, risque bien, selon des connaisseurs des arcanes du monde agricole, de se propager au cheptel ovin, caprin et même camelin. Selon un vétérinaire à l'Inspection de wilaya, la propagation de la maladie de la fièvre aphteuse, à l'ovin, n'est pas, totalement, écartée, surtout « à cause de la proximité des bergeries avec les étables», explique-t-il. Sur le plan, purement, vétérinaire, les symptômes de la fièvre aphteuse, une maladie virale très contagieuse, sont plus difficiles à détecter chez les ovins et les caprins. Pour ce vétérinaire, installé à son compte, la possibilité d'éradiquer, totalement la maladie, d'ici fin septembre est « peu probable, surtout si les marchés à bestiaux seront rouverts » estime-t-il. En dépit des assurances du ministère de l'Agriculture, l'épidémie de la fièvre aphteuse progresse, en Algérie: 23 wilayas sur 48 sont, actuellement, touchées selon le ministère de l'Agriculture. Suffisant pour susciter l'inquiétude du syndicat des vétérinaires fonctionnaires, qui accuse les pouvoirs publics de graves négligences. Karim Boughalem, directeur des Services vétérinaires, au ministère de l'Agriculture, a confirmé, la semaine dernière, lors d'une conférence de presse, que l'épidémie de la fièvre aphteuse a progressé, depuis le 1er cas enregistré, le 27 juillet dernier. Globalement et jusqu'à hier, 192 foyers contaminés ont été enregistrés sur un total national de 200.000 exploitations, 964 vaches et taurillons infectés ont été abattus. L'Algérie compterait un cheptel bovin, notamment des vaches laitières, estimé à 2 millions de têtes. L'inquiétude des éleveurs est entière. Pour rappel, le premier foyer a été enregistré dans la wilaya de Sétif, le 27 juillet dernier, à la suite de l'importation frauduleuse, selon des vétérinaires, de bovins contaminés à partir de la Tunisie. Saïda Akali, secrétaire générale du Syndicat national des vétérinaires fonctionnaires, pointe du doigt les « graves défaillances» qui, selon elle, ont permis à la maladie de se propager. « Les pouvoirs publics auraient pu nous éviter cette catastrophe s'ils avaient pris plus de précaution lorsque des foyers de cette maladie ont été signalés en Tunisie », a-t-elle expliqué. Et d'ajouter que « le ministère était en état d'alerte et avait même lancé une campagne de vaccination » au mois de mai dernier mais qu'il a « levé l'instruction, en juin dernier, ce qu'il n'aurait pas dû faire ». Pour un responsable à la direction des Services agricoles de la wilaya de Tiaret, la fermeture des marchés à bestiaux, dictée par l'obligation d'éviter tout déplacement des animaux, en cette période de crise, risque bien de perturber le rituel du sacrifice, même si la décision reviendra aux autorités publiques de les rouvrir ou pas, avant l'Aïd. Pour l'heure, des mesures prophylactiques doivent être prises comme la vaccination de l'ensemble des bêtes saines et à la désinfection des étables de manière permanente, afin d'éviter, au maximum, les déplacements, à la fois des bêtes et des éleveurs.