On ne connaît par leur nombre exact, mais ils sont nombreux ces villages de Kabylie, disséminés à travers quasiment toutes les communes de la wilaya de Tizi Ouzou, à souffrir en silence. Ces villages sont abandonnés à leur triste sort et sont oubliés par tous. Le village Beggas, situé à une dizaine de kilomètres du chef-lieu de la commune de Tizi Ghennif, au sud de la wilaya de Tizi Ouzou, illustre bien cette triste réalité. Beggas est constitué de plusieurs hameaux perchés sur les hauteurs de la ville de Tizi Ghennif, à la lisière d'une dense forêt sur les limites territoriales avec la wilaya de Bouira. Ce grand village, vu sa situation géographique, a subi, depuis l'avènement du terrorisme en Algérie, toutes les conséquences tragiques de ce phénomène qui a semé la peur, la mort et la désolation. La route sinueuse reliant le chef-lieu de la municipalité de Tizi Ghennif à ce village demeure sans revêtement depuis une vingtaine d'années et le résultat : on y constate des cratères, des affaissements et des tas de nids-de-poule. Pour les automobilistes, se rendre à ce village s'avère un vrai parcours du combattant. Auparavant considéré comme un havre de paix et un lieu de prédilection et de distraction, plusieurs automobilistes préféraient emprunter cette route menant à ce village pour rejoindre la ville de Kadiria, située sur l'axe de la RN 5, reliant respectivement les deux villes à Alger et les villes de l'est du pays. Mais actuellement, cette route est fermée à la circulation pour des raisons sécuritaires, ce qui a contribué à accentuer l'isolement de ce village. Depuis plusieurs années, les citoyens de Beggas vivent dans un total oubli. Ils sont tout simplement ignorés des autorités locales. «Aucun projet n'a été concrétisé dans notre village depuis très longtemps. Cette route n'a pas été bitumée depuis les années 1980, et aujourd'hui on attend toujours à ce que les travaux de sa rénovation soient lancés», nous dira un villageois. La route desservant le hameau Aït Zakrit, le plus dense du village, est une piste ouverte, il y a juste quelques années. Ce hameau, situé en contrebas de Beggas, attend toujours son désenclavement. Les habitants y mènent une vie rude, surtout en hiver où le transport fait défaut. Les écoliers sont obligés de sécher leur cours de 8h, avons-nous appris. Le résultat de cette situation est l'exode rural, phénomène qui a pris des proportions alarmantes dans ce village «oublié». Plusieurs familles ont préféré le quitter, en laissant leurs terres, pour s'installer ailleurs dans les villes comme Tizi Ghennif ou Draâ El Mizan. Le programme d'aide à l'habitat rural doit être renforcé dans ce village où nous avons été informés sur les carences dans la formule de l'octroi de cette aide. Il faut dire que cette situation amère pèse lourdement sur le vécu quotidien de la population.