Le président de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur (Paca), Christian Estrosi avait dans une correspondance officielle saisi le Premier ministre de son pays, Bernard Cazeneuve, pour que ce dernier intervienne à son tour auprès des autorités algériennes pour accorder plus de largesses aux pommes des Alpes, dont les exploitants seraient au bord de la faillite. Une missive qui serait passée inaperçue si cet ancien maire de Nice et membre du parti Les Républicains, connu pour ses positions anti-algériennes n'avait pas utilisé une formule à la limite de faire de l'Algérie un comptoir de la marchandise française. «Il est absolument indispensable qu'un quota de 20.000 tonnes de pommes des Alpes au minimum, soit 15 millions de chiffre d'affaires, soit instauré dès dimanche par les autorités algériennes pour permettre la survie des exploitations alpines qui connaissent des problèmes de trésorerie très importants», avait écrit le président de la région Paca. En réaction à cette déclaration sulfureuse, le président de l'Association des Exportateurs algériens (Anexal), Ali Bey Nasri, a estimé qu'il ne s'agit que d'un coup de pub qu'Estrosi «qu'on connaît bien» veut se faire en s'érigeant «défenseur des arboriculteurs de sa région en cette période de campagne électorale pour les élections présidentielles en France». Par le passé, Estrosi avait exprimé des positions nostalgiques qui font référence à l'Algérie française. En étant maire de Nice, il avait introduit un arrêté municipal interdisant «l'utilisation ostentatoire» de drapeaux étrangers. L'objectif étant alors de ne pas voir flotter le drapeau algérien sous le ciel de sa ville à l'occasion du match Algérie-Allemagne comptant pour la Coupe du Monde de 2014 qui se déroulait au Brésil. En analysant les propos d'Estrosi, le président d'Anexal explique que même si le gouvernement algérien dispose des prérogatives de limiter des quotas sur l'importation d'un produit donné, il ne peut en aucun cas imposer à des importateurs d'importer de tel ou tel pays. «En réalité, il s'agit d'un contrat commercial qui ne peut être régi par des orientations politiques», a-t-il ajouté. Panique outre-Méditerranée ! Ceci dit, révèle notre interlocuteur, certains importateurs algériens ne cessent de répéter à des producteurs de la région Paca que le gouvernement algérien leur impose des freins avec l'introduction de la politique des quotas. Des «plaintes» qui sont parvenues jusqu'au président de la région qui, à son tour, veut faire pression sur son gouvernement dans l'espoir d'arracher des faveurs pour les agriculteurs des Alpes et ce, à des fins électoralistes, d'autant plus que 40% de la production des pommes de la région Paca sont exportées vers l'Algérie. L'autre élément mis en avant par Bey Nasri est que les Français ne peuvent en aucun cas faire pression sur l'Algérie, dans la mesure où déjà l'accord d'association entre l'Algérie et l'UE est en faveur de cette dernière. Avec l'embargo imposé à la Russie, les producteurs français et européens se trouvent dans de grandes difficultés pour écouler leurs marchandises et une politique des quotas de la part de l'Algérie ne fera qu'aggraver leur cas. «Plus aucun producteur de pommes des Alpes n'exporte sa production. C'est pourtant un marché (l'Algérie, Ndlr) stratégique qui représente plus de 40% des ventes de pommes des Alpes», écrit encore Estrosi, pressant le Premier ministre français d'intervenir auprès de son homologue algérien en «urgence, sinon nos producteurs mettront tous la clé sous la porte». Intervenant sur son compte twitter, l'économiste algérien Lies Kerrar qualifie de «correcte et de bonne guerre» la «préoccupation sympathique» d'Estrosi. «Il défend les intérêts de ses électeurs. C'est à nous de défendre les nôtres», a-t-il ajouté en disant que «le gouvernement algérien est censé, lui, se préoccuper des agriculteurs algériens». Et à Kerrar de conclure sur une note succulente en appelant les Algériens à «manger simplement des pommes algériennes. Elles ont bon goût et sont moins chères». La semaine dernière, des sources médiatiques annonçaient une réunion interministérielle pour déterminer les quotas d'importation et la liste des produits soumis aux licences d'importation, qui devait fixer les quotas de plusieurs produits soumis aux licences d'importation comme les véhicules, le ciment, le rond à béton, la faïence ou encore les fruits. Une annonce qui a créé une panique outre-Méditerranée.