Honaïne a vu toutes ses plages détournées de leur vocation touristique initiale. Celle qui accueillait des milliers d'estivants chaque année a vu tous ses merveilleux sites de balnéothérapie transformés en ports de pêche. Ainsi, la plage de la ville ou l'ancien port du royaume massaesyle du roi Syphax, dont Siga était la capitale, a été fermée définitivement à la baignade après la réception du port de pêche, réalisé sur la totalité de la splendide baie de Honaïne. La population locale et les estivants des autres régions se sont vus privés de l'un des plus beaux sites balnéaires de la wilaya de Tlemcen de par son emplacement, la dense forêt qui le surplombe et les vestiges historiques qui l'entourent. C'est ce qui fait la particularité du littoral de cette ville millénaire qui abrita le premier port d'Afrique à travers lequel transitaient l'or et les marchandises vers l'Europe. Aujourd'hui, le nouveau port est l'ombre de lui-même et les objectifs escomptés ne sont pas au rendez-vous. On a juste détruit un magnifique site touristique par une action volontariste irréfléchie. La merveilleuse plage de Tafsout n'a pas échappé aussi à ce massacre. Située à l'entrée est de la ville de Honaïne, cette plage au sable très fin et implantée dans un environnement très boisé, a presque disparu au profit des installations de pompage d'eau de mer et de rejet de la station de dessalement d'eau de mer. C'est un projet du siècle pour toute la région mais il existait plusieurs variantes pour ses initiateurs, afin de préserver ce site très fréquenté par des milliers de familles. Il était, surtout, un lieu de prédilection pour les colonies de vacances pour les enfants, et plusieurs entreprises nationales disposaient de leurs propres camps. Malgré l'aménagement d'une petite plage artificielle, cette plage n'attire plus les nostalgiques des lieux. L'acharnement sur les sites paradisiaques de la daïra de Honaïne ne s'est pas arrêté là. Celle qui s'enorgueillissait, dans un passé récent, par sa chaîne de montagnes des Traras, les célèbres monts de Tajra qui culminent à plus de 1 000 mètres d'altitude, et ses plages vierges et naturelles, a vu sa dernière plage d'Agla transformée en ferme aquacole. Située en contrebas de la chaîne montagneuse des Traras, on s'y rend par une route sinueuse à partir d'un magnifique plateau à partir duquel s'offrait aux visiteurs une vue imprenable sur tout le littoral. Pour le touriste, c'est le chemin de toutes les tentations . Des enfants proposent le long de la route toutes sortes de produits du terroir et des fruits de saison. Figues, pains traditionnels, huile d'olive, beignets, miel, melon et pastèque drainent des centaines d'estivants, car à Agla, il n'y a point de commerces. Agla est avant tout une petite crique de pécheurs et de campeurs. Elle est très riche en poissons et y séjournent dans ses mystérieuses grottes des dizaines de pêcheurs. Sa plage rocailleuse n'attire pas beaucoup d'estivants qui préfèrent s'installer à la plage d'Al Wardania. Sauf que cette dernière a été rattachée à la daïra d'Oulhaça relevant de la wilaya d'Aïn Temouchent. C'est de cette façon que le tourisme a été cassé dans cette région millénaire, et la population privée d'une ressource fort appréciable, car la daïra de Honaïne ne dispose d'aucun tissu industriel. Au royaume de Syphax La population ne vit que d'une agriculture vivrière et à un degré moindre de la pêche. Honaïne pouvait, pourtant, devenir un véritable pôle touristique et balnéaire. Son histoire millénaire est riche en événements. Située entre les villes de Ghazaouet et Béni-Saf, Honaïne, grâce à son port et sa position stratégique, participa à toutes les phases historiques qui marquèrent le Maghreb central. Syphax en a fait son royaume et édifia sa capitale, Siga, qui n'est qu'à une vingtaine de kilomètres des rives de la Tafna. Elle est devenue par la suite ville escale durant la période romaine. Dès cette époque, elle était réputée pour la richesse de son minerai de cuivre dont l'exploitation a continué durant le Moyen Age. Avec la conquête espagnole, Honaïne connut un nouvel essor. Plus tard, la ville et son arrière-pays deviennent le débouché naturel des caravanes qui amènent l'or de l'Afrique, via Tamentit à Adrar, et connaissent une prospérité sans précèdent. C'est à partir du port de Honaïne que les marchandises, particulièrement l'or, étaient acheminées vers l'Europe, et c'est dans cette région que Tarek Ibn Ziad a fait escale avant sa traversée pour la conquête de l'Andalousie. Il s'y est séjourné et a renforcé ses troupes par des guerriers des tribus Oulhassa. L'avènement de la dynastie almoravide a permis à la ville de se doter de remparts et d'une mosquée, et au XIIe siècle, la ville change de statut avec l'arrivée des Almohades, dynastie fondée par Abdelmoumen Ibn Ali, originaire de la région, plus exactement à Tajra, une colline surplombant Honaïne. C'est ce dernier qui réussit à unifier l'ensemble de l'Afrique du Nord et permit au port de Honaïne de prendre une dimension méditerranéenne très importante, et une position hautement stratégique. Honaïne, fut appelée par les romains Gypsaria et Artisiga et les Espagnols la nommaient Hone. Les vestiges berbères, datant de la période almohade, sont encore présents dans la cité tout comme les remparts qui témoignent encore de la puissance de la dynastie des Almohades. En 1162, Honaïne et Oran s'associèrent pour construire les cent vaisseaux commandés par Abdelmoumen Ibn Ali. Honaïne abrita le port des Ifrenides, lequel deviendra le port le plus important des Almohades en Afrique du Nord, et qui sera par la suite l'un des deux ports des Zianides de Tlemcen. Le port sera partiellement détruit en 1534 après une brève occupation espagnole. Enfin, la ville a vu débarquer un nombre important de réfugiés morisques qui avaient fui la Reconquista. Aujourd'hui, il ne reste plus rien de ce port, sauf quelques ruines situées sur la montagne qui le surplombe.