La récente décision prise par le ministère des Transports, concernant la délocalisation de toutes les activités du port d'Alger vers celui de Mostaganem, n'a pas été appréciée par les opérateurs. Cette mesure a soulevé la grogne et la colère de tous les opérateurs et importateurs concernés. Ces derniers ont déploré le mutisme des pouvoirs publics «qui ne communiquent pas assez avec les intervenants directs, même quant il s'agit de décisions importantes». C'est le fait accompli Ils affirment n'avoir pas été informés de cette mesure et surtout qu'ils n'ont pas été associés à la prise de cette décision importante. «Aucune note officielle ne nous a été communiquée pour nous informer de cette nouvelle mesure et les délais arrêtés. Nous avons été informés par le biais de la presse et aussi des armateurs de cette délocalisation, mais de façon tout à fait informelle», nous disent des importateurs. Cette mesure concerne, selon les informations recueillies, toutes les marchandises non containerisées, notamment les véhicules et le rond à béton. Les importateurs de ces produits sont appelés à faire sortir les marchandises, selon cette nouvelle note, à partir du port de Mostaganem, au lieu de celui d'Alger, ce qui va créer, selon eux, une véritable anarchie. Les importateurs ne comprennent pas les motifs ayant poussé le ministère des Transports à prendre cette mesure qui vise, selon cette note, «à désengorger le port d'Alger». «Cette note, qui ne concerne pas les véritables activités qui encombrent le port, passe tout à fait à côté», commente un importateur. Les concessionnaires automobiles, par exemple, ne sont pas autorisés à stocker leurs marchandises au niveau des quais. Ils sont tenus, selon la réglementation en vigueur, d'évacuer tous les véhicules, dont le nombre atteint souvent les 6000, pendant la nuit entre 20h et 6h. «Ils nous arrive même de dédouaner la marchandise pendant que le navire est en rade pour éviter les encombrements au port d'Alger. Quand on arrive à dédouaner toutes les marchandises, les véhicules vont directement chez les concessionnaires, sinon nous avons des zones sous douane qui accueillent les véhicules et nous mobilisons des agents pour les opérations de dédouanement au fur et à mesure et à l'intérieur même de nos zones», nous ont expliqué des importateurs de véhicules. «Les concessionnaires peuvent garder un véhicule une année s'il veulent au niveau de la zone. C'est d'ailleurs le cas pour les véhicules importés pour les moudjahidine et les bénéficiaires des dispositifs d'emploi. On garde la voiture jusqu'à ce que les procédures d'exonération et autres soient finalisées», nous ont-ils affirmé. «Les véhicules que vous trouvez au port sont ceux importés à titre individuel ou ceux des institutions étatiques», ont-ils précisé. Au niveau d'Alger seulement, les concessionnaires automobiles disposent de 100 ha en zone libre pour stocker leurs véhicules, soit dix fois plus que la superficie totale du port d'Alger. Les problèmes s'accumulent L'application de la décision de délocalisation du port pose de sérieuses contraintes aux importateurs. Outre le problème de dédouanement, dont la solution n'est certainement pas facile à trouver dans la mesure où cela doit se faire sur place au niveau du port-même, ces importateurs sont tenus de délocaliser toutes leurs activités au niveau de la wilaya de Mostaganem. «Il y a toute notre logistique et pas moins de 30% de notre personnel qu'il faut délocaliser également, ce qui n'est pas facile.» Certains opérateurs estiment que la délocalisation est carrément impossible en ce moment. Ils posent le problème des contrats et des engagements qu'ils ont déjà conclus avec des partenaires étrangers et même avec des institutions nationales qu'ils doivent absolument respecter. «En plus du problème de la domiciliation bancaire, facteur fondamental de l'opération de dédouanement, il y a lieu de respecter les échéances et les conditions contenues pour l'ouverture de la lettre de crédit. Il y a des contrats que nous avons signés en mai et en avril que nous devons satisfaire au niveau du port d'Alger, comme cela a été mentionné dans le contrat. N'oublions pas que les échéances sont arrêtées à l'avance et nous sommes tenus de respecter les clauses. Il n'est pas question de revenir sur ces décisions et surtout de changer de port de destination», nous expliquent d'autres. Les importateurs affirment qu'ils n'ont toujours pas été saisis par la direction du port d'Alger sur cette mesure alors qu'ils sont tenus de tout changer dans un délai de six mois. «Nous avons été saisis il y a quelques mois pour transporter les véhicules dans de petits navires au lieu des grands bateaux. Cela a coïncidé avec l'arrivée de Dubai Ports World et aussi avec l'approche de la saison estivale, pour faciliter l'accueil des estivants et la circulation des car-ferries. Nous n'avons même pas entamé les procédures pour se conformer à cette nouvelle donnée que voilà une autre note arrive et bouscule tout le programme», nous disent les importateurs. «C'est une note qui ne règle ni le problème du port, ni celui des concessionnaires, encore moins celui du consommateur.» La question du choix des segments d'activité revient avec acuité. «Les importateurs de véhicules ne sont pas la source de l'encombrement du port. Bien au contraire, ce sont les containers des autres marchandises stockés qui posent problème. Il y a lieu de faire une comparaison toute simple en répondant à deux questions essentielles, à savoir quel est le nombre de bateaux qui accostent au port d'Alger pour livrer des véhicules ? Combien de temps mettent-ils ? Une petite comparaison avec les autres activités donnera des éléments de réponse qui confirment que les importateurs de véhicules ne sont pas aussi pénalisants», expliqueront des opérateurs. Créer une zone sous douane nécessite au minimum 6 mois Beaucoup d'autres interrogations sont soulevées par les importateurs. «On ne sait plus quoi faire et comment se comporter face à la mise en exécution de cette décision.» «Au cas où le navire est orienté vers un autre port, on n'a pas le droit de sortir les véhicules. Nous n'avons pas où les mettre. Nous n'avons rien préparé encore», diront les importateurs. La situation s'avère critique. «Pour avoir une autre zone sous douane il nous faut au minimum 6 mois pour trouver le terrain et finaliser les procédures administratives nécessaires pour déposer le dossier d'agrément de cet espace. Et puis comment va se faire le dédouanement et comment procéder avec les banques ? Si les choses continuent comme ça sans qu'elles ne soient clarifiées, cela suppose que nous allons revenir à Alger pour faire tout ça, ce qui engendrera de nouveaux désagréments sur la route notamment.» Les importateurs diront qu'ils ne sont pas contre les mesures prises par le gouvernement mais insistent à ce qu'ils soient informés dans les délais pour qu'ils se préparent. «Il faut que le gouvernement tienne compte de la spécificité de nos activité et de celles des marchandises aussi. Car il y des engagements, des délais et des prix fermes que des clients ne sont pas près de réviser. Il faut nous donner le temps pour nous adapter à ces nouvelles mesures», a-t-il conclu.