Le Maroc et le Front Polisario ont accepté, comme prévu mardi à Vienne, après deux jours de discussions informelles sous la médiation de l'ONU, de reprendre les négociations directes sur la recherche d'une solution au conflit du Sahara occidental. Ces négociations avaient été interrompues, après quatre infructueux rounds entre les deux parties en conflit, lorsque l'ex-médiateur des Nations unies, Peter van Walsum, avait manifestement pris position pour le plan d'autonomie marocain sur «orientation» de Paris et Madrid, dont les gouvernements actuels sont de chauds partisans de Rabat. Le remplacement du diplomate hollandais par Christopher Ross, un diplomate américain de carrière, avait été salué explicitement par le Front Polisario et du bout des lèvres par Rabat, faisant ainsi contre mauvaise fortune bon cœur. Après dix-huit mois, les contacts ont pu être rétablis par M. Ross, qui a dû effectuer deux périples dans la région où il n'avait pas été reçu par le roi Mohammed VI, ce qui a été interprété par les observateurs comme une absence de confiance manifeste de Rabat au diplomate américain. A la différence de son prédécesseur européen, et tout comme son compatriote James Baker qui l'avait précédé à ces fonctions, Christopher Ross avait dès le début de son premier périple indiqué que toute solution au conflit du Sahara occidental devrait tenir compte du droit à l'autodétermination du peuple sahraoui. Le roi du Maroc a parfaitement compris le message : le diplomate américain ne roule pas pour la France ou l'Espagne de Zapatero. Bien entendu, le royaume chérifien n'entend heurter de front ni le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, pour avoir fixé son choix sur un médiateur hors de la sphère d'influence européen. Il n'entend pas davantage heurter la nouvelle Administration américaine, qui a exprimé une position de respect de la légalité internationale sur le conflit du Sahara conforme. «La voie de l'impasse» Acculé à la défensive diplomatique, le Maroc a opté, une fois de plus mardi à Vienne, pour la voie de l'obstruction. Celle de l'impasse. Devant la presse, qui a fini par être informée du lieu tenu secret des négociations, un hôtel de Dürnstein, en Autriche, la délégation marocaine a certes confirmé son «engagement à reprendre les négociations» avec le Front Polisario «le plus tôt possible», comme le rapporte le communiqué de Christopher Ross. Rares sont cependant les journalistes qui assimilent cet engagement à une sincère volonté politique des Marocains d'aller vers la recherche d'une solution qui respecte le droit à l'autodétermination du peuple sahraoui. Le chef de la délégation marocaine à Vienne, le ministre des Affaires étrangères, Fassi Fihri, a fait des déclarations qui ne laissent planer aucun doute sur les intentions de Rabat : le plan d'autonomie marocain constitue l'unique base de travail des futures négociations. Mardi à Vienne, le chef de la diplomatie a également estimé «inapplicable» un référendum dans l'ancienne colonie espagnole. M. Fihri ne nommera à aucun moment le Front Polisario mais ne se hasardera pas, cette fois comme à Manhasset, de citer l'Algérie comme partie à ce conflit, laissant cette tâche à une presse marocaine aux ordres. Que fera le Conseil de sécurité ? Le préalable marocain met le médiateur américain devant l'obligation de suggérer au Conseil de sécurité d'imposer une solution conforme à ses recommandations.Que fera le Conseil de sécurité si, comme c'est prévisible, le Maroc tente de gagner du temps, jusque à ce que se crée une conjoncture politique internationale plus favorable à ses thèses sur le Sahara. Il est encore trop tôt pour le savoir mais le scénario marocain monté en coordination avec le gouvernement socialiste espagnol et Paris fera sans doute surface lors du cinquième round des négociations dont rien ne permet de conclure, en l'état actuel des choses, qu'il ouvrirait la voie à une solution conforme aux aspirations du peuple sahraoui et à la volonté de la communauté internationale. Il faut noter cependant que l'Administration Obama ne semble pas disposée à faire le jeu des Européens ou à s'aligner sur la position Bush dans ce conflit, autrement plus inclinés dans le sens des intérêts de Rabat.