Les parcs des administrations et des entreprises publiques ne peuvent plus contenir les carcasses de voitures appartenant au secteur étatique, parfois des véhicules récents qui ne sont plus utilisables pour avoir été endommagés dans des accidents de la circulation causés par une personne étrangère à ce secteur, et ce, depuis que l'immatriculation est banalisée. Les parcs des administrations et des entreprises publiques ne peuvent plus contenir les carcasses de voitures appartenant au secteur étatique, parfois des véhicules récents qui ne sont plus utilisables pour avoir été endommagés dans des accidents de la circulation causés par une personne étrangère à ce secteur, et ce, depuis que l'immatriculation est banalisée. Ainsi, avant la décennie sanglante, les véhicules dits de service étaient vite repérables par les services de la sécurité routière qui contrôlaient l'ordre de mission sur lequel le nom du chauffeur, la destination, la date et la durée de la mission et les noms et la qualité des personnes transportées y figuraient. Le véhicule avait une destination bien précise et l'on pouvait contrôler le kilométrage et la consommation de carburant. «Il fait don d'un bien de l'Etat» De nos jours, c'est l'anarchie, les chefs de parc n'ont aucun contrôle sur les véhicules et encore moins sur les chauffeurs, comme ils n'ont aucune responsabilité sur le véhicule du directeur que conduit souvent son fils pour ses courses personnelles ou juste pour frimer avec ses copains. En effet, dans une station d'essence, après avoir fait le plein d'une Corolla immatriculée 00, un jeune encore imberbe tend deux bons d'essence au pompiste. Ce dernier vérifie le cachet sur le verso des bons et s'apprête à rembourser la différence au jeune, qui lance : «Tu peux la garder, Allah yesmah.» Le pompiste, un vieux proche de la retraite, fait cette remarque : «Yetbaraâ b'rezq eddoula (il fait don d'un bien de l'Etat).» «Ils sont nombreux à s'approvisionner en carburant sans qu'ils soient employés dans tel ou tel secteur», ajoute ce pompiste. En ville, d'autres jeunes attendent le retour de leurs parents du boulot, des responsables dotés de véhicules de service, pour s'offrir une sortie avec les copains du quartier. «Je préfère la clim de la Passat à celle du domicile», dit le fils d'un directeur de banque. On remarquera de nombreux véhicules de l'Etat, notamment des 4x4, dans les cortèges, les sites balnéaires et les grandes rues des villes. «Pour assister aux noces de sa nièce, un responsable a avalé plus de 600 kilomètres en utilisant le véhicule de la direction bien sûr», signale un agent de sécurité. Fonctionnaires ou élus Certains responsables, bien que disposant de leur voiture personnelle, utilisent les véhicules de service pour leurs vacances. «A son départ, le directeur a pris deux carnets d'essence», avoue un agent des moyens généraux d'une direction de l'exécutif, en soulignant que certains chauffeurs n'hésitent pas à utiliser ces biens de l'Etat après les heures de service et durant les week-ends sous prétexte qu'ils assurent le transport du personnel durant les jours ouvrables. Les élus ont le même comportement du fait qu'il n'y a aucune autorité pour les contrôler. A quoi servent les chauffeurs si ce n'est pour faire les courses pour la famille du responsable ou laver, vidanger et nettoyer véhicule ? Tout le monde semble ignorer les graves conséquences qui résultent en cas d'accident. D'ailleurs, les rapports d'accident ne sont pas établis selon les procédures légales. Cette procédure, qui exige qu'en cas d'accident, ne serait-ce matériel, les services de la police, quand c'est dans l'urbain, et les gendarmes, quand c'est en extra-muros, doivent établir un rapport à joindre au constat d'accident délivré par les assurances. «Le fils d'un directeur a esquinté une Nissan toute neuve et c'est mon nom qui figure sur le constat d'accident», déclare un chauffeur. Gabegie Au niveau de ces mêmes parcs, on constatera que pour une panne toute banale, pare-brise cassé, plaquettes de frein usées, pneus éclatés..., le véhicule reste immobilisé durant des mois, exposé aux intempéries et au pillage, sous prétexte que le chapitre pièces de rechange n'est pas alimenté. Pour éviter cette gabegie, l'Etat devrait appliquer les méthodes anciennes, en faisant distinguer les véhicules de service des véhicules personnels. Quant à l'utilisation abusive des bons de carburant, la participation des gérants des stations d'essence est plus que nécessaire. Ce sont là des points qui ne figureront jamais dans les dispositions d'une loi de finances, mais qui n'en restent pas moins des indices importants d'une bonne gestion des deniers et du patrimoine publics.