Comme elle est venue au monde et comme elle a vécu le long de sa vie, elle est morte en souffrant loin des siens et de celles qui ont souffert comme elle. Décédée le 23 septembre 1981 à Paris, Hnifa n'avait que sa voix et son art pour se plaindre et raconter les souffrances qui l'ont touchée tout au long de sa vie à cause de son statut de femme. Née dans le petit village d' Ighil Mehni à Azzefoun, cette localité au bord de mer qui a donné tant d'artistes et d'hommes de culture tels que Tahar Djaout et Iguerbouchen, Ighil Larbaa Zoubida alias Hnifa n'allait pas tarder à connaître la dominance masculine. Arrivée en compagnie de ses parents venus à Alger en quête d'une meilleure vie, elle se fait d' abord connaître dans les fêtes de mariage par sa belle voix avant d'être obligée de se marier avec un homme suite à une décision de ses parents. De mauvaises surprises l'attendent Ce premier mariage forcé ne devait se terminer que par un divorce. Revenue chez ses parents, l'adolescente pour mieux vivre sa séparation ne savait pas que d'autres drames allaient encore lui changer la vie puisqu'elle sera choquée par le décès accidentel de son frère puis par le divorce de sa mère. Elle est alors obligée de ne compter que sur elle-même pour subvenir à ses besoins. Elle passera par de petits emplois avant de mettre à profit ses dons de chanteuse. Elle s'approchera petit à petit du milieu artistique avant sa rencontre au début des années 1950 avec Lla Yamina qui la présente à Madame Lafarge qui dirigeait la chorale kabyle dont faisait partie la grande chanteuse Cherifa. Zoubida qui prendra le pseudonyme de Hnifa fera partie de cette chorale jusqu' en 1957 avant de décider de s'envoler de ses propres ailes. Sous la houlette de cheikh Noureddine qui dirigeait l'orchestre de la station radio kabyle, elle chantera sa vie et ses souffrances et le succès ne tardera pas à arriver. L'exil en France Comme beaucoup d'autres artistes, elle partira vers la France et se retrouvera à nouveau à déambuler seule dans la ville de Paris mais là aussi, elle compte sur sa voix pour se nourrir. Elle chantera le soir dans les cafés avant qu'elle ne rencontre le compositeur, auteur et chanteur Kamel Hammadi qu'elle avait déjà connu à Alger. Ce monsieur de la chanson lui écrira des textes à sa juste mesure et lui composera des chansons à succès. D'ailleurs elle enregistrera avec lui en duo Yid Em Yid Em qui deviendra un classique de la chanson kabyle. Hnifa reviendra en Algérie après l'Indépendance mais repartira définitivement en 1973. Elle ne réapparaîtra que rarement sur scène. Elle décédera le 13 septembre 1981 après une longue maladie. Un documentaire retraçant la vie de cette grande artiste a obtenu l'Olivier d'or au festival du film amazigh à Sétif en 2008. Pour rendre hommage à cette grande dame de la chanson algérienne, la Télévision algérienne devrait au minimum programmer le documentaire qui lui a été consacré. On devrait également baptiser une salle de spectacle au nom de cette chanteuse qui a beaucoup donné à la chanson algérienne sans jamais recevoir une contrepartie.