Le mot menace est porteur de gros ennuis. D'ailleurs, on ne peut pas poursuivre quelqu'un sur la seule base de simples déclarations, ce qui serait trop facile. Ce jeune du Champ de Manœuvre a eu le béguin pour une assez belle voisine dont la maman s'était juré de ne donner sa main qu'à un gros richard avec villa, voiture, vacances, opulence et tout et tout. Or le prétendant bosse au marché Ali Mellah. Et il bosse quoi ? Il vend des légumes. Une autre fois, il propose des vêtements, des souliers. Ces jours-ci, des équipements sportifs aux couleurs nationales. En quatre mots, il fait des affaires ! Et donc, pour lui, lorsqu'il était parti avec sa mère chez l'hadja demander la main de sa charmante fille, il avait reçu un camouflet surtout que la vieille lui avait méchamment rappelé qu'il habitait un gourbi au-dessus de la salle Harcha et donc indigne pour sa fille. Que s'est-il passé par la suite ? Que s'étaient donc dit la vieille et le prétendant ? A la barre, maître Dehidah, l'avocate du gamin amoureux, s'était défoncée pour sauver son client au moins des... menaces. Ce sera fait ! Hamza N. a vingt-trois ans. Il a une table au marché Ali Mellah 1er Mai). Il est inculpé de menaces et insultes à l'encontre d'une vieille femme dont la fille s'est amourachée de Hamza qui s'était présenté au domicile de la fille demander sa main le plus sérieusement du monde. Et quelle a été la réponse de la vieille ? Suivons pour bien saisir le sens des poursuites de ce demandeur de la fille. «Ecoute, avait avertit la bonne vieille voisine, tu résides sur le flanc de la salle Harcha. Tu ne me vois pas t'accorder la main de ma jolie, charmante et jeune fille. Je la destine à un aisé, pas à un plouc démuni comme toi. Allez dégage et ne remets plus les pieds ici, c'est compris ?» Le pauvre Hamza décida de tempérer ses ardeurs avant de revenir à la charge au cou de cette maman qui, en refusant d'accorder la main de sa fille à Hamza, au seul motif qu'il est un tout petit revendeur dans un marché populaire, a vu sa fille réitérer son amour, son attachement et son envie de fonder un foyer avec le seul Hamza. Or les relations entre Hamza et la maman récalcitrante allaient se détériorer. La vieille dame avait déposé plainte pour insultes et menaces. A la barre, maître Ouahiba Dehidah, l'avocate de Hamza, avait mis l'accent sur un point important. Suivons son intervention : «Madame la présidente, le tribunal doit savoir que les insultes, SMS et menaces émanaient du portable de la sœur de Hamza. Et Hamza ignorait ce détail, car la sœur, craignant les foudres de son époux, avait caché la perte de l'appareil. Ainsi, celui ou celle qui avait trouvé le mobile s'était évertué à user de grossièretés à l'encontre de la vieille maman qui n'avait qu'un seul “ennemi”. Elle désigne Hamza», avait clamé l'avocate. La juge avait sûrement avalé cette probabilité puisque Hamza l'a dit à la barre : «Je me marierai avec cette fille mais pas à n'importe quel prix. Ces poursuites ne sont pas fondées. C'est ridicule. Je ne vais pas m'amuser à briser mon avenir en m'en prenant à la seule personne susceptible de m'accorder la main de sa fille...» L'interrogatoire allait se poursuivre dans la sérénité et la transparence. N'ayant pas tellement avalé cette couleuvre, le représentant du ministère public n'était pas tombé dans le piège des demandes aveugles. Il allait requérir raisonnablement que le parquet avait entamé comme poursuites «six mois de prison ferme» pour les deux délits, insultes et menaces, faits prévus et punis pas le code pénal. Il faut aussi savoir qu'avant de décider de mettre en examen le dossier sous huitaine, la présidente avait appris de la bouche de l'avocate qu'une réquisition avait donné comme résultat que les menaces et insultes émanaient du mobile de la frangine de l'inculpé. «Donc, il ne reste plus au tribunal qu'à éloigner les deux inculpations et accorder la relaxe à Hamza dont le seul “crime” est de vouloir se marier avec une voisine avec laquelle il entretenait des relations saines, basées sur le mariage dans un avenir proche. Pour les menaces, il a obtenu la relaxe et écopé de deux mois ferme pour les insultes.»