Et si, après nous avoir protégés de la variole, du tétanos ou de la grippe, les vaccins nous prémunissaient contre nos dépendances à l'alcool, aux drogues ou à la cigarette ? L'idée, dans l'air depuis plusieurs décennies, est en passe d'être réalisée alors que plusieurs essais cliniques sont en cours. «Les vaccins contre la cocaïne et la nicotine sont ceux pour lesquels on a le plus d'avancées», annonce le Dr Laurent Karila, responsable du Centre référence cocaïne à l'hôpital universitaire Paul-Brousse, à Villejuif. L'idée du vaccin : empêcher la drogue d'arriver au cerveau. Leur principe est le même : en stimulant le système immunitaire, ils induisent la production d'anticorps anticocaïne ou antinicotine. Empêchant, lors dune consommation ultérieure, les molécules de cocaïne ou de nicotine d'atteindre le cerveau. Et si moins de drogue pénètre dans le cerveau, les effets de celle-ci sont diminués, le plaisir est moindre, ce qui limite alors chez la personne dépendante l'envie de consommer. En automne dernier, des chercheurs américains ont ainsi annoncé avoir réussi à prévenir les «flashes» (état euphorique) chez des patients cocaïnomanes. «Plus leur taux d'anticorps était élevé, moins la drogue avait d'effet, permettant à une partie d'entre eux de mettre fin à leur consommation», explique Laurent Karila. «L'immunothérapie est d'autant plus intéressante dans la lutte contre la cocaïnomanie qu'il n'existe pas de substitut thérapeutique comme il y en a pour l'héroïne (méthadone), ajoute-t-il. Néanmoins, les anticorps ayant une durée d'action assez courte, la vaccination ne peut être utilisée que pour aider les patients à arrêter, non pas pour prévenir la prise de drogue. D'ailleurs, même dans ce contexte, des rappels sont nécessaires.»