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«L'Europe est acquise à la cause sahraouie» Mohamed Yeslem Beissat : ministre délégué des Affaires maghrébines et africaines, représentant intérimaire du Sahara occidental à Bruxelles au Temps d'Algérie
Le Sahara occidental demeure le dernier bastion du colonialisme. Le Maroc qui mène cette guerre sourde aux Sahraouis est soutenu par les gouvernements européens, à savoir la France et l'Espagne. C'est ce qui empêche d'ailleurs l'unification du Maghreb, une région prisée pour ses ressources par la France et l'Espagne. Mais aujourd'hui, la donne a changé, car ni le black-out médiatique marocain ni les contrats économiques maroco-européens ne pourront barrer la route à la légitimité internationale de la cause sahraouie et l'ONU pour l'application du plan d'autodétermination. Le Temps d'Algérie : Y a-t-il un changement de vision de l'Europe vis-à-vis du Sahara occidental ? Mohamed Yeslem Beissat : L'Europe est menée, malheureusement, par la France et l'Espagne pour la signature d'un contrat commercial depuis 2006 jusqu'à la fin de cette année, dans le domaine de la pêche. Ce qui est d'ailleurs contraire aux traités internationaux en la matière. Des contrats qui touchent le territoire sahraoui. L'Europe qui englobe 27 pays, tous démocrates, de grandes nations des droits de l'homme et promotrices de grandes valeurs est proche du Maghreb géographiquement et historiquement, et ce voisinage lui impose d'assumer des responsabilités, notamment dans le cas du Sahara occidental. L'Europe est le grand perdant dans ce conflit, et en aidant à sa résolution, selon le plan des Nations unies qui demande l'autodétermination, les pays européens seront les grands gagnants. L'Europe comporte 27 pays, mais la locomotive, c'est la France et l'Espagne qui affichent un penchant pour le Maroc. Qu'en pensez-vous ? Effectivement, il y a une loi non prescrite qui dit ceci : en Europe, quand il y a un problème qui touche les pays d'Amérique latine c'est l'Espagne qui gère, dans les pays du Commonwealth, c'est à l'Angleterre de gérer et quand il s'agit, comme dans notre cas, du Maghreb, c'est à la France de décider. Cette loi date du temps des grandes colonisations, mais reste effective à ce jour. Une loi qui a été discutée au congrès de Berlin, et elle reste encore dans certaines écoles de sciences politiques. La France a le dernier mot dans le conflit du Sahara occidental, et la France soutient, doit-on le dire économiquement, le Maroc. Y aura-t-il un nouvel ordre qui sera contraire à celui-ci à l'avenir ? Oui, le débat est permanent sur ce sujet justement en Europe, que soit au sein du Parlement européen ou au niveau des parlements de chaque pays, même en France d'ailleurs. La cause sahraouie est présente à tous les niveaux en Europe. C'est l'erreur du régime marocain qui croit qu'il a acquis l'Europe par des contrats commerciaux. Le Maroc a cru avoir l'attestation d'innocence alors que ces contrats sont en fait une responsabilité lourde à porter. Puisque le Maroc doit assumer les traités signés avec l'Europe, notamment sur la question des droits de l'homme, il doit rendre des comptes à l'Europe. Mais aussi au monde entier. Quelle sera, selon vous, la décision du conseil de sécurité par rapport aux négociations entre le Maroc et le Front Polisario sachant que la France a le droit de veto ? Le Maroc est dans une impasse, et il a traîné avec lui ses alliés, parce que le plan d'autonomie est un projet mort-né. C'est un projet qui date du règne de Franco et le Maroc l'a remballé pour le vendre à l'Europe et surtout à la France, mais ce produit est invendable. Parce qu'en fin de compte les Européens ne sont pas intéressés par l'indépendance du Sahara occidental ni par le colonialisme marocain du Sahara. Mais ce qui les intéresse c'est la stabilité de la région et celle surtout du marché maghrébin pour garantir la vente de leurs produits. Partant de ce principe, le seul projet qui offre cette stabilité est le plan d'autodétermination. Donc, la France n'a pas intérêt à s'y opposer et le président Sarkozy ne commettra jamais une telle erreur. Parce que les retombées sont néfastes pour la France. La France n'utilise jamais son droit de veto pour un régime féodal et dictatorial. La France de Sarkozy a changé le dogme de la diplomatie française pour des intérêts plus importants. Pour preuve, les limites du Sahara ont été dessinées par la France. Et la société civile européenne ? Les peuples européens sont des alliés du Sahara et la conférence d'Alger est la preuve vivante de cette alliance. La société civile européenne ne cesse de bouger pour la cause sahraouie, et nous sommes plus que jamais convaincus de l'importance des pressions exercées par la société civile sur les Etats et les fruits qui vont en découler. L'Europe est acquise à la cause sahraouie. Entretien réalisé