Les chauffeurs de taxis clandestins rôdant à l'intérieur de la gare de taxis interwilayas du Caroubier ont une manière bien particulière de s'attirer des clients tout en échappant à une éventuelle interpellation. Les clandestins abordent les voyageurs à l'intérieur de la gare et ils les récupèrent à l'extérieur en leur appliquant parfois les mêmes tarifs que le service taxi réglementaire. Quand les professionnels de ce service protestent contre cette concurrence déloyale, la direction de la station répond : on n'est pas responsable de ce qui se passe en dehors de la gare. La gare interwilaya du Caroubier a été le théâtre d'une contestation qui a opposé, au début de ce mois, la direction des lieux aux chauffeurs de taxi notamment. L'événement a bénéficié d'une large couverture médiatique de la télévision publique qui a donné la parole aussi bien aux chauffeurs, entre autres, et au premier responsable de la station, chaque partie faisant valoir ses arguments pour défendre sa position. Parmi les problèmes soulevés à cette occasion par les contestataires, figure la prolifération des taxis clandestins au sein même de l'enceinte censée être accessible uniquement aux chauffeurs professionnels. Dans sa réponse, le directeur de la gare a nié le fait. Selon lui, aucune activité clandestine n'y est tolérée que ce soit dans le service taxi ou autre. «Nous ne sommes pas responsables de qui se passe en dehors de la gare», dit-t-il. Une question alors s'impose : existe-t-il réellement des taxis clandestins à la gare de l'interwilaya ? Oui. Les bus qui entrent à la gare pour déposer les voyageurs stationnent sur le côté droit de l'entrée principale. C'est là que les arrêts ont été fixés depuis des années. Une fois sur place, on remarque plusieurs jeunes qui se mobilisent et se bousculent à l'arrivée d'un bus. Il suffit que le chauffeur ouvre la portière pour que ces jeunes commencent à crier haut et fort : «Taxi !, Taxi !, Taxi !». C'est presque du harcèlement. Quand il y a plusieurs bus qui arrivent en même temps, surtout les débuts de semaine, les jeunes évitent de se marcher sur les pieds : chacun ira chercher une probable clientèle dans tel ou tel bus. Ils prennent particulièrement pour cible les personnes voyageant en famille. Leur point fort : ils connaissent le moindre coin de la capitale. Ils devinent les principales destinations demandées par les voyageurs et cèdent parfois sur les prix. Ceci confirme largement leur ancienneté dans le circuit. Les voyageurs intéressés négocient sur place le tarif de la «course». Cela varie entre 300 Da et 600 Da, selon la destination demandée et le flair du voyageur. Pour les non-avertis, c'est en effet dans le fait accompli qu'ils découvrent qu'ils viennent de faire appel à un taxi clandestin. Comment ? Une fois le tarif fixé, ces jeunes demandent à leurs clients un service : «Allez m'attendre à la sortie de la gare, je vais sortir le véhicule du parking (celui de la station)». Les véhicules sont souvent inconfortables, petits et sales. Une fois à la sortie, le conducteur s'impatiente : «Montez vite, on n'a pas le droit de s'arrêter ici !». Tout ceci se passe au moment où les chauffeurs de taxis qui y travaillent légalement restent immobilisés là où la direction de la gare leur a affecté un espace de stationnement. Ils ne vont pas à la «pêche» des clients comme font les clandestins. Pourtant, dans les arrêts de départ des bus de l'interwilaya (surtout à destination de Tizi Ouzou), le service de sécurité des lieux interdit cette «pêche». Là, les clients ont la possibilité de choisir dans quel car monter. Pourquoi donc les mêmes services ne s'imposent pas quand il s'agit de faire respecter l'ordre dans le service taxi ? Cette passivité encourage les clandestins qui poussent d'ailleurs les choses jusqu'à profiter de la naïveté de la clientèle. Si vous ne connaissez pas le milieu, le clandestin vous appliquera le tarif en vigueur dans le service taxi réglementaire ! Ces chauffeurs activent en parasite et évitent de se faire piéger en se mobilisant dans les arrêts et en récupérant les clients sur la voie publique. Mais la direction de la gare est parfaitement au courant de leurs agissements. Rappelez-vous ce que dit son directeur : «Nous ne sommes pas responsables de qui se passe en dehors de la gare».