Les principales forces politiques nationales représentatives ont exprimé, à l'unanimité, leur déception quant à l'initiative de la marche à laquelle a appelé la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD). Contactés par nos soins, des responsables du FLN, du RND, du MSP et du FNA estiment que la mobilisation des citoyens n'a pas été au rendez-vous lors de cette marche, qualifiant cette démarche «d'échec total» et d'une «ultime preuve» que les initiateurs de cette action sont loin d'être des «locomotives politiques». Les états-majors des principales forces politiques du pays ont suivi attentivement samedi l'évènement de la CNCD appuyée par, entre autres, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), le Mouvement démocratique et social (MDS), la Coordination des lycées d'Algérie (CLA) et des associations et syndicats illégaux comme la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme et du Syndicat national du personnel de l'administration publique (Snapap). Pour les responsables politiques des partis de l'Alliance et du FNA, les initiateurs de la marche du 12 février «ont démontré aux opinions publiques nationale et internationale qu'ils sont totalement méconnus et ne pèsent en rien sur le cours des évènements». «Dans l'action politique, on ne peut parler de changement dans le pays avec un nombre aussi faible de mobilisation. Cela dit, nous respectons le droit à la manifestation de chaque citoyen algérien. Mais il faudrait être réaliste dans l'analyse sur l'importance de cette manifestation qui a été surmédiatisée en Algérie et même à l'étranger. La participation des Algériens était vraiment modeste et insignifiante. C'est plutôt le traitement médiatique de certaines chaînes qui a donné l'impression que la marche était un évènement. Les organisateurs eux-mêmes reconnaissent l'échec de leur action en ce sens qu'elle n'a pas drainé de foule, à la mesure de ce qu'ils attendaient», a souligné le porte-parole du Mouvement de la société pour la paix, Mohamed Djemaâ. Ce dernier explique l'échec de la manifestation par «les personnes initiatrices de la marche et qui ont une pensée politique connue». Pour le MSP, la démarche la plus judicieuse et efficace pouvant rassembler toutes les formations politiques algériennes représentatives et le peuple est celle du dialogue, surtout que la plus haute autorité du pays a démontré sa volonté d'écoute et de prise en charge des doléances de la société. «Ils prennent leurs désirs pour des réalités» Le Front de libération nationale (FLN) a tenu une réunion samedi pour se pencher sur la situation du pays. Son porte-parole, Kassi Aïssi, a estimé que la marche du 12 février a été un échec total et une action visant plutôt «la confrontation avec les autorités publiques qui ont pourtant pris la décision d'interdire cette manifestation». Aïssi fait savoir que «les personnalités politiques à l'origine de cette initiative se trompent d'objectifs. Ils prennent leurs désirs pour des réalités. Ils croient rééditer le scénario égyptien et tunisien, alors que nous ne sommes pas dans ces cas de figure. Les différences entre les trois pays sont connues aussi bien par les historiens que les politiques. Un seul exemple peut illustrer la particularité de l'Egypte. Le revenu mensuel d'un travailleur égyptien est l'équivalent de 5000 DA le mois. Il ne sert à rien d'évoquer notre chère histoire et d'autres données. Ils n'ont qu'à piocher avant de parler pour se rendre compte de leurs ignorances des choses politiques, surtout celles ayant trait à l'Egypte et à la Tunisie. D'ailleurs, c'est vraiment étrange de lire et d'écouter ces analyses sur l'effet de contagion des révolutions tunisienne et égyptienne à d'autres régions comme l'Algérie. Ils se sont encore trompés de peuple». De son côté, le Rassemblement démocratique national (RND) a rendu public un communiqué dans lequel il a réaffirmé son attachement à la stabilité du pays et à l'esprit de dialogue. «Nous avons pris une position claire au sujet de la marche. Nous appelons les Algériens au respect des lois de la République. Le peuple algérien aspire depuis deux décennies à la paix et à la démocratie dans le cadre des lois de la République et des institutions légitimes. Nous croyons fermement à cette option de dialogue qui est la seule solution pour le traitement de l'ensemble de nos problèmes d'ordre politiques, économiques, sociaux et culturels. Ce qui permettra aussi au peuple algérien de réaliser ses objectifs de développement et de stabilité», nous a précisé le porte-parole du parti, Miloud Chorfi. Le mouvement El Islah a refusé, quant à lui, de s'exprimer sur cette marche avouant que ses initiateurs «restent responsables devant l'opinion publique et les autorités de leurs actions». Le Front des forces socialistes, qui s'est retiré de cette coordination, ne veut pas, pour sa part, être sollicité à analyser cette marche. Nos multiples tentatives de joindre le premier secrétaire national, Karim Tabbou, n'ont pas pu aboutir. Une source proche de la direction du FFS nous dissuade de le solliciter, car il ne veut parler «ni de près ni de loin de cette CNCD». Le président du Front national algérien, Moussa Touati, invite, de son côté, les initiateurs de la marche à exprimer publiquement leurs intentions et objectifs à l'origine de cette action interdite par la loi. «Où est la plateforme de revendications ? Nous sommes en droit de demander les raisons qui ont motivé cette marche et pourquoi en ce moment ? Nous sommes contre l'anarchie et l'agitation qui ne profite à personne, sauf à ceux qui sont derrière», a tenu à affirmer le président du FNA, persuadé que «les organisateurs ne sont pas assez mûrs politiquement pour initier de telles manifestations».