Quand Salim avait reçu sur son adresse électronique l'«invitation» envoyée par un de ses amis plus branché à «découvrir son profil», puis à être son «ami sur Facebook», il s'est d'abord dit que ce devait être encore un de ces trucs compliqués qui n'étaient pas faits pour lui. Il connaissait la passion de son ami pour les nouvelles technologies et sa boulimie pour toutes les innovations. De toute façon, il le dépassait trop sur ce terrain là pour avoir à partager quoi que ce soit avec lui. Le problème avec les passionnés est qu'ils adorent «partager» ça et qu'ils s'y prennent toujours bien pour rallier leurs proches. Salim, qui avait laissé en «souffrance» l'invitation de son ami, avait toujours son argument le plus redoutable pour le décourager. Il pensait toujours que c'était trop compliqué pour lui et il le répétait à chaque sollicitation comme l'arme fatale. Le problème est que ce n'est pas compliqué du tout. Le copain à Salim le sait et généralement il sourit en coin quand il se met en tête de travailler quelqu'un au corps. Il sait qu'il lui suffisait de le ramener au clic. Salim a cliqué une fois sur un lien et il n'en est jamais revenu. Ce programme, comme beaucoup d'autres, vous prend par la main et ne vous lâche plus. De toute façon, Salim ne veut pas qu'on lui lâche la main, puisqu'il ne sait pas qu'on la lui tient. Il s'est fait des centaines d'amis, il a accédé à des dizaines de «murs» de grandes stars du sport et de la musique, retrouvé plusieurs amis d'enfance qu'il avait perdus de vue et s'est même fait de vrais amis de la vraie vie après les avoir «fréquentés» dans le monde virtuel. Facebook, comme la vie, ce n'est finalement pas compliqué. Quand Salim a entendu que des milliers de «pratiquants» comme lui se retrouvaient régulièrement pour écouter de la musique, danser ou simplement discuter en buvant un verre, il s'est dit que c'était une bonne idée, mais que c'était quand même… compliqué à réaliser chez nous. Pour des techniques déjà : les rassemblements de plein air étant interdits à Alger, il va être difficile de réunir un consensus sur une autre ville. Et puis, tous les inscrits de Facebook ne son pas forcément prêts à écouter de la musique, danser ou prendre un verre. Salim et les autres ne se sont donc pas encore entendus sur un piquenique à Tikjda mais ils ont réussi à s'entendre sur une… marche à Alger. Salim n'a jamais fait de politique, mais il s'est dit que ce ne doit pas être très différent d'un piquenique avec des gens qu'on connaît dans la vraie vie et d'autres qu'on va sortir du virtuel. La police a encerclé les lieux très tôt le matin pour ne laisser personne passer. Salim est retourné rapidement chez lui et a ouvert son ordinateur. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir