C'est maintenant à l'un des pays participant aux raids aériens menés en Libye, la France en l'occurrence, de reconnaître que l'Algérie avait raison de s'inquiéter de voir le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC ou Aqmi) récupérer une partie des armes et des munitions circulant en abondance au pays de Mouammar Kadhafi. Le ministre français de l'Intérieur, Claude Guéant, a reconnu mercredi dans une déclaration faite à la radio RTL qu'«il faut savoir que compte tenu de la situation en Libye, un certain nombre d'armes a quitté ce territoire pour aller vers la zone occupée par Al Qaïda au Maghreb islamique, en particulier au Mali». Il s'est dit «particulièrement inquiet» pour les quatre otages français enlevés par Aqmi. Cela a-t-il un lien avec la recrudescence des attentats terroristes perpétrés ces dernières semaines en Algérie ? S'il est encore tôt de répondre, par l'affirmative ou la négative, en attendant l'examen balistique des armes utilisées dans ces actes terroristes, l'hypothèse du renforcement des capacités du GSPC en matériels de guerre acheminés de Libye n'est pas officiellement écartée. Militaires et gendarmes sont, cependant, en alerte le long de près de 1000 kilomètres de frontières communes entre l'Algérie et la Libye, depuis le début du conflit armé au pays de Kadhafi où, rappelle-t-on, et selon le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, un «éclaireur» du GSPC avait été arrêté. Le terroriste présumé aurait tenté de ramasser le maximum de renseignements sur les positions de l'Armée nationale populaire (ANP) et de la Gendarmerie nationale le long des frontières et, par là, exploiter d'éventuelles «lacunes» pour le transport d'armes et de munitions et la circulation d'éléments de la nébuleuse. Militaires et gendarmes ont, par ailleurs, mis en place un dispositif d'identification par empreintes digitales, dans le but de mettre en échec toute tentative d'accès, en territoire algérien, de terroristes fichés et recherchés. Conscients du danger représenté par le conflit armé, dans un pays voisin, et de la menace de la récupération de la situation par le GSPC, les Touaregs algériens se sont associés à la vigilance, soutenant l'ANP dans la mission devenue de plus en plus délicate. C'est ainsi, apprend-on de source crédible, que les «mehaliche», Touaregs engagés volontairement dans la lutte antiterroriste au Sahel aux côtés de l'ANP, et dont la mission est de surveiller de vastes territoires et d'informer l'armée algérienne sur tout éventuel mouvement terroriste, se mettent de la partie. Circulant à dos de chameau et ayant de grandes connaissances du terrain, les «mehaliche» apportent un important soutien à l'armée en matière de renseignements. «Les mehaliche sont devenus plus nombreux», selon un notable du Sud. Découverte d'une nouvelle piste utilisée par les terroristes Les services de sécurité algériens qui avaient, lors d'investigations, réussi à mettre en place une carte des pistes et autres chemins utilisés par le GSPC depuis le début des années 2000 pour le transfert d'armes de guerre et de munitions achetées auprès de contrebandiers au Mali et au Niger, à l'époque, ont, selon une source crédible, découvert une autre piste dans la wilaya de Tamanrasset, utilisée par l'organisation terroriste. Par ailleurs, les informations données aux services de sécurité par Mossaab Abou Daoud, ex-émir de la zone 9 du GSPC, repenti, ont permis de mieux comprendre les méthodes utilisées par l'organisation terroriste dans le déplacement de ses éléments et l'acheminement d'armes et de munitions. La carte localisant les pistes et autres passages par les terroristes, communiquée par l'Algérie aux autres pays du Sahel dans le cadre de la lutte commune contre le terrorisme, pour ce qui est des prolongements dans leurs pays, est régulièrement enrichie avec l'adaptation aux changements opérés par Aqmi.