Saïd, Libyen, et Ziyad, Egyptien, sont deux contrebandiers de stupéfiants qui se sont reconvertis, avec le conflit armé en Libye, dans la contrebande des armes. «Les affaires marchent», se félicitent-ils, en se frottant les mains. Ils avouent, avec force détails, qu'ils ont transporté des quantités importantes d'armes et de munitions vers l'Algérie et l'Egypte. Cet arsenal de guerre a été volé dans les dépôts de l'armée libyenne. Il paraît de plus en plus évident, que le Conseil national de transition (CNT) libyen avait accusé à tort l'Algérie d'avoir aidé le régime de Mouammar El Kadhafi. Et qu'il n'a pas honoré ses engagements vis-à-vis de la communauté internationale, en matière de contrôle des armes en circulation, en Libye. Les deux contrebandiers reconnaissent avoir transféré vers l'Algérie et l'Egypte des armes volées par les «insurgés», obéissant aux ordres du CNT libyen, dont des missiles sol air, des fusils mitrailleurs de fabrication coréenne, des roquettes anti-chars, des pistolets automatiques, et autre artillerie lourde. De quoi surarmer le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). Les deux contrebandiers, dont les témoignages ont été publiés dans l'édition d'hier du journal londonien Asharq Al Awsat, n'évoquent aucune difficulté imposée par le CNT libyen contre ce trafic. «Ça sert à quoi de continuer de faire dans le trafic de stupéfiants, en Libye, puisque celui des armes, favorisé par le conflit armé, est plus rentable financièrement ?», s'interrogent-ils ! Le reporter d'Asharq Al Awsat, qui a accompagné les deux contrebandiers au cours de transactions faites non loin de Benghazi, rapporte que des missiles sol air sont vendus beaucoup moins chers que les fusils d'assaut et les pistolets automatiques. Ziyad ajoute que les mêmes chemins utilisés pour le trafic de stupéfiants, auparavant, sont empruntés, actuellement, pour le transport d'armes, de Libye vers l'Algérie et l'Egypte. Il dira avoir acheté des fusils d'assaut au prix de 2300 dinars libyens (l'équivalent de 170 dollars américains) la pièce, pour les revendre à un prix équivalent à 2300 dollars américains. Des énigmes restent, cependant, à élucider. La route menant de la région d'El Mordj (environ 94 km à l'est de Benghazi) aux frontières avec l'Egypte n'est pas surveillée par les «insurgés» libyens, «comme au début de la révolution». «Même si vous rencontrez un individu, il ne se souciera pas de ce que vous transportez et vous laissera passer sans fouille aucune». Enigmatique comportement que celui du CNT libyen. Les deux trafiquants témoignent que de nombreux contrebandiers sévissent, de l'est à l'ouest des frontières libyennes, s'alimentant en armes et munitions des dépôts à Benghazi.