Ils étaient environs 4000 personnes à marcher jeudi matin dans la ville de Fréha, 30 km à l'est de Tizi Ouzou, pour dénoncer la bavure militaire qui a coûté la vie, le 11 septembre dernier, à une femme devant une caserne de l'ANP. Les marcheurs sont venus de plusieurs localités limitrophes. Ils ont répondu à l'appel des comités des villages de la commune pour revendiquer unanimement la vérité sur cette bavure de trop, et surtout la délocalisation de cette caserne à un autre endroit plus approprié, loin des agglomérations. «Délocalisation des casernes de la ville de Fréha», peut-on lire d'ailleurs sur l'unique banderole brandie par les manifestants. Il était 9h lorsque les premiers marcheurs ont commencé à converger vers l'endroit où la pauvre Zahia Kaci a trouvé la mort, dimanche dernier, alors qu'elle était de retour d'une veillée funèbre, accompagnée de deux autres femmes, vers 22h. Les membres de la famille de la victime étaient à la tête de la procession, munis d'un grand emblème national. Ces derniers n'ont pas cessé d'appeler au calme, sachant que des émeutes ont déjà éclaté suite à cette bavure à Fréha. «Il faut que notre mouvement reste dans le cadre pacifique loin de toute violence et demeurer vigilant», prévient un membre de la famille de la victime par un mégaphone. «Nous exigeons d'abord la délocalisation des casernes militaires de la ville de Fréha vers d'autres endroits plus adéquats afin d'éviter la perte d'autres vies humaines. Nous ne voulons plus de bavures. On se demande qu'est-ce qu'une caserne de parachutistes fait dans notre ville ?», tonne l'un des organisateurs de la manifestation. La colère, l'indignation, la consternation et la tristesse se lisaient sur les visages des manifestants. Ces derniers ont marqué une halte devant le portail principal de la caserne militaire pour observer une minute de silence à la mémoire de la victime. Par la suite, la procession s'est immobilisée devant le siège de la mairie, sis au centre-ville, où des membres de la coordination locale ont pris la parole. Ils ont insisté sur la mobilisation et la continuité de leur combat pacifiquement. «Nous resterons mobilisés jusqu'à la satisfaction de nos revendications. Nous réclamons l'entière vérité sur l'assassinat de cette femme et la condamnation des responsables de la bavure, la délocalisation de toutes les casernes militaires de la ville de Fréha et la restitution des terres agricoles dont se sont emparés les militaires», déclara avec véhémence un membre de la coordination communale, créée, pour rappel, au lendemain de la bavure de dimanche. La marche s'est déroulée dans le calme et aucun incident n'a été signalé. La grève générale à laquelle a appelé la même coordination était largement suivie à Fréha. L'ensemble des commerçants de la ville ont baissé leurs rideaux durant toute la journée de jeudi. Plusieurs élus locaux de la région et des responsables politiques de la wilaya de Tizi Ouzou ont pris part à cette manifestation. Les partis politiques, tels que le FFS et le RCD, ont dénoncé les bavures militaires répétitives dans cette wilaya. Par ailleurs, l'installation des structures sécuritaires au sein des villes et des villages à Tizi Ouzou est devenue un sérieux problème ces dernières années. Plusieurs localités de la wilaya ont soulevé le problème. En 2009, les habitants de la commune de Boudjima, 30 km au nord de la wilaya, s'étaient opposés farouchement à l'installation d'une caserne militaire dans une école primaire, pas loin du chef-lieu de la commune. Au mois de juin dernier, les habitants de la commune d'Illiten, daïra d'Ifarhounen, 70 km au sud-est de Tizi Ouzou, ont procédé à la démolition des fondations d'une caserne pour la Gendarmerie nationale. Même son de cloche du côté de la commune de M'kira. La semaine dernière, seulement, les habitants de deux villages de cette localité, située à l'extrême sud-ouest de la wilaya, ont rendu publique une déclaration pour s'opposer catégoriquement à la construction d'une caserne de la Gendarmerie nationale, pas loin de leur village.