«Des footballeurs algériens entre deux rives ou l'histoire des migrations des footballeurs algériens vers la France de 1954 à 2002», c'est le sujet de la thèse d'études du Dr Stanislas Frankiel, aujourd'hui expert au centre de recherches et d'innovation sur le sport en France et lauréat du programme de bourses de recherches de l'UEFA. Un travail qui a nécessité 4 ans de recherche tant en France qu'en Algérie auprès de dizaines de footballeurs, dont les membres de la grande équipe du FLN. Stanislas Frankiel était dimanche soir l'invité du Centre culturel français d'Alger où il est venu présenter sa thèse et débattre avec un certain nombre de personnalités parmi lesquelles l'ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, Aziz Derouaz. L'orateur a d'emblée expliqué que migration est synonyme d'espoir d'ascension sociale indiquant que le premier joueur algérien connu à avoir joué en France en quittant un club d'Algérie avait été Benouna, de l'US Orléansville (aujourd'hui Chlef) en 1932. Selon lui, le nombre d'émigrés footballeurs n'a fait que progresser au fil des années jusqu'à atteindre un pic en 1956. Cette année là, le FLN avait ordonné à tous les clubs musulmans d'Algérie de cesser leurs activités. A la suite de quoi, nombreux avaient été les joueurs algériens mis au repos, à avoir choisi d'aller exercer en France. Cette migration avait été encouragée par une disposition des règlements du football français, celle du 27 novembre 1955 qui interdisait à tous les clubs français de recruter des joueurs étrangers. L'Algérie étant, alors, colonie française, ses ressortissants n'étaient pas concernés par cette règle et pouvaient donc être recrutés par les clubs de ce pays. Les joueurs partaient en France pour conquérir une ascension sociale. «C'est ce besoin d'améliorer les conditions de vie qu'on s'est accroché», a dit l'un des membres de l'équipe du FLN, Hamid Zouba, à Stanislas Frankiel. Dans cette étude, il faut séparer les générations de footballeurs. Il y a eu ceux qui jouaient en Algérie et qui sont partis jouer en France comme les joueurs de l'équipe du FLN. Puis ceux qui, nés ici, sont allés très jeunes en France où ils ont été formés et où ils ont joué comme Mustapha Dahleb ou Abdelghani Djadaoui. Enfin, ceux comme Djamel Belmadi qui sont nés en France ont été formés dans ce pays y ont joué, qui jouissent de la double nationalité et qui jouent en équipe nationale d'Algérie. Le nombre de ces derniers, partis avec ceux de l'équipe nationale de 1982, n'a cessé de croître jusqu'à atteindre le taux de 100% dans l'équipe nationale. Lyazid Sandjak qui fait partie de cette dernière catégorie a expliqué à Frankiel : «Quand j'étais gamin et je fréquentais l'école de Noisy-le-Sec, on me traitait souvent de sale arabe. C'est ce qui m'a rapproché du pays de mes origines, à savoir l'Algérie. Je ne me voyais que jouant sous le maillot de ce pays.» L'orateur a également fait ressortir une étude intéressante à savoir qu'avant l'indépendance de l'Algérie, il n'y avait que 18% d'Algériens à fréquenter l'école. Par contre, 95% des joueurs ayant rejoint la France pour y jouer avaient été scolarisés.