Nicolas Sarkozy est susceptible d'être entendu dans plusieurs dossiers judiciaires, notamment celui visant la fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt, après l'expiration de son immunité présidentielle vendredi prochain. Comme le veut la Constitution depuis 2007, il était depuis cinq ans protégé de toute audition et mise en examen, mais des juges d'instruction ont mis en cause plusieurs de ses proches et ont enquêté à son sujet, ce qui a tendu les relations entre le pouvoir et la magistrature. Le sujet pourrait relancer le débat sur le statut pénal du chef de l'Etat, que François Hollande entend réformer pour le rendre moins protecteur. Coïncidence, un arrêt de la Cour de cassation est attendu sur ce sujet vendredi. Nicolas Sarkozy s'est retiré de la vie politique après sa défaite et entend réfléchir jusqu'en septembre à ses futures activités professionnelles. Son entourage se refuse à tout commentaire sur l'échéance de vendredi. Dans des déclarations à la presse, il a toujours nié toute implication dans les dossiers pouvant lui valoir une mise en cause. Les enquêtes ont marqué une accélération notable ces dernières semaines. Dans l'affaire Bettencourt, l'ex-gestionnaire de fortune de la milliardaire Patrice de Maistre, écroué depuis le 23 mars, est mis en examen pour "abus de faiblesse, escroquerie aggravée, trafic d'influence" en raison notamment de soupçons d'un financement illégal de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007. Il a été confronté vendredi dernier à d'anciens membres du personnel de maison des Bettencourt pour étayer cette piste mais a maintenu qu'il ignorait tout de la destination finale des quatre millions d'euros en espèces qu'il admet avoir eu en mains entre 2007 et 2009. L'affaire a valu aussi une mise en examen à Eric Woerth, ex-trésorier de la campagne et ex-ministre. Des dépositions, des coïncidences de date, des traces bancaires concordent pour laisser penser que des espèces ont alimenté la campagne Sarkozy, mais il n'y a pas de preuves. Concernant une possible visite de Nicolas Sarkozy chez les Bettencourt au moment de sa campagne, en février 2007, mentionnée sur des agendas, l'ex-chef d'Etat a admis qu'elle avait pu exister mais dit à la presse qu'elle aurait été normale, puisqu'André Bettencourt fut parlementaire de droite. Le juge Jean-Michel Gentil a fait saisir les comptes de campagne 2007 et fait interroger par la police les fournisseurs de cette campagne. Dans l'affaire Karachi, l'hypothèse du juge d'instruction Renaud Van Ryumbeke est que des commissions légales convenues en marge de la vente de sous-marins au Pakistan (84 millions d'euros) et de frégates à l'Arabie saoudite (200 millions d'euros) dans les années 1990 ont été partiellement détournées pour financer la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995, dont Nicolas Sarkozy était porte-parole. Homme d'affaires impliqué dans ces manœuvres et proche de la droite, Ziad Takieddine est mis en examen. Son ancien associé Abdul Rahman al Assir, a été retrouvé en Suisse et mis en examen le 30 mai. Le juge français doit se rendre prochainement sur place pour l'auditionner. Deux amis de Nicolas Sarkozy, Thierry Gaubert et Nicolas Bazire - témoin de son mariage avec Carla Bruni- sont aussi mis en examen. Le nom de Nicolas Sarkozy apparaît dans le dossier d'enquête en qualité de ministre du Budget de 1993 à 1995, fonction dans laquelle il aurait selon un rapport de la police luxembourgeoise approuvé la création de structures off-shore au Grand-Duché en lien avec les commissions détournées. Des poursuites éventuelles semblent exclusivement relever de la Cour de justice de la République (CJR), juridiction d'exception seule compétente pour les actes ministériels, qui est en sursis car François Hollande a promis de la supprimer. A propos d'un éventuel lien entre les commissions et un attentat ayant tué 11 Français au Pakistan en 2002, envisagé par les juges, Nicolas Sarkozy a parlé de "fable". "Il ne sortira rien de tout cela et tout le monde le sait", a-t-il dit en octobre 2011 sur TF1 et France 2. Une autre affaire évoquée dans la presse, un supposé financement de la campagne de 2007 par le régime Kadhafi, ne fait pas directement l'objet de procédures, mais est abordée par le biais d'une plainte de Nicolas Sarkozy.