L'enquête sur l'affaire de Karachi s'accélère avec l'audition par la justice de deux très proches de Nicolas Sarkozy, Nicolas Bazire (directeur de cabinet d'Edouard Balladur lorsque celui-ci était Premier ministre) et Thierry Gaubert (conseiller de Nicolas Sarkozy au ministère du Budget en 1993-1995). Paris De notre correspondante Eloigné du Président depuis la fin des années 1990, ce dernier reste très proche de Brice Hortefeux. Nicolas Bazire a été placé en garde à vue jeudi matin pour «complicité d'abus de biens sociaux», tandis que Thierry Gaubert a été mis en examen mercredi soir pour «recel d'abus de biens sociaux». Chargé de coordonner la campagne électorale d'Edouard Balladur, Nicolas Bazire est soupçonné d'avoir réceptionné des valises de billets ramenées de Suisse par l'intermédiaire de Ziad Takieddine et un ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, Thierry Gaubert. Nicolas Bazire et Thierry Gaubert sont suspectés d'avoir participé au financement occulte de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995, grâce à des commissions versées lors de contrats d'armement. Quant à l'intermédiaire de contrats d'armement Ziad Takieddine, il a été mis en examen le 14 septembre par le juge Renaud Van Ruymbeke pour «complicité et recel d'abus de biens sociaux». L'homme d'affaires franco-libanais est soupçonné d'avoir perçu de confortables commissions de manière indue en marge de deux contrats d'armement signés, fin 1994, par le gouvernement d'Edouard Balladur. Le premier, baptisé Agosta, a abouti à la vente de trois sous-marins au Pakistan ; le second, dénommé Sawari II, à la cession de deux frégates à l'Arabie Saoudite. Les comptes de campagne de M. Balladur mentionnent une entrée de 15 millions de francs en espèces, en coupures de 500 F. Ces comptes, qui comportaient des «anomalies importantes» et des «zones d'ombre», ont pourtant été validés par le Conseil constitutionnel. Une autre affaire que la justice devra élucider. «J'ai la conviction que dans les prochains jours ou les prochaines semaines, l'ancien Premier ministre Edouard Balladur devra rendre des comptes», a déclaré, lors d'une conférence de presse, maître Olivier Morice, l'avocat des familles de l'attentat de Karachi. «Les accusations, qui visent Nicolas Sarkozy et son entourage, peuvent avoir des implications très graves et très lourdes», a estimé Me Morice. «Les juges d'instruction indépendants font leur travail en se rapprochant du cœur de la corruption, notamment du chef de l'Etat», a-t-il encore dit. Dans un communiqué, l'Elysée a assuré que Nicolas Sarkozy n'avait «jamais exercé la moindre responsabilité dans le financement de cette campagne» dont il était le porte-parole et que son nom «n'a été cité par aucun témoin ou acteur de ce dossier. Il y est donc totalement étranger, d'autant plus qu'à l'époque où il était ministre du Budget, il avait manifesté son hostilité à ce contrat, comme cela apparaît dans les pièces de la procédure». «Tout le reste n'est que calomnie et manipulation politicienne», a ajouté l'Elysée. Le démenti de l'Elysée a suscité une réaction des syndicats de magistrats. «Les services de la présidence de la République font clairement référence au contenu des pièces d'une procédure judiciaire, montrant qu'ils ont pu en avoir connaissance dans l'irrespect apparent du secret de l'instruction», a dénoncé le président de l'Union syndicale des magistrats, Christophe Regnard, cité par le Parisien.fr. La presse française estimait, jeudi, que la mise en cause de Nicolas Bazire et Thierry Gaubert pourrait annoncer des difficultés durables et profondes pour Nicolas Sarkozy, à quelques mois de la présidentielle.