ConsidérEé comme l'aboutissement majeur des réformes politiques engagées par le président de la République, la révision de la Constitution doit prendre en considération un certain nombre de paramètres à même de rééquilibrer les pouvoirs quasiment détenus actuellement par le chef de l'Etat. C'est du moins la conclusion à laquelle ont abouti hier les intervenants, des professeurs de droit, lors de la journée parlementaire organisée au Conseil de la nation inscrite sous le thème «Expérience parlementaire algérienne : réalités et perspectives». Si au cours de leurs interventions, les trois juristes invités ont développé des thèmes comme le contrôle du Parlement sur l'action du gouvernement, le Parlement à travers les différentes constitutions algériennes, ou encore les propositions et projets de lois (gouvernement et Parlement), ils n'en demeure pas moins que leurs conclusions convergent toutes vers la nécessité d'apporter plusieurs amendements lors de la prochaine révision constitutionnelle, de nature à donner plus de prérogatives au pouvoir législatif et par là même, consacrer l'indépendance réelle des 3 pouvoirs et leurs équilibre. «Le système algérien est un système présidentialiste», relève Mme Fethia Benabbou, spécialiste en droit constitutionnel et enseignante à l'Université d'Alger, qui a disserté sur les divers moyens de contrôle de l'action du gouvernement (les questions, les interpellations et même les commissions d'enquête) qui excluent, selon elle, «toute mise en cause de l'action du gouvernement». Car, note-t-elle, le Premier ministre, qui n'est pas issu de la majorité parlementaire et est chargé d'appliquer le programme du président, n'est qu'un «bouc émissaire». Une dérive institutionnelle inquiétante, selon elle, de la Constitution algérienne qui endosse au Premier ministre la responsabilité devant le Parlement «sans pouvoirs correspondants». «Il faut revoir ce vide lors de la prochaine révision constitutionnelle», tranche-t-elle, rappelant au sujet du «retard dans la formation du nouveau gouvernement qu'aucune disposition de la loi actuelle n'oblige le chef de l'Etat à le faire dans l'immédiat ou à choisir le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire. Messaoud Chihoub, professeur à l'Université de Constantine, abonde dans le même sens. Pour ce militant du FLN, parti majoritaire et ex-président de l'APN, «il faut clarifier ce point lors de la prochaine révision de la Constitution». Le même orateur relèvera en outre le rôle «quasi-technique» du Conseil de la Nation et préconisera l'élargissement, dans le cadre de la révision constitutionnelle, de ses prérogatives. Pour M. Chihoub, qui note également le recours abusif aux textes d'application, c'est un état de fait auquel il faut trouver des mécanismes : «Il faut que les membres du Conseil de la Nation puissent avoir le droit de proposer des lois.» Dans le même sillage, il propose que les projets de lois (émanant donc du gouvernement), puissent «atterrir» indifféremment à l'APN ou au Conseil de la Nation, comme cela se fait ailleurs. La même idée est développée par le Docteur Mohamed Bousoltane de l'Université d'Oran qui propose aussi l'élargissement des prérogatives du Sénat. «Toute révision constitutionnelle doit assurer la souveraineté du Parlement», affirme-t-il préconisant également, dans le cadre de la même révision, «l'encadrement de l'acte de légiférer par ordonnance». M. Bousoltane estime par ailleurs qu'il faut «un autre moyen algérien pour le choix des représentants au sein du Conseil de la Nation». Lors des débats, M. Chihoub a estimé qu'un Parlement fort nécessite aussi une opposition forte. Dans ce cadre, il proposera aussi l'élargissement du droit de saisine du Conseil constitutionnel aux députés.