Le président-directeur général (PDG) d'Air Algérie, Salah Boultif, qui présentait hier le bilan de la compagnie, s'est exprimé, «à cœur ouvert» sur l'ensemble des problèmes liés à la compagnie nationale et a tenté de répondre aux multiples critiques qu'elle essuie, reconnaissant certaines défaillances et rejetant d'autres accusations tout en présentant ses projections pour les mois et les années à venir. D'ailleurs, il évoquera le redéploiement à l'international de la compagnie nationale qui envisage selon lui de reconquérir le marché du transport aérien en Afrique, en lançant de nouvelles dessertes vers des pays comme le Nigeria et l'Afrique du Sud. «Air Algérie, qui était il y a 25 ans la pionnière en matière de dessertes en Afrique, ambitionne de développer de nouveau ses activités sur ce continent, et de lancer de nouvelles dessertes vers des pays comme le Nigeria et l'Afrique du Sud», a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse animée au Forum du quotidien Liberté. Selon lui, le recul de l'activité de la compagnie en Afrique est dû à la faiblesse du taux de remplissage des appareils et donc à un problème de rentabilité. La compagnie aérienne nationale s'attelle ainsi à développer le trafic dit de «Sixième liberté» (trafic de transit), très demandé dans le continent africain, en créant un «hub» au niveau de l'aéroport international d'Alger Houari Boumediene. Il n'omettra pas à cet effet d'afficher «une certaine jalousie» par rapport à nos voisins marocains «qui ont eu cette vision» en construisant un hub en 1984 à Casablanca. «On est en train d'adapter cette vision», dit-il, tout en évoquant la restructuration de l'entreprise comme «1er axe stratégique à moyen terme». Il annoncera dans ce même registre l'acquisition de 5 autres avions qui viendront s'ajouter à la flotte nationale qui en compte 43 en sus de 3 autres «en voie de réparation». Avec une telle flotte, Air Algérie assure 72 destinations vers 25 pays à raison de 150 vols par jour dont 67% des vols vers la France, sa part de marché est de l'ordre de 57 milliards de dinars pour un trafic estimé à 3 777 701 passagers en 2001 (+6%) dont 2.5 millions en international, soit une augmentation de 9.5%. La destination France accapare la part du lion avec 1.6 million de passager (+13%). Par rapport à 2010, l'augmentation du trafic est aussi ressentie pour l'Europe (+14%), l'Afrique (+17%), le Canada (+09%). Elle assure également deux longs courriers vers Montréal et Pékin, cette dernière destination est «une ligne mauvaise» reconnaît Boultif qui évoque même sa suppression. «On a pensé à restructurer la ligne», dit-il, et à défaut, «d'ici la fin de l'année, on est obligé de prendre une décision. Soit c'est la restructuration, soit elle va fermer». Il comptera néanmoins sur la construction de la mosquée d'Alger par les Chinois qui viendront à la rescousse dans la mesure où notre ambassade accorde 10 000 visas par semaine. Les prix, un effort à faire Interrogé sur la possibilité de vols supplémentaires, notamment vers la France pour permettre aux ressortissants algériens de rentrer au pays pour la fête de l'Aïd, M. Boultif a tenu à faire remarquer qu'en plus du fait que la demande (pression des retours) se fait plutôt dans le sens Algérie-France, «il y a actuellement un vide, donc des possibilités de réservation», avant de révéler qu'une réunion est prévue jeudi avec les Français pour étudier la possibilité de vols supplémentaires à partir de la fin du mois d'août. «On va incha Allah avoir ces vols supplémentaires pour la période allant du 26 août au 3 septembre», a-t-il lâché, confiant. Reste que le prix du billet demeure excessivement cher aux yeux de tous. Sans aller jusqu'à nier cette réalité «endémique», le premier responsable de la compagnie nationale justifiera ces prix «parmi les plus élevés au monde», commentent les spécialistes, par des taxes notamment. «Il faut savoir que ces prix comportent des taxes qui s'élèvent à 45 euros du côté français et oscillent entre 4000 et 5000 dinars côté algérien», dit-il, tout en se réjouissant qu'en 2011, Air Algérie a offert 171 promotions dont la gamme tarifaire (promotions) va de 228 euros à 500 euros. Interrogé sur les recouvrements des créances de la compagnie, M. Boultif reconnaîtra que les institutions de l'Etat accaparent la presque totalité «comme Sonelgaz, ce sont les institutions qui représentent le plus gros», a-t-il lâché, affirmant qu'Air Algérie fait des efforts pour leur recouvrement qui a atteint 78% actuellement. «Il est important que notre trésorerie soit assainie», dit-il. L'Open sky, c'est du ressort des pouvoirs publics Répondant à une question sur les accusations d'une association en France selon lesquelles Air Algérie détient le monopole sur les prix par le biais d'une entente tacite avec Aigle Azur, le PDG de la compagnie nationale dément catégoriquement «ces affabulations», arguant que pas moins de 4 compagnies desservent l'Algérie. «Je dément formellement, c'est la concurrence qui détermine les prix, a-t-il dit. Quand il y a plusieurs compagnies cela favorise la concurrence», a-t-il ajouté, accusant cette association de vouloir faire pression sur l'ouverture du ciel (open sky). «Si ces gens font des pressions pour l'ouverture du ciel, je dirais qu'il est déjà ouvert avec 20 compagnies qui y transitent», a-t-il dit accusant ses gens de vouloir «s'introduire dans le marché». Pour lui, les compagnies low cost c'est à l'Etat de les gérer. Et même si l'Etat ouvre l'open sky, il peut pour sauvegarder ses intérêts, ne pas faire du low cost», a-t-il fait remarquer tout en notant que «le low cost» s'accorde avec une politique touristique, citant l'exemple du Maroc. Dans le même ordre d'idée, le PDG d'Air Algérie qui répondait à une question sur la Turkish Airlines qui veut augmenter ses vols vers l'Algérie, en ouvrant des lignes notamment à destination d'Oran et de Constantine, a tenu à rappeler que la compagnie turque «très agressive», est une compagnie qui n'a pas son marché propre. «Elle travaille en 6e liberté (trafic de transit)», a expliqué M. Boultif qui révèle qu'à un certain moment la compagnie a pris jusqu'à 80% des parts de marché contre 20% pour Air Algérie. «On accepte un seuil de tolérance mais pas comme ça», tonne-t-il. «On ouvre le ciel, oui, mais pas à notre détriment. Si on ouvre on ouvre tout, même les créneaux», a-t-il encore pesté.
La ponctualité reste à parfaire Interrogé sur la ponctualité de la compagnie nationale qui laisse à désirer, le PDG reconnaît une dégradation. «Nous avons une ponctualité dégradée», reconnaît M. Boultif liant ce désagrément à des raisons endogènes et exogènes. Il citera pêle-mêle des problèmes techniques, arrivée tardive du personnel, dépassement d'enregistrement, météo, sûreté, fuel, perte de slot… tablant sur un objectif de satisfaction de ce paramètre de l'ordre de 70%. Il constatera d'ailleurs une augmentation globale en 2012 (65%) contre 47% en 2011. «Cela nous permettra de gagner des parts de marché», a-t-il jugé. Le PDG d'Air Algérie dénoncera également la directive européenne sur la taxe carbone «imposée unilatéralement» et «qui porte atteinte à la souveraineté de l'Etat», affirmant que «tout en se conformant à la directive, l'Algérie suit le mouvement au niveau planétaire à propos de cette directive qui fera objet d'une discussion au niveau de l'OACI en 2013 lors de son AG. M. Boultif annoncera aussi la possibilité d'adhérer à l'une des 3 alliances internationales (Sky team, star alliance..) car cela «peut nous faire gagner en termes de réseau». Le PDG d'Air Algérie est également revenu sur les réductions concernant les ressortissants algériens résidant en Syrie qui veulent rentrer en Algérie en raison de la guerre qui y sévit. Une réduction de 50% a été décidée par les pouvoirs publics, rappellera Boultif qui ajoutera que «pour des raisons de chargement, la fréquence qui était de 3 vols par semaine a été réduite à un seul vol. s'agissant des Syriens qui fuient la guerre dans leur pays pour se réfugier en Algérie notamment, le premier responsable d'Air Algérie a évoqué des «modalités d'acceptation de la clientèle», expliquant que sa compagnie exige désormais certains documents, à l'instar du certificat d'hébergement.