Le 18 décembre 1976, le Mouloudia d'Alger bat le Hafia de Conakry (3-0 score à la fin du temps règlementaire puis tirs au but) en finale retour de la Coupe d'Afrique des clubs champions et remporte le trophée continental, le premier conquis par un club algérien. Ce soir-là, le stade du 5-Juillet, archicomble, avait vécu une soirée de folie. Nous y étions et nous pouvons vous assurer que vivre un tel moment fait partie de ceux que l'on n'oublie jamais. Un peu plus de 6 mois plus tard, a été promulgué le Code de l'EPS par lequel le sport d'élite a, pour ainsi dire, été nationalisé. Le Conseil des ministres, en date du 10 juillet 1977, a alors décidé de placer les clubs de la division nationale 1 sous la tutelle d'entreprises publiques. Considéré comme le plus important et le plus populaire, le Mouloudia d'Alger avait bénéficié du parrainage de la plus grande de nos entreprises publiques, la Sonatrach. Au moment de la cession du sigle MCA aux responsables de cette société, le Mouloudia était un club omnisports. En dehors du football, il avait d'autres sections comme l'athlétisme, le cyclisme, le handball. Parmi les dirigeants qui activaient à l'époque au moment de la cession il y avait Ferhat Ballamane, le président du club, Abdelkader Drif, le président de la section football, Mustapha Katrandji, Youcef Hassena, Boualem Keddache dit Boualem Tapioca, Abderrahmane Maloufi et bien d'autres encore. Il n'y avait pas, contrairement à ce que l'on prétend, Rachid Marif qui avait quitté le club une année auparavant, juste après la finale de la Coupe maghrébine des clubs champions en Tunisie. Grâce à ces gens-là le Mouloudia avait acquis une notoriété hors de nos frontières au point d'être invité par le grand Real Madrid en 1977 pour participer au tournoi qu'il avait organisé à l'occasion de la célébration de son 75e anniversaire. Pour remercier le club algérois de sa participation, le président du Real, Santiago Bernabeu, avait adressé aux dirigeants mouloudéens une lettre, dont nous détenons une copie, dans laquelle il faisait l'éloge du MCA. Si nous évoquons ces moments-là, c'est pour bien montrer au lecteur le parcours de ce si grand club qui est passé de la gloire et du prestige, grâce au concours d'hommes de très grande valeur, à une situation où sa section professionnelle a été créée, en 2010, par des gens qui ont fait usage de l'argent du club amateur pour acheter, en leur nom propre, des actions. Même pas de stade ou d'outil de travail Sous la coupe de Sonatrach, le Mouloudia devait grandir, dans le sens où il se transforma en puissant club omnisports. Pas moins de 14 sections le composaient. Grâce à elles, le MCA devint une véritable machine à gagner. Des titres de champions d'Algérie et des Coupes d'Algérie à la pelle, des titres africains et arabes à foison. Il y avait même des champions olympiques et du monde (Noureddine Morceli). Le Mouloudia principal pourvoyeur des équipes nationales était devenu plus qu'une évidence. Il y a que dans cette histoire on ne parle que des sections autres que le football. Contrairement aux autres disciplines, ce dernier restera à la traîne en termes de résultats sportifs. Juste après la cession du club à la Sonatrach en juillet 1977, il remporta, coup sur coup, deux titres de champion d'Algérie (1978 et 1979) pour avoir bénéficié de l'apport de la génération de joueurs qui avait remporté la Coupe d'Afrique des clubs champions en décembre 1976. Après cela, il avait dû attendre la saison 1998-1999 pour être sacré de nouveau champion d'Algérie. Quant à la Coupe d'Algérie, le club algérois, devenu MPA (Mouloudia des pétroliers d'Alger) ne la remporta qu'une seule fois sous la tutelle de Sonatrach, à savoir face à l'ASC Oran en 1983. On dira que c'est pas mal en terme de résultats mais compte tenu des moyens dégagés par l'entreprise pétrolière en faveur de ce sport, c'est vraiment trop peu. On ajoutera que malgré 24 ans de présence sous la coupe de Sonatrach, la section football du MCA n'hérita d'aucun patrimoine. Pas de siège, pas de stade où recevoir ses adversaires, pas de base d'entraînement, pas de centre de formation. Rien, absolument rien. Des milliards de centimes gaspillés pour une section qui ne se permettait même pas de dire qu'elle possédait un outil de travail. Un échec avec un très grand E. En 1999 sous l'action de son ex-président, Abdelkader Drif, un groupe de dirigeants s'était engagé dans un processus appelé à réintégrer la section football sous la direction d'un Mouloudia dit authentique. Il faut dire que depuis 1989 les entreprises publiques s'étaient désengagées de la gestion du sport et du football. Seule Sonatrach avait conservé le MCA. Quand Drif avait lancé l'idée de reprendre la section football, il avait été rejoint par d'autres dirigeants. La première réunion autour de ce thème avait eu lieu dans les bureaux de sa société, sise à El Biar. Nous avions eu le privilège d'y assister et ce jour-là outre Drif, il y avait Rachid Marif, Zoubir Bachi et M'hamed Mékirèche. Ce sont les quatre personnes qui avaient généré le mouvement qui allait donner naissance quelques mois plus tard à l'association El Mouloudia. Mais tout n'allait pas marcher convenablement dans cette affaire puisque Drif était contre l'idée de sortir définitivement de Sonatrach. Il voulait que cette société reste pour accompagner le club sur un certain nombre d'années jusqu'à ce qu'il puisse acquérir son outil de travail. Mis en minorité par les opposants à un tel projet, il dut se résigner à voir le navire prendre seul la mer jusqu'à chavirer. Qu'a fait El Mouloudia ? La section football du Mouloudia fut cédée par Sonatrach à l'association El Mouloudia en 2001. En tout cas l'histoire retiendra que le MCA sous la coupe d'El Mouloudia ce fut plus une période de crises et de scandales en tout genre qu'une phase durant laquelle le club se montra digne de son passé et de son héritage. La Sonatrach partie, la section football fut placée sous la direction d'un comité présidé par feu Mustapha Katrandji. Sa présidence fut éphémère puisque sous l'effet de la maladie, Katrandji dut démissionner. Après une brève transition assurée par Halim Azef, la présidence revint au Dr Mohamed Messaoudi qui resta de longs mois à la tête du MCA-section football. Mais le temps finit par l'user et il dut partir pour céder sa place en juin 2007 à Sid Ahmed Karkouche qui avait la particularité d'être un authentique cadre du pays. Cela n'a pas suffi et l'intéressé qui s'était demandé ce qu'il était venu faire dans cette galère, se décida à quitter la scène à la suite de quoi la présidence du MCA-section football revint à Omar Katrandji qui la géra jusqu'en juin 2008, moment où la Sonatrach accepta de céder au football le sigle MCA. Pour ne pas avoir à gérer les autres sports sous l'appellation Mouloudia d'Alger, l'entreprise publique intégra toutes ces sections sous le sigle d'un nouveau club, le Groupement sportif des pétroliers. Normalement, en tant que nouvelle association sportive, le GSP aurait dû être intégré dans les championnats en bas de l'échelle. Mais dans le sport algérien, les tours de passe-passe sont monnaie courante. C'est ainsi que le GSP s'est retrouvé à la place du MCA en train de disputer le titre de champions d'Algérie dans tous les sports collectifs. Une situation tout à fait biscornue parce qu'on peut se demander ce qu'il adviendra maintenant du MCA si le CSA décidait de faire jouer ses équipes de handball, de volley-ball et de basket-ball. Va-t-on leur demander de commencer au bas de l'échelle alors que le Mouloudia occupait le haut du tableau lorsqu'il a été dépossédé de ses biens par le GSP ? C'est une question à laquelle aucun des dirigeants de Sonatrach n'a osé répondre. Des présidents sans bilans Toujours est-il que le jour de la remise du sigle, on avait poussé l'outrecuidance de ne pas inviter le seul président du MCA encore vivant de la période d'avant juillet 1977, à savoir Abdelkader Drif. On avait même accompli un crime de lèse-majesté en ne l'intégrant pas à la liste des membres de l'assemblée générale du club algérois, lui, le président de la section championne d'Afrique en 1976, lui le vrai et seul initiateur de la création d'El Mouloudia. Et nous en sommes témoins. Mais quand il s'est agi, ces derniers jours, de vendre la SSPA-MCA à Sonatrach, on a trouvé le moyen de l'inviter comme pour avoir une certaine caution de sa part. Pas dupe du tout, Abdelkader Drif ne s'est pas présenté à ladite cérémonie. Le Mouloudia-section football reprit ses activités après que Sonatrach lui eut remis son sigle avec un nouveau président en la personne de Sadek Amrous qui se trouvait être contesté par Hamid Zedek qui avait indiqué que le vrai président c'était lui. D'où une très longue bataille juridique où Amrous dirigeait tout en subissant les coups de boutoir de Zedek. Un Zedek qui finit par prendre le dessus en 2011 et qui s'employa à élargir la composante de l'assemblée générale, un élargissement qu'il contesta par la suite quand il s'aperçut que la présidence du CSA avait été prise par Amar Brahmia en août 2012. Il convient de faire ici une précision de taille : de 2001 à août 2012 aucun des présidents du MCA-section football n'a présenté de bilans en assemblée générale. Aucune justification comptable devant ceux qui les ont élus. Et avec ça cette section a continué à recevoir des subventions de la part de l'Etat alors que la réglementation interdit de le faire à toute association qui n'a pas présenté ses bilans en assemblée générale. Un président sort du lot car le seul à avoir satisfait à cette démarche et à avoir obtenu son quitus de l'assemblée générale, c'est Omar Katrandji. Comme par hasard tous ceux qui étaient fautifs vis-à-vis de la loi et de la réglementation étaient invités à la cérémonie d'achat de la SSPA-MCA par Sonatrach alors qu'Omar Katrandji avait été superbement ignoré. Merci pour les textes légaux du pays. Merci pour le sport et le football algériens. Sonatrach a, semble-t-il, donné caution à la gabegie.