Face aux «dysfonctionnements du secteur portuaire qui affectent et pénalisent l'économie nationale dans son ensemble», le Forum des chefs d'entreprise a plaidé hier à Alger pour «une évaluation de la situation de nos ports, de la qualité de leurs infrastructures comme de celle de leur gouvernance». Les dysfonctionnements occasionnent des surcoûts annuels estimés entre deux et trois milliards de dollars, «correspondant approximativement au coût de réalisation d'un port de taille mondiale», a relevé le président du FCE, Réda Hamiani, lors d'un atelier de travail et de réflexion sur le thème : «Ports algériens, un gisement de croissance et de compétitivité». L'évaluation demandée par les opérateurs économiques devra servir de base pour rattraper «les retards immenses pris dans la relance du développement d'un secteur aussi vital». M. Hamiani a relevé qu'«il n'est pas douteux que les ports nationaux, par lesquels transitent plus de 90% des échanges commerciaux de marchandises, à l'exportation comme à l'importation, conditionnent l'efficacité du fonctionnement du système économique algérien». Il a ajouté qu'en raison de la forte ouverture de l'économie algérienne aux flux des échanges mondiaux de marchandises, «il est clair que l'efficacité de la gestion de son système portuaire est un déterminant essentiel des performances d'ensemble de son développement économique et du caractère harmonieux de son insertion dans l'économie mondiale». Les retards accusés au niveau des ports algériens concernent, en premier lieu, la faiblesse en nombre d'infrastructures portuaires, en dépit des sous-capacités d'accueil des navires de gros tonnage, la qualité de management. Les délais de transit des marchandises par les ports sont «extrêmement longs et coûteux». Les ports se transforment, le plus souvent, en de véritables «lieux de stockage», contribuant à congestionner davantage des espaces déjà fortement réduits. «Le délai moyen de transit des marchandises se situe entre 30 et 35 jours» alors qu'il se compte en heures dans les grands ports modernes, s'est plaint M. Hamiani, enchaînant que les opérateurs économiques ont déboursé en 2011 quelque 650 millions de dollars de surcoûts. Pour sa part, Abdelhamid Bouarroudj, expert consultant en transport maritime et logistique, a évoqué la difficulté des entreprises de payer les surestaries. Rattraper le retard, une urgence Comparativement aux ports des pays voisins, les surcoûts supportés par les opérateurs, poursuivra l'expert, sont de 500 dollars/tonne. En dépit de ces charges supplémentaires, les entreprises sont confrontées aux ralentissements des flux de circulation des produits, aux longues attentes en rade des bateaux et aux surcoûts sous forme de surestaries en plus d'une sensible hausse des taux de fret, a-t-il précisé. A l'image des ports étrangers, ceux de l'Algérie doivent évoluer pour créer de la valeur ajoutée. La modernisation facilitera la gestion des flux d'échanges, la dématérialisation introduite par le système EDI (échanges de données informatisées) permettant notamment d'organiser le dédouanement des cargaisons avant même l'arrivée des navires, contribuant à limiter les délais et les surcoûts de transit des marchandises. Le FCE propose l'ouverture du secteur portuaire aux investissements privés notamment pour la gestion des activités multiples au sein des enceintes portuaires et l'engagement urgent des réformes et une mise à niveau dans le cadre du programme quinquennal 2010. Par ailleurs, M. Hamiani a renouvelé son appel au gouvernement pour mettre en œuvre les cinquante propositions formulées par le FCE en mars 2012. Ces propositions visaient, expliquera-t-il, «la relance et le renforcement de la croissance économique, mais surtout l'ouverture de la voie à la construction d'une économie nationale moins dépendante de la rente des hydrocarbures».