Ce n'est pas vraiment ce que les Algériens attendent de leur police : résorber le chômage dans le sud du pays. Mais par les temps qui courent, même si l'usage politique qui en est fait est trop flagrant pour passer inaperçu, un emploi créé est toujours le bien venu. Il est difficile en effet pour le général-major Abdelghani Hamel, le directeur général de la sûreté nationale, de convaincre que le «salon de l'emploi» qu'il a ouvert à Ouargla fait partie de son agenda ordinaire et il ne s'en cache pas, c'est en employeur qu'il s'est présenté à Ouargla, même si le programme de son passage comporte quelques virées «professionnelle. Non seulement il n'y aura personne pour le lui demander, mais on a même dû solliciter sa «contribution». Et de le faire en grande pompe. Plus que ça, il n'a même pas eu à expliquer la nature des emplois qu'il compte «offrir aux jeunes du Sud», ni en quoi les heureux bénéficiaires de ces recrutements peuvent être utiles à l'amélioration de la sécurité des citoyens et à la performance de la police. Pourquoi en éprouverait-il le besoin, puisqu'on lui a même créé des «postes budgétaires» spécialement pour ça ? Il est rare qu'un patron de la police soit mis d'une manière aussi ostentatoire sous les feux de la rampe dans une «histoire» de lutte contre le chômage et de création d'emplois. C'est même unique, en l'occurrence. Après tout, puisqu'il n'y a que l'Etat qui crée des emplois, pourquoi ne pas mettre à contribution la DGSN, puisqu'on a sommé les entreprises de créer des postes et de prendre charge des formations au rabais, instruit les banques pour «accompagner les projets», et maintenant accorder des prêts à faibles taux d'intérêt dans les wilayas du sud ? La DGSN, miraculeusement promue à une vocation d'entreprise, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle n'est pas la sienne, aura ainsi, au bout des trois jours que durera le «salon», créé 322 emplois à Ouargla, avec contrats à durée indéterminée signés sur les stands mêmes de la manifestation, selon un… commissaire. Puisque les entreprises vont former à la hussarde et ont même révisé les critères d'accès aux stages préparatifs, voilà donc la DGSN qui a même pensé à recruter des «agents civils assimilés sans qualification» ! Et puisque c'est si facile pour la police de recruter dans un salon, ce jeune, particulièrement enthousiasmé et inspiré par «l'initiative» de la DGSN, a eu de la suite dans les idées : «Pourquoi la Sonatrach n'organise-t-elle pas un salon de l'emploi ?». Et cet autre qui se présente devant un officier préposé au salon : «J'ai fait de la prison, mais maintenant, je veux gagner honnêtement ma vie. Si vous ne me recrutez pas, je vais m'immoler par le feu» ! C'est que le brave jeune homme «rangé» doit être vraiment en confiance pour venir… menacer un policier de se donner la mort si on venait à lui refuser un boulot. N'est-il pas acquis, ce boulot, tellement acquis, que la direction générale de la police nationale est venue le lui proposer dans un salon ? Il paraît qu'il y avait foule à Ouargla et dans les neuf autres villes du «sud» où se tenait simultanément la «manifestation». Après les… manifestations, voilà que le gouvernement fait feu de tout bois pour trouver du travail dans une région longtemps délaissée, jusqu'au jour où on a découvert ses capacités de nuisance politique. Très inspiré, on a alors eu cette idée de génie : et si la police pouvait faire autre chose que matraquer les chômeurs ? On n'a pas trouvé quoi, on a alors demandé à la police d'aller… donner du travail ! Une institution dont les jeunes se plaignaient pour ses méthodes et pour ses… concours d'accès pas toujours loyaux !