L'insurrection du 8 mai 1945 était le résultat d'une série de soulèvements populaires ayant marqué l'Algérie depuis le début de la colonisation en 1830, a indiqué lundi à Alger le chercheur dans le domaine de l'Histoire de l'Algérie, Daho Djerbal. Appelant à établir une "cartographie ou une géographie" de la résistance algérienne, M. Djerbal qui était l'invité du forum du quotidien national Liberté, a expliqué que "l'insurrection du 8 mai 1945 était intervenue après les conflits qui avaient éclaté dans les villages et douars d'Algérie". Il a expliqué que les activistes des mouvements politiques et anticolonialistes algériens avaient "récupéré" ces mouvements de protestations relevant de conflits locaux pour les politiser et les transformer en "dissidence larvée" qui avait commencé à s'installer à partir des années 1940. Pour M. Djerbal, il s'agit d'un mouvement de protestation contre l'ordre établi, dans la mesure où, a-t-il expliqué, ceux qui étaient fidèles à la France se sont retrouvé progressivement dans les mouvements insurrectionnels. Il a indiqué, dans ce cadre, que le mot d'ordre ayant amené au soulèvement du 8 mai 1945 "n'avait pas été donné" par le Parti du peuple algérien (PPA). Il a affirmé que ce constat est le fruit de ses propres recherches historiques à ce sujet. "Le PPA avait simplement demandé à ses militants, membres de l'association des Amis du Manifeste et de la Liberté (AML), de participer aux événements", a précisé M. Djerbal, faisant observer que cette "association avait réussi à rassembler le plus grand nombre d'adhérents à l'époque". Pour cet universitaire et maître de conférences en histoire, trois facteurs "importants" avait conduit aux événements du 8 mai 1945, à savoir le basculement de la majorité du peuple algérien dans le front nationaliste et la dissidence de nombreux algériens qui étaient favorables à la France, notamment dans le Constantinois. Il y a eu aussi la mobilisation générale des AML qui avaient fait part de leur désir de manifester le mai 1945 pour revendiquer l'indépendance de l'Algérie et dresser l'étendard de l'Algérie, symbole de l'identité et de la souveraineté nationale, alors que le troisième facteur consistait en la célébration de l'armistice après la fin de la 2ème Guerre mondiale, a encore expliqué M. Djerbal. Pour ce qui est du nombre de morts durant les massacres du 8 mai 1945, il a estimé que des "études systématiques" doivent être menées par des spécialistes et des historiens, bien que le chiffre de 45 000 morts ait été avancé. Il a toutefois indiqué que 79% des Algériens tués et massacrés durant cette période étaient âgés entre 15 et 45 ans et plusieurs d'entre eux avaient été déportés. M. Djerbal a également souligné que 800 soldats irréguliers et deux régiments de tirailleurs ont été engagés dans la seule région de Sétif pour "pacifier" les djebels, alors que l'aviation avait été utilisée contre les douars entre les 9 et 19 mai. Qualifiant ces massacres de "véritable guerre contre des civiles", il a indiqué que la région de Sétif uniquement avait reçu 38 tonnes de bombes.