Deux voitures piégées ont explosé samedi à Reyhanli, une petite ville du sud de la Turquie, près de la frontière avec la Syrie, faisant au moins 18 morts et plus de 40 blessés, tandis que les autorités turques envisageaient un lien entre ces attaques et le conflit syrien. "Nous en sommes malheureusement à 18 morts, et le nombre de blessés est aussi en train d'augmenter", a affirmé le ministre turc de l'Intérieur, Muammer Güler, cité par l'agence de presse Anatolie, après avoir fait état dans un précédent bilan de 13 morts et 22 blessés. Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a évoqué devant des journalistes à Istanbul "près de 20 morts et 46 blessés", dont certains dans un état grave, faisant craindre une aggravation du bilan. Répondant aux questions de journalistes, M. Güler a indiqué que deux véhicules remplis d'explosifs avaient explosé vers 10H55 GMT devant la mairie et la poste de Reyhanli (province de Hatay), une localité située à huit kilomètres d'un important poste-frontière avec la Syrie. "Notre gouverneur a été dépêché sur les lieux de l'attentat pour mettre en œuvre les mesures de sécurité nécessaires", a ajouté M. Güler. Les déflagrations étaient particulièrement puissantes et les secouristes recherchaient d'éventuelles victimes sous des décombres d'immeubles effondrés, selon Anatolie, qui mentionnait plusieurs véhicules totalement détruits par les explosions. La mairie notamment a été gravement endommagée et les explosions ont provoqué une coupure d'électricité dans toute la région avoisinant Reyhanli, a rapporté la chaîne d'information NTV. Une quinzaine d'ambulances ont été envoyées à Reyhanli, et deux avions-ambulances ainsi que plusieurs hélicoptères-ambulances s'apprêtaient à rallier la petite ville de 60.000 habitants, a indiqué sur NTV le ministre de la Santé, Mehmet Müezzinoglu. Les attentats ont provoqué une grande panique chez les habitants et des groupes de jeunes ont commencé à prendre à partie les ressortissants syriens présents à Reyhanli, contraignant la police à tirer en l'air pour disperser la foule, a indiqué NTV. Des milliers de Syriens fuyant les combats dans leur pays séjournent à Reyhanli et dans le camp de réfugiés jouxtant la ville. Interrogé sur un lien entre ces attentats et le conflit qui sévit en Syrie depuis plus de deux ans, M. Güler a refusé de s'exprimer. "Nous allons mener l'enquête sur tout cela, nous allons tout éclaircir", a-t-il seulement assuré. Le chef de la diplomatie turque, Ahmet Davutoglu, a cependant souligné la "coïncidence" entre ces attaques et une "accélération" des efforts pour résoudre la crise syrienne, avec notamment une visite prévue de M. Erdogan à Washington le 16 mai. "Que ceci (les attentats) se produise à une période où dans le monde entier il y a une accélération des efforts sur la Syrie, une accélération concernant une résolution (du conflit), n'est pas une coïncidence", a déclaré M. Davutoglu aux journalistes lors d'un déplacement à Berlin. Le ministre a par ailleurs prévenu: "Nos forces de sécurité ont pris des mesures (...) Nous ne permettrons pas de telles provocations dans notre pays". M. Erdogan a pour sa part souligné que "toutes les unités de renseignement" étaient à pied d'œuvre pour identifier les responsables de l'attentat. "Certains, qui ne voient pas de manière positive le vent de liberté qui souffle sur notre pays, peuvent être impliqués dans ces actions", a déclaré le Premier ministre, faisant référence au processus de paix en cours depuis plusieurs mois entre Ankara et les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Les autorités turques avaient déjà imputé aux services de renseignement syrien un attentat à la voiture piégée qui avait fait 17 morts et 30 blessés le 11 février au poste-frontière de Cilvegözü, proche de Reyhanli. Le poste-frontière syrien de Bab al-Hawa, face à Cilvegözü, est aux mains de la rébellion syrienne depuis l'été 2012. La Coalition nationale de l'opposition syrienne a condamné l'attaque dans un communiqué, dénonçant une tentative par le régime de Damas de "se venger de la population turque et de la punir pour son honorable soutien au peuple syrien, dont son accueil des réfugiés syriens". La Turquie soutient les rebelles syriens et a appelé le président Bachar al-Assad à quitter le pouvoir. Elle accueille sur son sol quelque 400.000 syriens, dont la moitié dans des camps de réfugiés.