Pour son 1499e et avant-dernier match à la tête de Manchester United, Alex Ferguson a fait des adieux victorieux à son public d'Old Trafford dimanche, dans un +Théâtre des rêves+ où le manageur écossais a fait cauchemarder bien des équipes durant ses 26 ans de règne. Sous une pluie battante, les Gallois de Swansea ont cependant failli gâcher la fête, MU n'offrant sa 902e victoire (2-1) à Sir Alex que dans les dernières minutes sur une demi-volée de Rio Ferdinand, son premier but depuis cinq ans et demi ! Dans les tribunes, plus de 75.000 supporteurs étaient venus assister à la dernière de Sir Alex +à la maison+. Des fans dont certains avaient déboursé jusqu'à 3500 euros sur le marché noir pour s'offrir 90 dernières minutes en compagnie du sorcier écossais de 71 ans, officiellement sur le départ pour la retraite depuis mercredi. Haie d'honneur des employés du club, des deux équipes et de l'ensemble des arbitres du jour, musique de péplum hollywoodien, marée de drapeaux rouges dans les tribunes et +tifo+ des supporteurs signé "champions": Alex Ferguson a fait son entrée sur la pelouse dans une ambiance digne d'un combat de boxe, avant de se diriger vers le public pour une séance d'autographes improvisée. Silencieux depuis son communiqué de mercredi annonçant son départ à la retraite après le dernier match de la saison, à West Bromwich Albion, le 19 mai, Sir Alex ne s'est exprimé qu'après la rencontre, avant de brandir avec ses joueurs son 13e trophée de champion d'Angleterre, une couronne acquise depuis déjà plusieurs semaines tant MU a dominé la saison. Au micro, au milieu de la pelouse, le manageur écossais a certes tenu à remercier le club: "Merci à Manchester United, pas seulement les dirigeants, les joueurs, le personnel, les supporteurs, mais vous tous. Cela a été l'expérience la plus fantastique de ma vie, merci". Mais il en a aussi profité pour adresser un message à son successeur désigné, David Moyes, un Ecossais comme lui, le manageur d'Everton. "J'aimerais vous rappeler que quand nous avons connu des moments difficiles, le club m'a soutenu, les joueurs m'ont soutenu, et votre boulot maintenant c'est de soutenir votre nouveau manageur. C'est important", a-t-il insisté. Une tribune à son nom, l'ancienne North Stand, rebaptisée +Sir Alex Ferguson Stand+ en novembre 2011, une statue à son effigie à l'entrée du stade: "Fergie" est déjà dans l'ADN du club. Et dimanche, le public n'avait d'yeux que pour lui, oubliant presque les acteurs sur la pelouse, pour cette 37e journée du Championnat d'Angleterre. Sur le terrain, pour fêter ce 38e trophée de l'ère Ferguson, le label de l'Ecossais était pourtant bien présent, avec notamment deux de ses vieux grognards formés au club: Ryan Giggs, le Gallois de 39 ans, plus de 1000 matches sous le maillot rouge, et Paul Scholes, l'Anglais de 38 ans. "26 ans, le rêve impossible": le long de Stretford End, une des tribunes d'Old Trafford, une gigantesque banderole résumait parfaitement la carrière de "Fergie" à Manchester. A son arrivée, le 6 novembre 1986, en provenance du club écossais d'Aberdeen, Ferguson, fils d'un ouvrier des chantiers navals de Glasgow, prend la direction d'une équipe traumatisée, incapable de décrocher le moindre titre de champion d'Angleterre depuis 19 ans. Vingt-six ans plus tard, Sir Alex les a transformés en des +Diables rouges+ craints par tous, avec deux Ligues des champions pour couronner un CV affolant. Old Trafford a doublé de taille, et Manchester United est désormais plus qu'une équipe de football: une marque mondiale, cotée en bourse à New York et valorisée 3,7 milliards de dollars (2,85 milliards d'euros). "C'est un peu comme si quelqu'un de la famille était mort", témoignait dimanche Liam Brennan, un de ces fans de MU qui ont connu les années de disette, dans le cahier spécial de douze pages de l'Observer, un hebdomadaire dominical. "Nous avons les larmes aux yeux", confirmait Denis Law, un des célèbres attaquants du ManU de Matt Busby -un autre Ecossais!- dans les années 1960, en arrivant au stade. Preuve de l'importance prise par Sir Alex: l'annonce de son départ à la retraite, mercredi, avait même éclipsé le discours du Trône de la Reine. Et l'attente du nom de son successeur a fait travailler les bookmakers pendant 24 heures, jusqu'à l'annonce de l'heureux élu. A 90 minutes de rejoindre le banc de ManU, David Moyes a d'ailleurs lui aussi fait ses adieux dimanche, à Liverpool, devant son public de Goodison Park. Et lui aussi est sorti du terrain victorieux, 2-0, contre West Ham.