Neymar, dernier diamant de la mine aux talents du foot brésilien, porte les espoirs de tout le Brésil à un an du Mondial, en plus d'une écrasante couronne de "nouveau Pelé" et d'un statut de rock-star aux multiples engagements marketing. Mais la mission impossible et sacrilège d'égaler le Dieu Pelé ne suffit pas au "Kid" bling-bling à la crête d'Iroquois. Libéré vendredi par son club de Santos, il était confronté à un choix cornélien: rejoindre au FC Barcelone l'actuel meilleur joueur du monde, Lionel Messi, qu'il rêve de supplanter un jour. Ou affronter l'ennemi héréditaire argentin sous les couleurs du Real Madrid. Sur son compte Instagram, il a finalement annoncé samedi soir qu'il avait choisi de porter le maillot de l'équipe catalane. Technique insolente, buts en rafales, le jeune (21 ans) attaquant de Santos s'est vite imposé comme l'icône d'un Brésil orphelin d'artiste majeur depuis qu'ont pâli Ronaldo, Ronaldinho ou Robinho. Le beau gosse est partout. Interviews mécaniques à la chaîne, sites web, publicités pour caleçons, événements promotionnels. Les ados brésiliens réclament "une Neymar" chez le coiffeur. Les filles hurlent sur son passage, comme les groupies des Sixties sur celui des Beatles. Il distille sa vie privée sur les réseaux sociaux. Photos avec son jeune fils, né d'une ancienne liaison. Romance avec la jeune actrice de télénovelas Bruna Marquezina, annoncée en marge du dernier carnaval de Rio... Sa notoriété se mondialise. Consacré "futur Pelé" en Une de Time Magazine en février, il vient d'être désigné pour la deuxième année consécutive par la revue américaine Sport Pro comme le plus grand potentiel marketing du Monde.... devant Messi et le golfeur irlandais Rory McIlroy. "Version brésilienne de Beckham"? Pression intenable? Neymar esquive: "Ca fait partie du métier. C'est une responsabilité, mais elle est savoureuse". Surexposé, il "souffre d'une baisse de rendement physique, n'a plus marqué en cinq matches. Neymar est en train de se convertir en version brésilienne de Beckham", s'inquiète le journal Globo. Ce serait dommage. Car le foot court à l'état pur dans les veines de ce fils d'un honnête footballeur professionnel qui l'a entraîné dans une enfance nomade, et veille aujourd'hui sur sa carrière et ses intérêts. Gamin, Neymar réclame un ballon à chaque anniversaire. Il cisèle sa technique hallucinante à l'école du "futsal". Repéré à un tournoi scolaire, il signe à l'âge de 13 ans son premier contrat avec Santos en 2004. Salaire, 450 reais (225 dollars), dont ses parents reversent un dixième à une église évangélique. En 2005, le Real Madrid de Florentino Perez lorgne déjà sur lui. Le poids de la Seleçao Mais ce petit gabarit (1m74) reste alors à Sao Paulo, pour le bonheur de Santos. Il passe professionnel à 17 ans, en 2009. Et flambe immédiatement. Bilan: 137 buts en trois saisons et 221 matches, trois titres de champion de l'Etat de Rio, une coupe du Brésil et une coupe Libertadores. Ne manque qu'un championnat national. Passements de jambe, roulettes, contre-pieds, sombreros: Neymar, c'est d'abord un dribble aérien comme un pas de danse, ravageur et chambreur, qui humilie le défenseur. Puis une accélération foudroyante, une frappe sèche qui fait vibrer les filets. Mais aussi une habitude incorrigible à s'effondrer à la moindre esquisse d'un geste défensif, à simuler. Autre bémol, sous le maillot de la Seleçao le jeune prodige n'explose pas autant qu'en club, alors que c'est là que tout le monde l'attend désormais. Malgré un bilan plus qu'honnête (19 buts en 31 sélections), il connaît deux échecs cuisants à l'image d'une Seleçao rajeunie et à la peine, reléguée au 19e rang du classement Fifa: une défaite en finale de la Copa America (2011) et encore une finale perdue au tournoi olympique 2012 face au Mexique. Beaucoup, Ronaldo le premier, l'ont poussé à s'exiler en Europe, pour aller s'aguerrir aux défenses ultra-rapides et compactes du vieux continent, franchir l'échelon supérieur. "Dans tous les matches à l'étranger il joue mal", a commenté Pelé en personne. "Ils pensent tous qu'il doit résoudre les problèmes de la Seleçao. Neymar n'est pas préparé pour recevoir ce poids. Il ne joue pas à l'étranger, le football européen est différent du football latino-américain". Et de tacler: "Nous, du Santos, disons qu'il est le meilleur du monde. Mais il est déjà plus préoccupé d'apparaître dans les médias que de jouer pour l'équipe. Sa préoccupation est de changer de style, de coupe de cheveux"...