Ce que tout le monde considérait au départ pour une information de journaux, infondée pour les uns, à prendre avec précaution pour d´autres, est devenue, six mois plus tard, une très sérieuse affaire de justice. El Pais, qui fut le premier quotidien à faire état de documents prouvant l'existence d'une «caisse noire» dans la comptabilité du premier parti qui gouverne l´Espagne, le Parti Populaire (PP), du Président Mariano Rajoy, était loin de se douter de la dimension qu'allait prendre ses révélations. Cette grave affaire de corruption au sein du Parti Populaire est en train de remonter au plus haut niveau du gouvernement, puisque l´ex-trésorier du PP Luis Bárcenas, l´homme par qui tous les scandales arrivent, a fait des révélations fracassantes lundi soir. Durant sa déposition durant cinq heures devant le juge Pablo Ruiz de l'Audience nationale, la plus haute juridiction pénale espagnole, qui instruit cette affaire qui porte son nom, il a fait état de l'existence d'une «caisse noire» à partir de laquelle il a dit avoir versé des extras de salaires à de hauts dirigeants du PP. Parmi eux, le Président Mariano Rajoy et la secrétaire générale du PP, Mme Maria Dolores de Cospedad, qui auraient obtenu 25 000 euros, en billets de 500 euros. Cet argent proviendrait d'une commission de 300 000 euros versée dans cette caisse noire par le chef d'entreprise Villar Mir en contrepartie d'une opération immobilière dans la région de Tolède. L'ex-trésorier du PP est en détention préventive depuis le 27 juin à la prison Soto del Real (Madrid). Il a remis au magistrat des centaines de documents originaux ainsi qu'une clé USB sur l´état de la comptabilité du Parti Populaire durant toute la période de 1990 à 2008. Sa mise sous mandat de dépôt a été décidée pour éviter qu'il détruise les preuves ou prenne la fuite à l'étranger, où il a ouvert un compte en Suisse de 25 millions d´euros et placé 22 millions d´euros en Uruguay et aux Etats-Unis. Le Président Rajoy, qui a toujours nié les accusations portées contre lui, au cours d´une conférence de presse, s´est contenté de lire un communiqué pour répondre aux accusations portées contre lui par l´ex-trésorier du PP. «L´Etat ne cédera pas à ce chantage et je terminerai le mandat pour lequel les Espagnols m´ont élu.» Son mandat expire en 2015 mais d´ici là l´affaire pourrait bien prendre une dimension politique incontrôlable sur fond de crise économique qui menace de se prolonger jusqu´en 2016.