Les législatives israéliennes, de par la volonté de Sharon, se déroulent dans un bain de sang palestinien. Quatorze Palestiniens tués, des dizaines d'autres blessés, tel est le bilan de l'agression menée dans la nuit de samedi à dimanche, par l'armée d'occupation israélienne à Ghaza. L'attaque la plus violente contre Ghaza depuis 1994 selon les observateurs. Les soldats israéliens se sont livrés à une véritable expédition punitive à l'encontre du peuple de Ghaza faisant sauter quatre ponts de la ville, en tirant aux missiles sur les maisons et en dynamitant une centaine d'ateliers. Cette nouvelle agression de l'armée israélienne d'occupation intervenait à quarante-huit heures des élections législatives israéliennes, dans lesquelles l'actuel Premier ministre, le sinistre Ariel Sharon, joue son avenir politique. Aussi, c'est par le sang des Palestiniens que le boucher de Sabra et Chatila, -qui, par ailleurs, avec ses deux fils se trouve au coeur d'un scandale financier et de corruption-, tente de gagner des voix après l'effritement, induit par les divers scandales de ces dernières semaines, que connaît son parti, le Likoud. Quoique probable vainqueur de la consultation électorale d'aujourd'hui, il y a en revanche peu de chances que Sharon obtienne, comme il souhaitait, la majorité absolue, lui permettant de gouverner à sa convenance. De fait, Sharon qui a promis aux Israéliens la sécurité leur aura surtout apporté la douleur et le sang ayant été celui, sous le gouvernement duquel, il y eu le plus de victimes israéliennes, montrant par là qu'il est incapable d'assurer la sécurité des Israéliens par la seule puissance de son armée. En ordonnant la dernière agression contre la ville de Ghaza, Sharon reste dans son rôle de brute épaisse ne comprenant pas que la force ne pourra jamais venir à bout de la résistance palestinienne et résoudre par elle seule un conflit essentiellement politique. Il faut toutefois relever que le mandat de Sharon, lui a été octroyé par l'électorat israélien, ce qui fait que les Israéliens assument une grande part dans le recul de la paix et, partant, de leur propre sécurité, de même que d'assumer les assassinats commis en leur nom par l'armée israélienne dans les territoires palestiniens occupés. Si aujourd'hui, les électeurs israéliens reconduisent au pouvoir le boucher de Sabra et Chatila, cela signifie surtout le peuple d'Israël n'est pas prêt, sans doute ne l'a jamais été, à la paix avec les Palestiniens. Aujourd'hui c'est tout le peuple palestinien, sanctionné collectivement, qui est criminalisé par Sharon qui voit en lui des terroristes partout, dans les dirigeants de l'Autorité autonome palestinienne, dans les étudiants palestiniens, - les universités d'El Khalil (Hébron) ont été fermées le 15 janvier pour six mois- et pour tout dire tout Palestinien est ainsi considéré en Israël comme un terroriste potentiel, et chaque atelier palestinien comme une usine de fabrication d'armes. Cette propension des Israéliens à voir dans les Palestiniens des terroristes et à les accuser de tous les maux confine à l'hystérie. Ce n'est sans doute pas avec cet état d'esprit que la paix pourra être envisagée dans une région qui souffre du joug des gouvernants israéliens. Aussi, il ne faut pas attendre grand-chose des élections législatives de ce jour, d'autant que Sharon est quasiment assuré de succéder à lui-même. Seul un engagement réel et dynamique de la communauté internationale, -dont il faut bien relever le silence répétitif à chaque exaction israélienne contre le peuple palestinien-, pourra contrebalancer l'impunité dont bénéficie l'Etat hébreu, que Sharon met à profit pour essayer d'imposer son idée de «bantoustanisation» des territoires palestiniens. L'attaque de la nuit de samedi à dimanche n'est en fait qu'un prélude à la réoccupation de la bande de Ghaza -que Sharon envisage de faire aboutir dès sa réélection-, comme cela a été le cas de la Cisjordanie en mars de l'année dernière. Cependant la communauté internationale qui s'est désistée de ses responsabilités envers le peuple palestinien a laissé toute latitude à l'Etat hébreu de résoudre le contentieux à sa convenance. Et l'appel «à la retenue aux deux parties» fait par le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, -qui prend garde à ne pas condamner le nouveau massacre commis par l'armée d'occupation israélienne-, n'est certes pas de nature à rééquilibrer la donne. L'autorité palestinienne qui condamna fermement cette nouvelle agression veut saisir le Conseil de sécurité. Toutefois il est évident que le Conseil de sécurité, bridé par le veto américain, n'a jamais eu les moyens d'agir pour rétablir le droit dans cette région et, notamment, celui des Palestiniens d'ériger leur Etat indépendant.