Transcendance est l'intitulé de l'exposition déclinée en différents matériaux: bronze, bois, marbre et pierre. L'art évolue et change. La perception qu'on a de notre univers aussi. L'artiste aujourd'hui, ne se contente plus de copier la nature mais il la reproduit à sa façon. En s'y inspirant, il donne à voir de nouvelles visions, aussi étonnantes et surprenantes les unes que les autres. Suggérer, au lieu de faire voir la chose telle qu'elle est afin de laisser libre cours à l'imaginaire et son sens de l'interprétation est le credo de certains artistes-peintres contemporains. Parmi eux, Mahieddine Cherrad. C'est dans cette optique que s'inscrit sa dernière exposition qui se tient actuellement à la bibliothèque urbaine de Mohammadia. Baptisée Transcendance, elle rassemble 26 oeuvres d'art déclinées en plusieurs matériaux nobles et naturels (bronze, bois, marbre et pierre). De la peinture, première expérience artistique pour cet autodidacte, Cherrad passe à la sculpture. Cette transition d'une forme d'expression plastique à une autre, ne correspond pas à un état d'évolution mais s'inscrit plutôt dans le cadre de la continuité. «C'est un aboutissement», affirme Cherrad. Cela dit, il avoue: «Je me trouve à merveille dans la sculpture. Je m'exprime beaucoup mieux à travers elle». Artiste naturaliste, Mahieddine Cherrad se plaît à faire parler ses oeuvres même si de prime abord, on bute devant l'opacité de leur incompréhension. Le savoir passe par la lecture des symboles comme l'illustre une de ses oeuvres, «Signes». Divisée en plusieurs compartiments, elle est truffée à juste titre de signes notamment de l'alphabet arabe (la première et la dernière) et surtout toutes sortes de formes géométriques (losange, carré, cercle): l'univers ou le rapport cyclique entre la vie et la mort tel semble être le thème central autour duquel s'articule cette exposition comme suggèrent des titres comme Femme, La vie, Mère et enfant, Testament II et Le passé, le présent et l'inconnu. Le Tassili qu'évoque une des oeuvres de l'artiste fait partie de notre patrimoine national. Un paysage naturel féérique qui s'est imposé à travers les temps comme une trace incontournable, une empreinte indélébile du passage de l'humanité, qu'il faut absolument préserver. La femme, l'élément viatique par excellence constitue par ailleurs un des sujets de prédilection de Mahieddine Cherrad. Les oeuvres réalisées sur feuille de bronze font penser à s'y méprendre à une tôle de voiture cabossée. De la carrosserie compressée qui a souffert de multiples transformations sur le coup du pliage, grillage, du martelage et de la compression...Un matériau qui, après avoir été travaillé «subit» l'opération d'oxydation et de polychromie. L'artiste procède ainsi à la dernière étape de sa création qui consiste à y apposer un peu de peinture. Des couleurs généralement dans les tons chauds et ocres qui épousent la dimension du bronze. «J'aime m'exprimer par la forme ce qui donne le relief nécessaire à mes compositions», dit-il. C'est ainsi qu'on passe d'un matériau brut à la naissance d'une oeuvre d'art, pourvue d'une haute profondeur sémiologique. Tout compte fait, même si la signification de l'oeuvre échappe à notre «intellect», reste l'attraction esthétique qui est toujours là, omniprésente. C'est peut-être là où réside le secret de la beauté chez Cherrad. Le beau demeure caché, invisible à l'oeil nu, «abstrait» en somme. A chacun de déceler son «bonheur» comme dirait Mahieddine Cherrad. Cette beauté méditative mérite qu'on s'y attarde et puis qu'on y pose un regard libre. Une exposition enfin qui vaut le déplacement. Elle est ouverte jusqu'au 30 avril.