C´est toujours avec grand plaisir de voir un cinéaste s´exprimer à la télévision, surtout à une heure de grande écoute, comme il nous a été donné de le constater avant-hier. Le plaisir est encore plus grand quand le cinéaste en question est une femme courageuse dont le parcours est exemplaire. Je parle évidemment de «Mina» Chouikh, la talentueuse réalisatrice de Rachida, film qui a eu une carrière très honorable en Europe. C´est dans l´émission Saraha Raha que l´artiste a été sollicitée pour s´exprimer sur les conditions de financement des films algériens. Et c´est par euphémisme que la réalisatrice s´est exprimée sur «le désengagement de l´Etat» dans la politique culturelle depuis la déstructuration de l´ONCIC au milieu des années 80. Quant à priver le secteur productif des rentrées de la distribution, la production cinématographique a périclité. Ajoutez à cela le fait que les salles de cinéma dans leur immense majorité, ont été rétrocédées au secteur privé qui les a transformées en salles de projection vidéos et en usines à hamburgers. Le résultat est que la majorité des rares films produits depuis la désertification du secteur audiovisuel n´a pas été vue par le public algérien. Seuls quelques films qui ont eu l´heur de passer à la télévision, dans des festivals ou dans des activités culturelles annexes, ont pu être appréciés. En règle générale, c´est toujours sur les chaînes d´outre-mer qu´on apprend la sortie de films faits par des Algériens et financés par la conjonction de plusieurs facteurs étrangers et nationaux. Dans les pays développés, le montage financier s´effectue soit par l´apport de grandes maisons de production privées ou par l´aide désintéressée de mécènes fortunés ou de fondations généreuses (comme c´est le cas aux Etats-Unis) et par l´aide d´un fonds spécial créé à cet effet qui contribue à hauteur de 10% dans le financement de la production (comme c´est le cas en France). En Algérie, hélas, il n´y a pas de secteur privé qui soit disposé, culturellement et financièrement, à prendre le relais d´un Etat défaillant, car l´infrastructure qui permettrait une rentabilité du produit filmique est inexistante. C´est pour cette raison que le public algérien est obligé de se rabattre sur la production télévisuelle qui s´implique de plus en plus dans la production cinématographique.