Dans les profondeurs de la vision politique du SG de ce parti, sa mise à l'écart serait plutôt un exemple à proscrire des moeurs politiques. Voilà qui est fait! La crise au sommet de la pyramide du pouvoir a pris fin. Mais pas comme l'auraient souhaité certains, à l'évidence. Mais le fait est là, intangible et parlant. Ali Benflis, qui n'est plus Chef du gouvernement depuis avant-hier soir, est toujours, et pour cinq ans, le secrétaire général du parti du FLN. Pour éviter que des interprétations n'affectent la vérité sur ce qui s'est passé entre lui et le chef de l'Etat au moment de se faire congédier par ce dernier, il a tenu à animer une conférence de presse. C'était hier. Mais, au préalable, il avait tenu à préciser ses pensées dans une déclaration officielle dans laquelle il était écrit, noir sur blanc, qu'il n'a pas démissionné de sa fonction de Chef du gouvernement, mais qu'il en a été démis par le chef de l'Etat par une décision souveraine. Une décision qui, à première vue, n'hypothéquerait ni la continuité de l'Etat ni le fonctionnement des institutions. A première vue seulement! Car dans les profondeurs de la vision politique de Ali Benflis, sa mise à l'écart - fût-elle en phase avec les prérogatives que confère la Constitution au chef de l'Etat - serait plutôt un exemple à proscrire en matière de moeurs politiques. Comment? Tout simplement parce que le Président de la République n'a pas tenu compte que celui qu'il venait de congédier n'est pas «monsieur tout le monde», mais le secrétaire général «de la formation politique majoritaire à l'Assemblée nationale». Le fait est-il inédit? Benflis acquiesce et confirme. Ce manque de considération à l'égard d'un autre homme d'Etat ouvrirait-il pour autant une crise encore plus profonde dans les prochains jours? Selon le secrétaire général du FLN, cette perspective ne saurait advenir dès lors que la crise qui couvait depuis la fin du 8e congrès du FLN a pris fin hier. Dans ce cas-là soit! Mais il y a l'avenir et d'abord celui, immédiat, qui devrait, sous peu, donner naissance à un nouveau gouvernement pour la composition duquel on ne saurait imaginer que le FLN ne serait pas consulté parce que justement, «c'est la formation majoritaire à l'APN». Posons la question. Que se passerait-il si le FLN n'était pas consulté à ce propos? Un cas improbable par les temps qui courent ? Qui sait ? A supposer maintenant que le FLN soit consulté, que se passerait-il? Sur ce point, Ali Benflis est intraitable. Si le FLN était placé dans cette perspective, les ministres qui le représenteront seront ceux que ses instances auront désignés et non pas ceux, fussent-ils militants du FLN, qui l'auraient été par des voies de traverse, occultes. Le principe étant retenu, que se passerait-il au cas où le nouveau Chef du gouvernement, autorisé sinon chapitré à cette fin par le chef de l'Etat, prendrait langue avec le FLN pour constituer son équipe? Ce serait d'abord un geste d'urbanité incontestable. Un geste que l'opinion publique retiendra sûrement. Chose rare, mais elle le sera...Ouyahia sera-t-il, alors, prêt à diriger un gouvernement dont la majorité des ministres, comme Ali Benflis l'imagine, sont des militants FLN pour la même raison que ce parti est désormais «le parti majoritaire de l'APN»? A supposer que cette perspective devienne un fait intangible. Dans ce cas, bien évidemment, la crise qui, comme une épée de Damoclès pourrait continuer de planer en menaçant nos institutions, serait écartée. Le FLN, qui ne voudrait être en aucune façon un «parti alibi», demanderait non seulement le plus grand nombre de portefeuilles pour les siens, mais également des portefeuilles de poids dans les secteurs économiques et pétroliers sans parler des ministères de souveraineté. Le tout sans rien céder de ses prérogatives. Cela étant clarifié, il reste que Ali Benflis n'a pas tout révélé. A quand la suite du récit? Contraint de respecter au pied de la lettre un devoir de réserve strict, il aura sûrement beaucoup à dire dans d'autres occasions. Et comme à partir d'aujourd'hui il doit se sentir plutôt libre de ses mouvements et de ses propos, des occasions de s'exprimer ce n'est pas ce qui lui manquera le plus. Les journalistes le savent. Comme ils savent qu'il ne ménagera pas ses efforts en volume d'égards d'estime à leur intention.