Des patrouilles à cheval sillonnant les forêts algériennes pour débusquer les pyromanes, mais aussi pour conseiller les campeurs et les promeneurs sur les risques d´incendie, des gardes forestiers équipés et sur le qui-vive pour signaler tout acte susceptible de provoquer un foyer : par ces chaleurs étouffantes, un mégot, un morceau de verre peuvent provoquer l´irréparable et détruire des centaines d´hectares de forêt. Des véhicules de pompiers équipés comme il se doit de tous les moyens de lutte contre les feux de forêt. Des canadairs. Des sentiers aménagés entre les arbres pour faciliter les interventions des soldats du feu. Des policiers et des gendarmes prêts à arrêter les éventuels pyromanes. Des coupe-feu mettent les maisons construites en pleine forêt à l´abri des flammes vengeresses. Hélas, détrompez-vous, cela ne se passe pas en Algérie. Malgré les centaines de départs de feu qui chaque semaine font des ravages dans les campanes algériennes. A notre connaissance, aucun pyromane n´a été appréhendé et placé sous les verrous, et pourtant il est clair qu´au moins un incendie sur deux est d´origine humaine. Pour reprendre Brecht, le ventre est encore fécond d´où est sortie la bête humaine. Distanciation et théâtre de l´absurde : des millions de dinars sont dépensés chaque année pour circonscrire les incendies, au péril de la vie des soldats du feu, et mettant en danger les populations, alors que rien n´est fait dans le domaine de la prévention. Osons une question: qui est responsable des feux de forêt? Si la Protection civile est chargée de les éteindre, ce n´est pourtant pas elle qui est en charge de la prévention. Ici, c´est l´Etat, avec ses démembrements, et les collectivités locales, qui sont appelés à intervenir en mettant en place les moyens. Au lieu de cela, les incendies sont accueillis chaque année comme une fatalité. Mektoub! Voilà un chapitre tout désigné pour l´affectation d´une partie du plan Marshall de 55 milliards de dollars, sauf si on considère que les forêts ne sont pas une richesse naturelle indispensable, que les nuisances causées par les incendies aux populations ne sont pas dangereuses, que la destruction de la faune et de la flore, -touchant parfois des espèces rares ou en extinction, - ne sont pas une calamité, alors on pourra choisir de ne rien faire. Si l´on fait les comptes, on s´apercevra que dans tous les cas de figure, la prévention, dans ce domaine comme dans d´autres, coûte toujours moins cher que les effets induits par la catastrophe. A la suite des inondations de Bab El Oued, l´Etat a dégagé une enveloppe considérable pour indemniser les victimes, reloger les sinistrés, refaire les canalisations pour l´évacuation des eaux de pluie. La même chose a été faite après le séisme de Boumerdès: relogement, indemnisation. Mais l´Etat a également promulgué une nouvelle réglementation dans le domaine de la construction parasismique et dans celui de l´assurance. Donc l´Etat a décidé d´agir en amont pour les tremblements de terre et en diminuer les effets. La même chose ne peut-elle pas être tentée contre les incendies, en commençant pas la lutte contre les pyromanes. Pendant que ces derniers continuent de rire sous cape en s´amusant de la souffrance des autres, l´Etat trouve urgent d´attendre que se produisent d´autres catastrophes. Faudra-t-il que nos députés prennent leurs responsabilités en faisant une proposition de loi qui renforce la prévention et les moyens de lutte contre les pyromanes ? Faudra-t-il que le fameux comité du plan Orsec s´autosaisisse pour étudier les moyens à mettre en place? Mais ce comité existe-t-il réellement? Au vu de son silence, on pourrait en douter. Pourtant, c´est la seule chose qui reste à faire, le scénario se répétant chaque année avec plus de férocité.