«Ce que nous cherchons toujours au Festival de Cannes, c´est que la liberté des artistes du monde entier soit assurée.» Gilles Jacob Le 22 mai, Arte diffusera un documentaire sur le président du Festival de Cannes depuis 2001, Gilles Jacob. Celui qu´on surnomme «Citizen Cannes», est le véritable maître de cérémonie du Festival le plus médiatisé de la planète. Il a occupé le poste de délégué général (sélectionneur en chef du Festival) depuis plus de 30 ans et prendra sa retraite en juillet 2012. C´est lui qui a poussé le délégué général à sélectionner le film de Bouchareb. C´est un visionnaire infatigable. Contrairement aux festivals français, il a ouvert la compétition aux Asiatiques, aux Latino-Américains et a surtout protégé le cinéma européen du cinéma américain commercial. Le festival c´est aussi défen-dre des causes politiques justes face à l´intégrisme en Iran, aux menaces des droits de l´homme en Chine et l´impérialisme des Américains dans les pays d´Amérique latine et la guerre en Irak. C´est sûr, le Festival fait de la diplomatie à sa manière. Lors de l´ouverture, l´accent a été mis sur la chaîne du réalisateur iranien Jaafar Panahi, emprisonné par les autorités de son pays. Cinéaste emprisonné, c´est le scénario idéal pour la réussite d´un festival cinématographiquement politique. Cannes en a connu beaucoup. Sachant qu´il ne pourra jamais être libéré, Gilles Jacob a tenté le tout pour le tout, en marquant de cette image son action. Roman Polanski a été aussi pour Gilles Jacob, une occasion pour marquer la solidarité au cinéaste franco-polonais et surtout réunir une pétition pour sa libération. Mais voilà que Charlotte Lewis, une comédienne anglaise, accuse maintenant le réalisateur d´avoir abusé d´elle quand elle avait 16 ans. Un scandale de trop pour Gilles Jacob, qui a décidé de mettre en hibernation son action politiquo-cinématographique. Car Gilles Jacob, cinéphile professionnel, a plus de poids et de pouvoir que le ministre de la Culture en France. Il a droit de vie ou mort sur les films du monde entier. Être sélectionné au Festival de Cannes est une consécration magistrale dans le parcours d´un cinéaste. Qui connaissait avant Pedro Almodovar, Abbas Kiorostami, Emir Kusturica, Michael Hennecke, Elia Souleiman Takishi Kitano, ou encore Michel Moore avant d´être consacrés à Cannes? Gilles Jacob a contribué à la découverte de nouveaux talents, à l´émergence de nouvelles générations de cinéastes tout en tirant le maximum. En accordant la Palme d´or au film de Yilmaz Guney alors qu´il était en prison, il a offert la tribune de la liberté d´expression à un cinéma souvent réprimé, souvent écarté du carcan habituel. Cannes, ce n´est pas seulement les paillettes, les stars, les yachts, les photos calls, c´est aussi la liberté d´expression, de filmer et de projeter ses films. Mais ce qu´on reproche au cinéma choisi et classé par Gilles Jacob, c´est surtout son manque d´engagement pour la cause palestinienne, le cinéma arabe, hors égyptien, et le cinéma du tiers monde, à qui il accorde tout de même quelques premières visions hors caméra. [email protected]