Ismaïl se dispute avec Rachid, son voisin. On les sépare. Mais le jeune Ismaïl monte droit chez lui et... Si on a toujours soutenu que la colère est mauvaise conseillère, pour ce dossier, la colère a mené droit vers le meurtre. Un seul coup au coeur et s´en est fini pour Rachid, 46 ans, décédé et Ismaïl, 25 ans, condamné à une peine de réclusion criminelle de 18 ans alors que Fatima sa maman et Brahim son frère, ont écopé de un an avec sursis... Le 16 avril 2010, il y aura exactement une année, à la haute Casbah, Rachid revenait de la mosquée juste après la prière de l´Ichâ. En cours de route, il se prend d´une prise de bec avec son jeune voisin, Ismaïl, revendeurs de... diouls à l´occasion. Les mots échangés sont durs. On se prend au collet. Les voisins et les proches s´en mêlent. On les sépare tant bien que mal. Rachid monte chez lui. Puis tout va vite. Ismaïl est excité. A la barre, on évoquera cette malheureuse attitude du père du futur agresseur au couteau qui aurait incité le fils à tuer Rachid. Une fois at home, Rachid dira à sa femme, qu´il venait d´avoir une sérieuse et chaude discussion avec Ismaïl, ce dernier aurait envoyé Youssef son frère, demander à Rachid de descendre dans la rue. Entre-temps, Ismaïl était lui aussi rentré chez lui. Il se dirige vers la cuisine, s´empare de l´unique long couteau de cuisine et redescend attendre Rachid qui ignorait qu´il ne lui restait plus beaucoup de temps à vivre. Les deux voisins s´avancent l´un vers l´autre. Rachid reçoit des coups de couteau un peu partout sur le corps. Ismaïl dira, plus tard, que lui aussi en avait reçu. Mais un seul coup sera fatal. Lorsqu´il tombera sur la chaussée, Youssef, le futur assassin, ramasse son voisin, demande à Réda, un voisin de faire marche-arrière et d´emmener Rachid à l´hôpital. «En cours de route, Rachid discutait avec nous. On aurait dit un passager qui n´a reçu aucun coup de couteau», avaient raconté, à Brahim Kherrabi, le président du tribunal criminel d´Alger, Réda et Youssef. Le couteau. Voilà un objet qui a pris plus de 20 mn au tribunal. C´est la maman qui l´aurait brisé en deux mis dans un sachet pour s´en débarrasser. «Ismaïl rentre avec un couteau à la lame pleine de sang, vous décidez de vous en débarrasser sans avoir au préalable posé la question à votre fils ce qu´il venait de faire avec!» gronde le juge en direction de la maman inculpée de non-dénonciation de crime et d´avoir dissimulé le poignard, tout comme Ibrahim, son frère qui, coincé d´ailleurs à la barre au tribunal criminel, a dû comprendre les effets dévastateurs du «foie» de la mère et de l´amour fraternel né chez Ibrahim. Et même si Maitre Rabéa Azizou a bien joué son rôle, en représentant la partie civile, Maître Rachid Akboudj, le défenseur de Fatima et Ibrahim a, lui réussi à aller vers le coeur des membres du tribunal criminel, pas du tout ébranlés par les demandes nées du sévère réquisitoire de Mohammed Kessar, le procureur général qui a plaidé avec beaucoup de calme, mais en réclamant la perpet et ce, sur la base des termes des articles 254-255-256-257 et le 261 du Code pénal. Il y avait aussi cette bêtise de l´accusé qui était monté chez lui directement dans la cuisine, s´emparer d´une lame et redescendre demander au défunt Rachid de le rejoindre. Mais les débats ont beaucoup éclairé l´intime conviction des juges et des jurés que ce beau jeune garçon de 25 ans, au casier vierge, n´était point un sanguinaire. Ce qui était important de souligner, c´est le nombre appréciable de questions posées par les avocats, Maître Chérif Chorfi, Maître Madjid Adboudj, les deux défenseurs de Ismaïl, Fatima et Ibrahim, tous trois dans de mauvais draps avec le guet-apens et la préméditation. Quant à Maître Rabéa Azizou, l´avocate de la partie civile, une avocate attentive qui n´a pas voulu polluer l´atmosphère en s´abstenant de poser des questions, car elle sait, par expérience, qu´il y a des questions qui «pondent» des réponses.. assassines, lesquelles peuvent peser dans le plateau de la balance de l´intime conviction des trois juges et souvent des deux jurés. D´ailleurs, avec l´assistance de son duo d´acier, Nadia Amirouche et Fatima Zohra les conseillers, Brahim Kherrabi, le président avait vite compris où se dirigeait l´élégant et le tenace Maître Chorfi qui fait toujours en sorte d´apparaître et d´être le véritable partenaire de la justice. Et puis, l´avocat de Bab El Oued sait très bien que ce genre de crime est franchement le B.A.- BA du pénal. Ah! le voisinage. Les voisins et le chapelet de soucis quotidiens, d´ennuis interminables et autres cortèges de deuil, de larmes, de sang, de sanglots, de pleurs. A l´issue de longues délibérations, le tribunal criminel revient avec 18 ans de réclusion pour Ismaïl et un an de prison assorti du sursis pour sa maman et Youssef son frère. La veuve demeure interdite. Elle qui avait entendu la perpet sortir de la bouche du procureur général! Elle venait d´apprendre que les juges n´était pas les caporaux du... parquet.