Comme à la roulette, un père de treize enfants ayant donné six coups de couteau à madame, est jugé et écope de quatre ans ferme. Cheh! Oum El Khir avait bouclé ses cinquante-trois ans en cette mi-Ramadhan 2011 qu'elle n'est pas près d'oublier. Jamais elle n'oubliera ces douze minutes infernales. Jamais elle ne pourra effacer de sa mémoire ni de sa «pure-mémoire» les faits graves qu'elle a subis face à son époux, Berhouma, soixante et onze ans, qui lui a fait treize enfants dont dix en vie et deux filles mariées et mamans déjà, sachant que la benjamine avait, il y a une année, cinq ans! Les faits qu'elle - Oum El Khir - avait subis sont simples à raconter mais affreux à répéter. Il restait deux heures avant le coup de la première cuillère de chorba avalée du côté de Staouéli (Alger) lorsque Berhouma,qui était dans un «coma» propre aux jeûneurs-veilleurs, entra avec sous les bras, une corbeille de figues de barbarie. Des figues de barbarie pour assister à une scène digne des Barbares que l'histoire évoque à longueur de siècles... Le père de famille marmonne, balbutie et ordonne quelque chose qu'Oum El Khir, elle aussi à moitié assommée par seigneur jeûne, ne saisit pas d'abord. Elle lui fait un signe voulant probablement comprendre qu'elle n'a pas entendu ses «ordres». C'est à son tour de tendre l'oreille: «Quoi, quoi? que dis-tu? Ô femme!» Et madame de crier sa question. Monsieur entre dans une colère noire. Il crie son désaccord de voir une épouse, grand-mère et mère de dix enfants qui fait entendre sa voix extra-muros. «Et puis quoi encore? Suis-je un homme ou non» en lui balançant un coup en plein visage. Et hop! c'est parti. Il se retourne, sa femme étant toujours debout, comme si elle le défiait. La colère noire devient démence car Berhouma s'empare d'un couteau et se met à frapper là où la chair peut encaisser. La raclée est mémorable. Des coups, des coups de pied, de mains, de poings et même de tête. La femme crie. Les enfants qui étaient à la maison crient, impuissants, de ne pouvoir désarmer le père entré dans une presque folie-démence passagère difficilement maîtrisable. Finalement, il ne s'arrêtera qu'à la vue du sang. Sa femme venait de recevoir six coups de lame de divers degrés de gravité. Entre-temps, les proches qui s'étaient aventurés à l'intérieur du home parvinrent à calmer l'homme qui ne cessait de crier sa furie d'être une victime d'une indigne épouse, qui est à ses yeux, coupable d'adultère! A cinquante-trois ans! Il n'y a qu'à voir sa bobine pour s'apercevoir qu'elle en fait dix de plus! Les enquêteurs prennent le dossier en mains. Le chapelet de poursuites d'auditions, de témoignages, les confrontations des uns et des autres mènent droit chez Lynda Dabouci qui ne s'amusera pas à faire du sentiment. Et surtout par ce sacré Abdallah enfoui dans le fauteuil du ministère public. Il suivra religieusement les débats pour réclamer, le moment venu, une peine d'emprisonnement ferme de cinq ans pour coups et blessures volontaires. La partie civile parle de tentative de meurtre. On grossit les faits. On exagère la scène, on dramatise, on voudra sans l'articuler le passer à la potence, sur la chaise électrique, lui faire une injection foudroyante, le fusiller de six balles, le même nombre que les coups de couteau donnés à madame qui crie sa douleur à la barre face à une juge qui ne bat jamais des cils lorsqu'elle entre à l'audience sans pression ni recommandations... Abdallahy, le représentant du ministère public qui en a vu et entendu d'autres depuis sept ans qu'il résiste aux «tempêtes» du bateau «Cheraga», attend le moment favorable pour s'exprimer. Il ne le fera pas par affection envers la victime ni haine pour l'inculpé que la détention préventive a fait encore vieillir encore plus car en taule, il fait figure d'ancien bagnard au milieu de très jeunes détenus dont certains, ayant eu vent de ce drame, ont tourné la tête pour ne pas voir le regard de ce «Hagar» coupable de hogra envers une femme (remarquez qu'ils ne disent pas «Sa» femme!) Tenez, c'est une occasion en «or» pour informer nos chers lecteurs qu'en prison, il y a de grands criminels condamnés à titre définitif qui font la chasse à ceux des détenus qui sont condamnés pour avoir battu leurs parents, ou pour avoir joué aux pédophiles de bas étage ou encore ceux qui se sont attaqués à des femmes seules dans la rue pour s'emparer d'un portable ou d'un bijou ou encore d'un sac à main souvent vide... Revenons à Si Barhouma et Lala Oulm El Khir pour insister sur les forts moments de haine de rancune partagées, d'exclamations de X...accusations, de mots qui dépassant la pensée. Heureusement que Dabouci, en juge avisée et en maman prévenante, était là pour rappeler aux parents, les enfants et leur devenir au milieu de ce séisme, avant d'infliger une peine d'emprisonnement ferme de quatre ans pour coups et blessures volontaires à l'aide d'une arme blanche ayant occasionné un arrêt de travail de un mois! Comme quoi, on ne doit jamais battre une femme même avec une...rose...rose! Et en appel, ce sera Maître Nassima Aïd, une femme qui va défendre Oum El Khir!