«L'Union européenne apprécierait que les membres du G20, ainsi que d'autres pays membres du Fonds monétaire international financièrement solides soutiennent les efforts visant à préserver la stabilité financière mondiale en contribuant à augmenter les ressources du FMI», dit en substance le communiqué publié, hier, par le président de l'eurogroupe (instance qui regroupe les ministres des Finances européens), Jean-Claude Junker. C'est la panique. Les pays de la zone euro, après avoir sollicité l'aide du FMI qui a regretté de n'avoir pas les moyens de le faire, lancent un véritable appel au secours planétaire qu'on peut résumer ainsi: «Aidez, s'il vous plait, le FMI pour qu'il puisse nous aider!» Ironie du sort, le FMI, créé initialement pour venir en aide aux pays pauvres avec l'argent des pays riches, se voit brusquement fonctionner à l'envers. Sa directrice, Christine Lagarde (européenne de coeur), use de tous les moyens pour tenter de convaincre des pays du continent africain, comme le Nigeria, à «confier» leur argent au FMI. Hier, elle n'a pas hésité, lors d'une conférence de presse donnée à Lagos, de dire que c'est toute «l'économie mondiale (qui) est à un tournant très dangereux» en agitant l'épouvantail des «répercussions qui risquent de s'abattre sur les pays pauvres si la crise n'est pas endiguée». De toute évidence, pour forcer la main du Nigeria (5e producteur de pétrole de l'Opep), visiblement réticent à aider le FMI qui aidera l'Europe. Bien avant le Nigeria, son prédécesseur, avant ses démêlés avec la justice américaine, avait fait la même démarche dans notre pays. Ainsi, le FMI fait du porte-à-porte dans le continent africain au profit du continent européen. En réalité, le discours européen, qui se veut alarmiste, n'inquiète que les Européens. Aux Etats-Unis, là où la crise avait commencé en 2008 avec les subprimes, la banque centrale (FED) estime que l'économie s'améliore. D'ailleurs, des signes confirment la sérénité. Tandis que les USA réduisent leurs dépenses militaires en se retirant complètement d'Irak en attendant le tour programmé des troupes en Afghanistan, l'attitude belliqueuse de certains pays d'Europe (envers la Libye, la Syrie et même l'Iran) tranche. Si les premiers comptent ainsi rééquilibrer leurs comptes, les seconds pensent prendre les ressources qui leur manquent chez les autres (pétrole et reconstruction après destruction bien évidemment). Ceci même si d'autres intérêts d'ordre géopolitique convergent. Comme les Etats-Unis, les puissances asiatiques (Japon, Chine) et les pays émergents (Inde, Brésil) gardent tout leur calme devant cette «crise de la zone euro qui menace l'économie mondiale qui menacerait à son tour les pays pauvres» que se plaît à avancer la directrice du FMI. En réalité, cette thèse est celle de ceux qui font du forcing pour installer le fédéralisme en Europe. Dans une Europe qui, dans sa majorité, n'en veut pas. En premier lieu, l'Angleterre qui n'a jamais rejoint la zone euro et qui persiste en refusant de signer le dernier accord de Bruxelles. D'autres pays européens envisagent sérieusement de revenir à leur monnaie nationale. Il est hors de question pour eux de perdre leur souveraineté en confiant l'élaboration et le contrôle de leurs budgets aux commissions de Bruxelles. La crise de l'euro est purement européenne. Si la monnaie unique venait à disparaître, le monde, lui, continuera de tourner. C'est tellement vrai que les membres du G20 n'ont programmé aucune réunion d'urgence pour sauver «l'économie mondiale du tournant dangereux» tel qu'annoncé par le FMI. Bien au contraire, c'est l'Union européenne qui en appelle à la solidarité du G20. Le communiqué de l'eurogroupe, écrit dans la précipitation, confirme dans le même temps la fin irrémédiable de l'euro.