Les militants égyptiens pro-démocratie espèrent faire pression sur l'armée afin qu'elle quitte immédiatement le pouvoir. Plusieurs groupes, y compris «Les jeunes du 6 avril», qui avaient contribué à lancer la révolte contre l'ancien président, ont appelé à lever le pied dans les universités et sur les lieux de travail. Un an après la démission de M.Moubarak sous la pression de la rue, les militants qui ont provoqué sa chute exigent désormais que l'armée, accusée de perpétuer l'ancien régime et de réprimer le mouvement pro-démocratie, remette à son tour le pouvoir aux civils. Des étudiants ont prévu de manifester dans plusieurs universités, comme celle d'Aïn Chams au Caire, mais aussi à Alexandrie, et d'autres devaient se rassembler place Tahrir pour exiger le départ du Conseil suprême des forces armées (CSFA), à qui M.Moubarak a remis les rênes du pays en démissionnant. «Je suis en grève, car la situation du pays est mauvaise. Il n'y a aucune différence entre le Conseil militaire et Moubarak», a affirmé un étudiant en économie à l'Université d'Aïn Chams. L'appel à la grève a divisé la population et les forces politiques. Les Frères musulmans, qui dominent le Parlement récemment élu, s'y sont opposés tout comme de nombreux Egyptiens, qui se plaignent de la dégradation de l'économie et de l'insécurité croissante. La télévision publique a affirmé que les travailleurs du secteur des transports n'allaient pas se mettre en grève tandis que le quotidien pro-gouvernemental Al-Ahram titrait en Une: «Le peuple refuse la désobéissance civile». Après les appels à la mobilisation, l'armée a annoncé qu'elle se déploierait à travers le pays pour assurer la sécurité. Vendredi soir, le Conseil suprême des forces armées a averti qu'il ne cèderait ni aux «menaces» ni aux «pressions», en évoquant des «complots» contre l'Etat. «Nous faisons face à des complots contre la nation dont le but est de saper les institutions de l'Etat égyptien et de faire tomber l'Etat lui-même pour que le chaos règne, que la destruction prévale et que les ennemis de la nation soient satisfaits», a-t-il dit. Mais «cela ne se réalisera pas», a-t-il assuré. «Jamais nous ne cèderons à des menaces, nous ne cèderons pas aux pressions, et nous n'accepterons pas les diktats». Vendredi, des milliers de manifestants avaient traversé Le Caire pour marcher sur le ministère de la Défense, défendu par la police militaire, des blindés et des barbelés. «A bas le pouvoir militaire! Le peuple veut l'exécution du maréchal», avaient-ils scandé pendant plusieurs heures, ciblant le maréchal Hussein Tantaoui, chef du CSFA. Samedi, dans le quartier du ministère, quelques dizaines de partisans de l'armée manifestaient leur soutien au CSFA. «Je suis avec l'armée», a dit l'un d'entre eux, aussitôt empêché de parler aux journalistes par d'autres manifestants arguant que la presse allait «se moquer d'eux».