La commission électorale libyenne a commencé lundi soir à diffuser des résultats préliminaires des élections législatives plutôt favorables aux libéraux face aux islamistes. Les libéraux de l'Alliance des forces nationales (AFN) ont remporté une victoire écrasante à Janzour, dans la banlieue de Tripoli: 26 798 voix contre 2 423 pour le Parti de la justice et de la construction (PJC, issu des Frères musulmans), qui arrive en deuxième position. Le résultat est également sans appel à Zliten, près de Misrata, avec 19 273 voix pour l'AFN contre 5 626 pour le PJC, après le décompte de 74% des voix. Mais dans la ville de Misrata, qui a été un bastion rebelle assiégé pendant des mois à 200 km à l'est de Tripoli lors du conflit contre les forces de Mouamar El Gueddafi en 2011, l'AFN n'est que 4e, loin derrière une petite formation locale, le PJC et le Front national (tendance islamiste). La commission, qui n'a pas fixé de date pour l'annonce des résultats définitifs, a précisé que la collecte des données et le dépouillement des votes devraient prendre plus de temps que prévu, compte tenu des distances à parcourir et des problèmes liés à la sécurité. Les urnes sont acheminées, le plus souvent par avion, depuis les différentes régions vers l'aéroport militaire de Mitiga à Tripoli, où le dépouillement effectué dans les bureaux de vote est vérifié avant la validation des résultats. Malgré des violences et des actes de sabotage de militants autonomistes dans l'Est, le premier scrutin libre après plus de quatre décennies de dictature sous le régime de Mouamar El Gueddafi, qui avait banni les élections, est un succès. Les électeurs étaient appelés à choisir les 200 membres du Congrès national général, qui doit prendre le relais du Conseil national de transition (CNT) jusqu'à l'adoption de la future Constitution. Au vu des premiers résultats, le pays semble avoir résisté à la vague islamiste qui a déferlé sur l'Egypte et la Tunisie voisines dans la foulée du Printemps arabe, même si l'AFN a, comme tous les partis dans cette société ultra-conservatrice, fait aussi campagne sur le thème de l'islam. Cette coalition rassemble une soixantaine de partis ainsi que personnalités indépendantes, sous la direction de technocrates ayant vécu à l'étranger et prônant un islam modéré, la libéralisation économique et l'ouverture à l'Occident. Dans une allocution s'apparentant à un discours d'investiture, le chef de l'AFN, Mahmoud Jibril, ancien Premier ministre du Conseil national de transition (CNT), a appelé dimanche soir les autres partis politiques à l'unité. Lundi, le chef du Front national, Mohamed Saâd, a répondu que son parti voulait «attendre d'abord les résultats officiels» des élections. «Nous avons des échéances importantes. Nous devons trouver des dénominateurs communs qui unissent tous les courants qui ont participé aux élections», a-t-il toutefois ajouté. «La question des idéologies va disparaître au Congrès national général. C'est l'intérêt national qui triomphera», a-t-il assuré. Les premières estimations des partis portent sur les 80 sièges réservés aux listes des formations politiques, dans la prochaine assemblée qui compte 200 membres. Mais la tendance devrait être la même pour les 120 sièges réservés aux candidats individuels, dont une majorité sont soutenus par des partis politiques. Les élections ont été émaillées de violences et d'actes de sabotage dans l'Est, où des partisans de l'autonomie dénoncent la répartition des sièges au sein de l'assemblée (100 pour l'Ouest, 60 pour l'Est et 40 pour le Sud).