Son écriture, très imagée, est un cataclysme d'émotion de la brûlure du moi, quand il se met en émoi. Une délivrance de l'âme. Samira Negrouche, elle qui fréquente la rationalité du monde de la médecine, - elle est en dernière année - taquine à ses heures perdues ou opportunes la muse de la poésie et s'évade ainsi sur «le ballet» des mots, pour atterrir sur cette terre où tout est permis. Un imaginaire fondu à son corps défendant de créativité. Auteur de trois recueils de poésie : Faiblesse n'est pas de dire, Opéra cosmique et A l'ombre de Grenade, cette généreuse demoiselle commettra mardi le péché mignon de nous lire quelques extraits de sa poésie, nous faisant ainsi «l'intime» privilège de pénétrer le royaume fécond de sa rêverie et de son imagination aussi surprenante que colorée. Accompagnée, elle l'était par les images surréalistes que distillait un support auditif et visuel signé Amar Bouras sur une musique de fond de Johannes Helden. Un montage qui venait appuyer la portée fantasmagorique de l'image poétique. Elle restait cependant en deçà de toute la force imagée que suggère l'écriture, à plus forte raison, celle de Samira Negrouche, cette jeune poétesse en herbe, promise sans nul doute à un brillant avenir. De sa voix enchanteresse égrènant mot à mot «ses belles paroles». Elle ne pouvait que subjuguer et capter l'oreille d'un auditoire complètement conquis et acquis à la cause littéraire de Samira. Celle-ci a fait sensation au milieu du public de la salle Frantz-Fanon de Riad El-Feth. Onirique, suggestive, jouissive même, l'écriture de Samira Negrouche est le reflet de sa personne, un être passionné et passionnant. Sa poésie est une déferlante de braise incandescente, frémissante de désir. Divagations de l'artiste, ode à la vie et à ses contingents cosmiques. Le feu souffle la passion et le vent atténue le mal, tout comme l'air aide à voir clair et rafraîchit les idées qui bouillonnent, éclatent comme un orage ou explosent tel un volcan. Toute sa poésie est une déclaration d'amour ou un appel à l'amour, à la vie. Sensuelle, parfois érotique, sa poésie n'en reste pas moins profondément romantique et pleine de tendresse. Traversée aussi par un brin de mélancolie. Le chagrin étant le parfum de l'amour peut-être...«J'escaladerai ton nuage / car je serai / le vent / qui te portera / en chorégraphie / A travers / tes veines / Battantes / De mon coeur.», écrit-elle mais encore : «J'aspirerai / Tes larmes / Pour mon corps / Et serai / Ton cimetière / En cristal / Bleuâtre / Accueillir / ta peine / M'émerveiller / De ton / plaisir / Et jouir / De ton envol.» Riche en émotion, la poésie de Samira Negrouche se laisse écouter et même déguster inlassablement et boire goulûment. Elle est rebelle et belle. Fougueuse, ombragée, abyssale, mystique, folie douce ou violence débridée. Elle est une symphonie de maux et d'états d'âme libérés. Une expiation, une confidence et une confidente, un murmure, une correspondance harmonieuse avec une «Grenade» offerte et éprise à la fois. Un enivrant cataclysme de pudeur mêlé à la brûlure du moi quand il se met en émoi. «Mes racines / ne veulent / que toi / Et ta sève / brûlante / En unique / abreuvoir.» Comment rester insensible à ce torrent de sentiments profonds et si sincères? L'espace est ici (Taourirt, comme un rêve) personnifié et l'être aimé sacralisé comme une terre inviolable. Enfin, elle se veut aussi une note de réminiscence comme une musique aigre-douce, qui vous plonge dans le passé, proche ou lointain. Des souvenirs qui feuillettent le tréfonds de l'inconscient pour en faire surgir le nectar de cette déchirure. Les mots pleurent et cherchent le réconfort. La guérison de l'âme quand elle est en peine ou en extase. Et paradoxalement, celle-ci est pour cette étudiante en médecine, au coeur de la poésie. L'exercice qu'elle aime cultiver le plus. Le centre de son épanouissement.